GOÛTEZ LA HONGRIE !
Il y a trois siècles, le vin le plus précieux du monde n’était ni bourguignon ni bordelais. C’était plutôt le tokaji aszú, un vin liquoreux produit dans un petit village du nord-est de la Hongrie, qui faisait les délices de Louis XIV. Plus tard, à l’est du rideau de fer, le tokaji est devenu communiste. Vinifié de façon industrielle et à gros volume, ce vin de légende n’était plus que l’ombre de lui-même.
Des années d’obscurantisme avaient dégradé la qualité du vin, mais le terroir et le cépage local furmint avaient conservé toute leur singularité. Ne manquait plus que de l’argent pour restructurer les vignobles et remettre les chais en bon état. C’est dans ce contexte que les autorités hongroises ont instauré un programme de privatisation dès la fin du régime communiste, en 1990. Une occasion en or qu’ont vite saisie une poignée d’investisseurs d’Europe occidentale, dont l’écrivain britannique Hugh Johnson, qui a alors mis la main sur quelques-unes des parcelles les plus réputées de Tokaj.
Ce programme a fini par être abandonné et les investissements étrangers dans les vignobles ne sont plus autorisés depuis près de 20 ans. Cependant, la revitalisation se poursuit et on voit éclore de nouveaux domaines d’envergure. La tendance s’observe de manière plus manifeste à Tokaj, selon John Szabo, critique de vin et Master Sommelier torontois d’origine hongroise, mais aussi dans d’autres régions productrices, comme Eger, où il a acquis des vignes dès 2003.
Confiant en l’avenir viticole du pays de ses ancêtres, Szabo a été séduit par le prix encore relativement abordable des terres, ainsi que par le climat continental frais de la région, la richesse historique du lieu et la présence d’un cépage indigène de qualité, le kékfrankos. « Les vins sont déjà très bons, mais je suis convaincu que ces terroirs n’ont pas encore atteint leur plein potentiel. Et quelle belle occasion de prendre part à la renaissance d’une grande région viticole ! »