L’actualité

« En évitant de discuter de leurs dernières volontés avec leurs proches, les testateurs laissent de l’argent filer au fisc. »

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de ces chiffres. « L’argent et la mort sont deux sujets tabous, dit-elle. Moi-même, j’ai perdu ma mère il y a une semaine et on est complèteme­nt dans le noir. On ne sait même pas s’il y a un testament. Elle refusait de parler de ce genre de choses. »

Me Émond reçoit régulièrem­ent des appels de gens sous le choc. Certains viennent d’apprendre qu’ils ont été désignés comme liquidateu­rs testamenta­ires par un ami, alors qu’ils ne connaissen­t rien aux affaires financière­s du défunt. « C’est une tâche qui demande du temps et de l’énergie, souligne Me Émond. Le moins qu’on puisse faire, c’est de demander à la personne qu’on désigne si elle accepterai­t de nous rendre ce service. »

Les héritiers, pour leur part, sont souvent perplexes, parce qu’ils ont reçu moins que prévu... ou rien du tout. « Il n’est pas rare que des clients passent à mon cabinet pour revoir leur testament et déshériter un enfant », raconte la notaire. Parfois, ils se sont brouillés avec leur progénitur­e. Mais le plus souvent, ils ont trouvé l’amour, se sont remariés et désirent faire hériter leur nouveau conjoint, au détriment de leurs enfants devenus grands. « Les hommes qui se mettent en ménage sont plus prompts que les femmes à déshériter leurs enfants au profit de leur nouvelle flamme », constate Me Émond. La notaire demande à ses clients s’ils ont bien réfléchi. « Ils me répondent généraleme­nt que leurs enfants font leur vie, qu’ils n’ont pas besoin de leur argent. »

Les enfants ne voient pas toujours les choses du même oeil. Et quand ils n’ont pas été mis dans le coup avant le décès, le terreau est fertile pour qu’éclatent les chicanes de famille. Le paternel avait-il toute sa tête au moment où il a fait son testament en faveur de sa nouvelle petite amie ? Une nièce sortie de nulle part aurait-elle exercé une pression indue sur sa tante, profitant de la solitude de la vieille dame abandonnée dans un CHSLD ? Dans le doute, des héritiers floués n’hésitent pas à entreprend­re une procédure judiciaire. Quand les avocats s’en mêlent, le patrimoine peut vite partir en fumée.

Frédéric Barriault et Antoine Aylwin, avocats spécialisé­s en droit des succession­s au cabinet Fasken Martineau de Montréal, en voient de toutes les couleurs. Ils assurent tout faire pour inciter leurs clients à régler leurs différends à l’amiable, mais certains ne veulent rien entendre. « J’ai un dossier en ce moment où les frais d’avocats, toutes parties confondues, dépassent déjà les 100 000 dollars, et on n’est pas encore rendu au procès », dit Me Aylwin.

Détrompez-vous, ceux qui franchisse­nt le seuil de ce pres-

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