L’actualité

Du pain sur la planche

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La première chose que Sophie Brochu,

PDG d’Énergir, a faite en apprenant qu’elle figurait dans le palmarès de L’actualité, c’est de « googler » la définition du mot « influence ». (Réponse : action exercée sur quelqu’un ou quelque chose.) Parce qu’elle n’était pas sûre d’avoir sa place dans un tel classement.

« J’ai de l’influence », convient l’économiste de 55 ans. Sauf que cela l’« embête » de se retrouver sur cette liste, qui, à ses yeux, est surtout déterminée par l’exposition médiatique. « Il y a plein de gens qui n’ont pas les projecteur­s braqués sur eux, mais qui ont une grande influence sur le mieuxêtre de la société. » Elle pense aux scientifiq­ues, notamment, et au personnel du réseau de la santé.

De la fausse modestie ? Venant de cette patronne pas comme les autres, on peut croire que non. Elle dit haut et fort que le système capitalist­e, tel qu’il est présenteme­nt, « s’en va dans un mur ». Elle remet en question la nécessité de maximiser les profits. Elle s’insurge contre les iniquités sociales, jugeant « inacceptab­le que le code postal ait plus d’influence que le code génétique » sur l’avenir des gens. Et elle rêve d’une société où l’on consommera moins, y compris de ce que son entreprise vend : du gaz naturel.

En raison de ses prises de position fréquentes, beaucoup lui prêtent des ambitions politiques, ce qu’elle nie. « Je n’aurai jamais la patience nécessaire pour faire de la politique. » Autre signe que la quête de pouvoir et d’influence n’est pas son principal facteur de motivation : elle a décliné, en 2015, le poste de PDG d’HydroQuébe­c. « Je ne regrette aucunement cette décision. C’est une organisati­on extraordin­aire, mais mon défi à Énergir me sied. »

Seulement 29 femmes se retrouvent dans le palmarès de L’actualité, un chiffre qui n’étonne pas Sophie Brochu. « Je n’en tombe pas en bas de ma chaise. Ça montre qu’on a encore beaucoup de boulot à accomplir. » Et la dirigeante ne s’exclut pas dans ce « on ».

Récemment, elle a ainsi compris qu’elle avait encore des préjugés sexistes. « Quand un homme me parlait de salaire, je m’attendais à ça. Mais quand c’était une femme, ça me surprenait. Je me suis rendu compte que, dans mon inconscien­t, l’homme est un pourvoyeur. »

Pour l’aider à détecter et effacer les préjugés — les siens comme ceux d’Énergir —, Sophie Brochu s’est entourée de femmes et d’hommes sensibles à l’importance de la diversité. « Je vois la différence. Les gens sont plus nuancés, moins caricatura­ux. » Tous s’influencen­t pour faire ressortir le meilleur d’euxmêmes. (MarcAndré Sabourin)

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