L’actualité

Un menu spécial pour nos lecteurs

Pour la huitième année, L’actualité a invité un chef à préparer un menu de Noël exclusif pour ses lecteurs. Voici donc les plats de Marysol Foucault.

- PHOTOS DE CHARLES BRIAND

Cuisiner pour « réconforte­r les gens, les faire sourire, les épater, les surprendre avec des choses simples ». C’est dans cet esprit que Marysol Foucault, chef propriétai­re du microresta­urant Edgar, à Gatineau, a créé son menu de Noël, comme si elle allait recevoir quelques amis et réinventer pour eux le réveillon.

Dans les bouchées, elle a mis du jarret de porc — lisez : de la patte de cochon — et des rabioles, ces navets blancs « que malheureus­ement on boude ». En entrée, elle propose un chou farci, « qui rappelle le cigare au chou, mais en plus raffiné et avec une farce qui étonnera ». En plat, c’est du lapin, dont elle aime « la viande délicate », qu’elle accompagne de légumes eux aussi boudés : choux de Bruxelles, courge, céleri-rave. Et de marrons, parce que « c’est festif, les marrons, c’est riche, c’est presque du foie gras végétarien ». Le dessert, qu’elle a confié à sa pâtissière, est « une bûche, mais en plus gourmand » : outre le glaçage au fromage à la crème, il y a dans ce péché-là un caramel au gingembre, dont le piquant contraste avec le sucré des noix de Grenoble à l’érable.

Marysol Foucault, 38 ans mais l’air d’avoir la jeune vingtaine, est une boule d’énergie. Qui ne vit, depuis toujours, que pour, par et grâce à ce qu’elle aime par-dessus tout : « cuisiner pour les gens ». La fois où elle a quitté la restaurati­on, autour de la trentaine, elle s’est mise à la peinture. Un plaisir. Mais après moins de deux ans, elle s’est sentie « triste, déprimée ». Elle s’est soignée en revenant à son métier de cuisinière, qu’elle a appris en cuisine, dès l’âge de 15 ans, « par le plus élémentair­e : laver les planchers et faire la vaisselle ».

Tout de suite, elle attrape le virus. Très vite, elle est en cuisine, dans des restaurant­s que tout le monde connaît à Hull (maintenant fusionné avec Gatineau) : le Twist, le café Aux 4 jeudis, le Piz’za-za, le Bistro 1908. « Je travaillai­s comme une folle, parfois dans trois restos, je faisais un trip de cuisine et de pâtisserie. » À 24 ans, changement d’horizon : elle se retrouve à la campagne, dans la petite municipali­té de Chelsea, à une quinzaine de minutes de Gatineau, au Gerry & Isobel’s Country Pleasures. « Le chef avait son potager bien avant que ça devienne une mode. Nous faisions une cuisine saisonnièr­e, qui mettait en valeur les produits locaux. J’ai adoré. »

Quatre ans plus tard, Marysol revient en ville. Et découvre que les choses ont changé. « Avant, les gens d’Ottawa venaient à Gatineau. Là, ils ne venaient plus. Des restaurant­s à la mode avaient ouvert dans la capitale. Le métier était devenu une affaire de stars, de compétitio­n, même de machos. » Après sa parenthèse en peinture, elle entre au service d’une grande maison de traiteur, Epicuria. Puis se joint, pendant près de deux ans, toujours à Ottawa, à The Urban Element, à la fois restaurant sur réservatio­n, salle de réception et école de cuisine. « Je faisais tout : chef, enseignant­e, assistante des chefs invités, coordonnat­rice d’événements et, au besoin, la vaisselle. »

Septembre 2010. Sur un coup de tête, Marysol devient chef propriétai­re et lance Edgar, qu’elle mène aujourd’hui avec

deux coéquipier­s : son chef, Michael LaSalle, et sa pâtissière, Rose-Héloïse Côté. L’endroit est minuscule, 13 places. Il n’est ouvert que le midi. Mais on s’y précipite. Il faut dire que le passage de sa propriétai­re à l’émission You Gotta Eat Here, au Food Network, l’a mis sur la carte. Comme son classement au 56e rang du palmarès enRoute des meilleurs restaurant­s au Canada (pour son autre restaurant, Odile, qu’elle a gardé pendant quelques mois parallèlem­ent à Edgar). Ou sa médaille d’or au concours régional Des chefs en or. Ou encore, cette année, sa quatrième place aux Championna­ts culinaires canadiens.

Pas mal pour la chef propriétai­re d’un restaurant de poche, où l’on sert essentiell­ement... des soupes, des salades et des sand- wichs. Et qui s’est spécialisé­e dans les plats à emporter. Le menu change toutes les semaines. Il y a régulièrem­ent du poisson. On insiste sur les légumes. « Dommage que la cuisine familiale disparaiss­e, note Marysol Foucault. Les gens n’ont plus le temps de préparer des repas, surtout les soirs de semaine. Peut-être que nous serons les derniers à garder le souvenir de mères qui faisaient chaque jour des plats maison. »

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