RECHERCHONS : LEADERSHIP, ÉCOUTE ET RECONNAISSANCE
Un travailleur québécois sur sept estime que son patron n’est pas à la hauteur de ses attentes, révèle un sondage SOM-L’actualité mené auprès de 850 travailleurs québécois en mars dernier.
«C’est non négligeable… mais je m’attendais à pire!» commente Julie Fortin, coprésidente de la maison de recherche SOM.
Si la proportion de travailleurs mécontents de leur patron n’est pas si élevée, c’est peut-être en raison d’un marché du travail à l’avantage des employés. Pourquoi endurer un supérieur inadéquat si on peut trouver facilement un autre emploi?
Les travailleurs du secteur privé sont plus nombreux (42 % d’entre eux) à avoir déjà quitté un boulot pour cette raison que ceux du public (31 %). «Je ne ferais pas le pari que c’est parce que le secteur public a de meilleurs patrons, dit Julie Fortin. C’est plutôt parce qu’il est plus coûteux de quitter un poste dans le public, considérant la sécurité d’emploi et les avantages qui y sont rattachés.»
Les fonctionnaires sont d’ailleurs nombreux à sourir d’un manque de reconnaissance, note Christian Daigle, président général du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec. «Noter les bons coups, féliciter, certains gestionnaires le font, mais ce n’est pas dans la culture organisationnelle», dit-il.
Bien qu’une majorité de travailleurs québécois se disent généralement satisfaits de leur supérieur immédiat, cela ne les empêche pas d’avoir des insatisfactions à son égard. Principales lacunes observées: manque de leadership et compétences insu¡santes en ressources humaines. Pas moins de un travailleur sur quatre se plaint de l’un ou de l’autre.
Une proportion beaucoup plus faible d’employés (un sur sept) reprochent à leur supérieur immédiat un manque de compétences techniques dans leur propre domaine d’activité, ce qui semble renforcer la thèse selon laquelle de bons employés sont souvent promus cadres… sans pour autant avoir acquis les compétences nécessaires en gestion ou en ressources humaines.
Les compétences techniques ont leur importance, surtout au premier niveau hiérarchique de la direction, note Alain Gosselin, professeur au Département de gestion des ressources humaines à HEC Montréal. «Pour gérer un projet avec des ingénieurs, par exemple, il faut quelqu’un qui a déjà fait cela et qui le maîtrise bien. Sinon, cette personne n’aura pas la crédibilité nécessaire auprès de son équipe.» Pour la haute direction, cependant, il est plus important d’avoir de bonnes aptitudes en gestion et de la vision que des compétences techniques, souligne le professeur.
Ce coup de sonde confirme plusieurs observations faites par la maison de recherche SOM lors de la création d’un nouvel outil diagnostique pour évaluer les organisations, l’indice du quotient d’implication (Qi) organisationnel.
Cet indice, conçu en collaboration avec la sociétéconseil en gestion Coe¡cience, évalue notamment la capacité des entreprises de favoriser l’engagement de leurs employés.
SOM a interrogé plus de 1 000 travailleurs québécois à propos de leur milieu de travail, de façon à pouvoir établir une mesure étalon et ainsi aider les entreprises à se situer par rapport aux autres organisations québécoises.
Près du tiers des travailleurs trouvent que les dirigeants de leur organisation manquent de crédibilité. Ils estiment aussi que la direction manque d’écoute: le tiers des organisations n’ont pas de mécanisme pour recueillir les idées du personnel. Pis, 16 % des répondants ne tirent aucune fierté à travailler pour leur employeur.
Par ailleurs, la très grande majorité (88 %) des travailleurs disent entretenir des relations amicales avec leur supérieur immédiat, mais une forte proportion semblent ne pas se sentir appréciés à leur juste valeur; 39 % des répondants disent que leur patron consulte peu son équipe avant de prendre des décisions, 38 % jugent que les bons coups ne sont pas reconnus et 34 % trouvent que leur supérieur ne fait pas appel à la créativité de l’équipe.
«Autrement dit, le boss est “ben fin”, mais il pourrait faire mieux en matière de gestion des ressources humaines», résume la coprésidente de SOM.