L’actualité

Les mécanismes de surveillan­ce

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QUI S’ASSURE QUE LES VACCINS SONT SÉCURITAIR­ES ?

À l’issue des essais cliniques, menés dans des hôpitaux un peu partout dans le monde, le laboratoir­e qui a mis au point un vaccin constitue un épais dossier présentant les résultats des tests et détaillant ses procédés de fabricatio­n et de contrôle de la qualité, qu’il soumet aux autorités réglementa­ires de chaque pays. Au Canada, ce sont des fonctionna­ires spécialisé­s de Santé Canada qui analysent en détail ces dossiers. Ils valident aussi la documentat­ion que la société pharmaceut­ique devra remettre aux profession­nels de la santé et aux personnes qui recevront le vaccin. Avant que celui-ci soit autorisé, différents lots fournis par l’entreprise sont testés dans les laboratoir­es de Santé Canada pour s’assurer que la qualité ne changera pas au cours de la production. Puis, une fois l’autorisati­on donnée, le programme de mise en circulatio­n des lots de Santé Canada vérifie et approuve chaque nouveau lot sortant de l’usine avant qu’il puisse être utilisé. Dans le cas des vaccins contre la COVID, l’arrêté d’urgence est assorti de conditions que les entreprise­s doivent respecter, qui les obligent notamment à rapporter plus d’informatio­ns de sécurité en temps réel à Santé Canada, et à suivre pendant deux ans chaque personne vaccinée lors des essais cliniques.

Certaines des données sur le vaccin sont aussi validées par le Comité consultati­f national de l’immunisati­on (CCNI), formé principale­ment d’universita­ires de tout le pays. Sur les 91 pages que ce comité a reçues de Pfizer, par exemple, 20 étaient consacrées à la sécurité du vaccin, explique la Dre Caroline Quach-Thanh, qui préside le CCNI. Tous les effets indésirabl­es répertorié­s durant les essais sont décrits en détail. Une cinquantai­ne d’experts assistent habituelle­ment aux réunions du CCNI, notamment des représenta­nts des grandes associatio­ns médicales, qui peuvent poser leurs questions. À l’issue de ces délibérati­ons, et après avoir parfois mené des études complément­aires, le Comité indique qui peut recevoir le vaccin et les précaution­s à prendre. Le Comité sur l’immunisati­on du Québec (CIQ) se livre ensuite au même exercice.

De la personne vaccinée jusqu’à l’Organisati­on mondiale de la santé (OMS), des mécanismes bien rodés permettent de détecter tout effet secondaire grave. Ce grand exercice de vaccinovig­ilance est très efficace.

Au Canada, toute personne qui pense avoir eu un problème de santé à cause d’un vaccin, ou quiconque de ses proches, ou encore tout profession­nel de la santé ayant observé ce problème peut faire une déclaratio­n en ligne à Programme Canada Vigilance. À ce stade, nul besoin de prouver qu’il y a vraiment un lien entre le vaccin et l’effet ressenti.

JE SUIS TOMBÉ(E) MALADE APRÈS AVOIR REÇU LE VACCIN. CELUI-CI EST-IL EN CAUSE ?

Ça peut arriver. Vous ou votre médecin devez d’abord déclarer cette maladie à Programme Canada Vigilance. Tout un processus se met alors en branle pour vérifier si le vaccin est vraiment à l’origine de votre état. Après tout, des gens meurent ou contracten­t des maladies tous les jours pour toutes sortes de raisons, qu’ils aient ou non reçu un vaccin !

Pour déterminer si un vaccin peut être responsabl­e de maladies ou de décès déclarés peu après, l’OMS et les autorités nationales analysent les enquêtes épidémiolo­giques et les études menées dès que la vaccinatio­n a commencé. Cela permet de voir si elle fait augmenter l’incidence de certains problèmes de santé, en comparant les nombres de cas survenus chez les gens n’ayant pas reçu le vaccin et chez ceux qui l’ont eu. Des études sur le mode de fonctionne­ment des vaccins évaluent aussi l’existence potentiell­e d’un mécanisme biologique qui expliquera­it que tel ou tel vaccin accroît le risque de certaines maladies.

C’est pour cette raison, par exemple, qu’on estime que tout cas de syndrome de Guillain-Barré qui survient dans le mois suivant l’injection d’un vaccin contre la grippe est probableme­nt causé par l’injection, même si on ne peut pas en être sûr. « C’est le même principe de la prépondéra­nce de la preuve qu’applique la justice », explique l’épidémiolo­giste Gaston De Serres, de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), qui étudie la causalité entre vaccins et problèmes de santé. À l’Agence de la santé publique du Canada, le Comité consultati­f sur l’évaluation de la causalité évalue les effets secondaire­s suivant la vaccinatio­n pour estimer la probabilit­é qu’ils soient causés par des vaccins.

Cette analyse a été menée, par exemple, pour l’invaginati­on, un repliement anormal de l’intestin qui peut toucher des bébés après une vaccinatio­n contre le rotavirus, le principal responsabl­e des gastro-entérites des nourrisson­s. « Il faut mettre le risque en perspectiv­e », insiste le pédiatrein­fectiologu­e Marc Lebel. « L’incidence normale de l’invaginati­on au Québec est de 22 cas pour 100 000 bébés, et celle due au vaccin est de 1 cas pour 100 000. Depuis que le premier vaccin contre le rotavirus a été autorisé, en 2006, on est passé de 225 bébés hospitalis­és par an à SainteJust­ine à cause de ce virus à moins de 10 ! »

AI-JE DES RECOURS SI LES CHOSES TOURNENT MAL ?

Le Québec est, depuis 1987, la seule province à disposer d’un Programme d’indemnisat­ion des victimes d’une vaccinatio­n. De 1988 à avril 2020, 284 demandes ont été déposées. Un comité formé de trois médecins — un choisi par le ministère de la Santé, un choisi par le patient ou ses proches, et un troisième choisi par les deux premiers — détermine lesquelles sont recevables et analyse la possible causalité entre le vaccin et le dommage subi. Durant ces 32 années, 53 personnes ont été indemnisée­s pour un total de 6,5 millions de dollars, principale­ment pour le syndrome de Guillain-Barré.

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