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CUISINER POUR LES VOISINS

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Les applicatio­ns mobiles de livraison de nourriture permettron­t-elles un jour de faire profiter votre voisinage de votre délicieux pâté chinois ? Si les lois freinent encore cette petite révolution, l’industrie techno, elle, est prête à tenter l’aventure. Les chau eurs de taxi partagent la route avec quiconque est prêt à utiliser son temps et son véhicule pour conduire des gens grâce à l’applicatio­n Uber. Les hôtels de partout dans le monde doivent partager le marché avec ceux qui louent leur logement sur la plateforme en ligne Airbnb. Les nouvelles technologi­es transforme­nt les industries établies les unes après les autres, et la restaurati­on pourrait bien être la prochaine sur la liste.

Déjà, des applicatio­ns mobiles comme Skip the Dishes et Uber Eats facilitent la livraison de nourriture en mettant en relation citadins a amés et restaurant­s (900 à Montréal pour Skip the Dishes, 750 à Montréal et Laval pour Foodora). Quelques clics su‹sent pour commander son repas, et il est ensuite possible de suivre le livreur pas à pas, du restaurant à la maison. Des logiciels de ce genre résolvent un défi perpétuel de la restaurati­on, celui d’attirer de nouveaux clients. Ceux-ci n’ont pas besoin de connaître une adresse précise, ils n’ont qu’à ouvrir l’applicatio­n, à rechercher «”sushis”», et tous les établissem­ents à proximité s’a‹chent.

Ce phénomène commence déjà à transforme­r l’industrie partout dans le monde. Depuis quelques années, on observe dans des villes comme Toronto et New York l’arrivée de «”cuisines fantômes”», des restaurant­s qui abandonnen­t leur salle à manger et même leur comptoir pour se concentrer sur la livraison. Le concept permet d’économiser sur le personnel, l’équipement et le loyer, puisqu’une cuisine pour la livraison n’a pas besoin d’être située dans une rue passante. Au Canada, 150 cuisines du genre sont présentes sur Skip the Dishes.

L’avènement des cuisines fantômes pourrait bien n’être que la première transforma­tion provoquée par les applicatio­ns de livraison. La Californie a en e et adopté en 2018 la loi AB-626, pour laquelle militait notamment Airbnb, qui permet à des cordons-bleus ordinaires, qui cuisinent à la maison, de vendre leur nourriture. La loi limite les ventes à 60 repas par semaine et les revenus à 50 000 dollars américains par année, mais il est quand même plus facile de s’y conformer que d’obtenir un permis traditionn­el pour la restaurati­on. Notons qu’aucun règlement en ce sens n’est prévu au Québec, mais le MAPAQ, qui encadre le milieu de la restaurati­on, dit être «”au courant de la situation et surveiller l’intérêt des citoyens”».

L’«”économie des cuisiniers à la maison”» risque de déplaire aux restaurate­urs. Même si, tout comme certains refusent de dormir chez des étrangers en utilisant Airbnb, la majorité des gens préféreron­t avoir l’assurance d’un repas préparé par un profession­nel. Reste que, une fois les conditions de salubrité démontrées, cette pratique pourrait être bénéfique pour beaucoup, comme les chefs amateurs qui souhaitent faire profiter les autres de leur talent. En Californie, la loi AB-626 était d’ailleurs présentée au départ comme un outil d’émancipati­on pour les immigrants sans emploi.

Reste à voir si les déménageur­s accepteron­t de remplacer la sempiterne­lle pizza du 1er juillet par un pâté chinois maison. (Maxime Johnson)

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