Amasser le trésor de guerre
« Une armée qui a des positions solides est assurée de remporter la victoire. »
Début janvier, le camp Péladeau doit faire face à un problème imprévu : les militants ne contribuent pas à sa campagne ! « Il est riche, et les gens pensent qu’il n’a pas besoin d’argent », raconte son organisatrice, Geneviève Décarie.
En 2013, Pierre Karl Péladeau, dont les revenus atteignaient 7,43 millions de dollars, arrivait au 53e rang des PDG les mieux payés au Canada. Le magazine Canadian
Business évaluait alors sa fortune à 930 millions de dollars. L’équipe de Péladeau doit expliquer aux militants que le candidat peut contribuer à sa propre campagne à hauteur de 500 dollars, le maximum permis. Quelques cocktails de financement dans le réseau d’affaires de Péladeau à Montréal et à Québec viendront garnir les coffres du trésor de guerre à partir de février — les circonscriptions les plus généreuses sont celles, huppées, d’Outremont, de Westmount–Saint-Louis, de Mont-Royal et de Jean-Talon.
L’avance d’Alexandre Cloutier et de Bernard Drainville en matière de financement s’effrite rapidement. Péladeau terminera la course avec 276 000 dollars, soit 200 000 de plus qu’Alexandre Cloutier.
Dans le camp de Jean-François Lisée, le problème est ailleurs : la motivation du candidat chancelle. Le mercredi 21 janvier, il revient de France, où il a passé les deux derniers mois auprès de sa femme, Sandrine, qui vient de donner naissance à leur troisième fille, Emma. Il est toutefois resté en contact étroit avec sa directrice de campagne.
Lorsque Geneviève Marsan l’accueille à l’aéroport, vers 15 h, elle lui annonce fièrement que ses 50 bénévoles ont amassé les 2 000 signatures et que les premiers 10 000 dollars exigés par le parti sont en banque. « On est prêt ! » dit-elle. La réponse la laisse sans voix : « Maintenant qu’on peut se présenter, on fait quoi ? » lance Lisée.
« J’étais abasourdie, confie-t-elle. Jamais il n’avait évoqué un possible retrait de la course, pas une seule fois. »
Elle tente de le dissuader, explique que les vents forts de l’automne s’adoucissent. « Les militants étaient plus réceptifs à notre message, notamment sur l’environnement », dit-elle. Mais le candidat n’a pas ce sentiment. Un ressort s’est cassé en lui. « Il avait l’impression d’avoir le rôle du méchant de service pour le reste de la course et il ne voulait pas », dit Geneviève Marsan.