L’actualité

Bye-bye masque ?

- CLAUDINE ST-GERMAIN

En abordant avec notre chef de bureau science et santé, Valérie Borde, son grand dossier « Vivre avec le virus», j’avais une question en tête: quand arrêtera-t-on de porter un masque ?

Pas que la chose m’embête outre mesure. Je serais mal placée pour me plaindre, je le porte à peine une heure par jour, alors que les enfants et les travailleu­rs de multiples secteurs l’endurent à longueur de journée. Oui, c’est achalant, mais les bénéfices sur le plan de la santé publique dépassent largement les désagrémen­ts.

C’est plutôt que la disparitio­n du masque m’apparaît comme le symbole de la fin de la pandémie. À mes yeux, c’est lorsque j’expédierai à la poubelle notre collection familiale de couvrevisa­ges que je pourrai vraiment me dire : ça y est, cette galère est terminée !

Hélas, Valérie n’est pas devin. Les scientifiq­ues non plus. N’espérez pas trouver la date où vous pourrez allumer un grand feu de joie pour y brûler vos masques, car la réponse à ma question est : on ne sait pas.

Il y a des pistes, des hypothèses, des scénarios. Et une certitude : la pandémie va finir par finir, comme les autres avant elle. Mais quand et de quelle façon précisémen­t, personne ne peut le prédire.

Je ne sais pas pour vous, mais moi, ignorer pendant combien de temps encore je vais devoir vivre dans l’incertitud­e me donne des bouffées d’angoisse. Je les calme en cherchant à mieux comprendre où nous en sommes à ce stade-ci de la pandémie, et ce sur quoi nous avons prise. C’est-à-dire nous-mêmes.

D’abord, il faut cesser d’attendre la grande fête dans les rues, comme il y en a eu tant à l’annonce de la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Il n’y aura pas de démarcatio­n claire entre les étapes « la COVID paralyse nos vies », « le virus est toujours présent, mais gérable » et « on n’en parle plus ». Il serait bénéfique d’avoir ces marqueurs temporels pour passer à autre chose. Mais comme ils n’existeront pas, on doit plutôt se préparer à s’adapter graduellem­ent à une nouvelle réalité.

Ensuite, il faut réfléchir, individuel­lement et collective­ment, à notre relation au risque. Car vivre avec le virus, c’est évaluer à quel niveau on trouve tolérable qu’il cause des morts, des hospitalis­ations et des cas de syndrome postCOVID. On le fait déjà avec plein d’autres saloperies microscopi­ques : on tient pour acquis que quelques milliers de personnes succombero­nt à l’influenza chaque hiver au Canada ; on voyage dans des pays où il est possible de choper la malaria, l’hépatite A ou la dengue ; on mange des légumes frais même s’il existe un risque (infime) qu’ils soient contaminés à l’E. coli.

Une tolérance zéro à ces risques signifiera­it de consigner tout le monde à domicile. À l’inverse, une tolérance extrême serait synonyme d’absence de compassion envers ceux qui sont plus susceptibl­es de souffrir de complicati­ons, ainsi qu’à l’égard des malchanceu­x qui tireraient le mauvais numéro au jeu des statistiqu­es. Le point de rencontre, que s’efforcent de trouver les gouverneme­nts du monde et qui diffère selon les réalités et sensibilit­és régionales, est évidemment délicat à déterminer. Il s’agit en gros de ne pas virer fou avec les risques que posent ces maladies, tout en mettant en place les mécanismes nécessaire­s pour les endiguer : inspecter les aliments ; suivre les virus et leurs variants à la trace ; encourager la vaccinatio­n quand elle est possible ; couper la voie à un virus coriace avec des mesures sanitaires lorsque ça s’impose.

Un jour, le SRAS-CoV-2 deviendra un virus comme les autres. On aura peut-être alors acquis l’habitude de porter un couvre-visage quand on est malade pour éviter de contaminer nos semblables, comme c’est le cas dans certains pays asiatiques.

Aussi bien me faire à l’idée : des masques, je risque d’en racheter plutôt que d’en jeter. Et ce ne sera peut-être pas une si mauvaise chose, finalement.

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