Le rôle des médias de proximité lors de la crise du verglas
Lors de la crise du verglas, la population d’Argenteuil pouvait compter sur ses médias locaux pour se sentir moins isolés.
Lorsqu’on est privé d’électricité pendant une aussi longue période que celle de la crise du verglas de 1998, les médias locaux jouent un rôle de premier plan auprès de la population qu’ils desservent. Tous les jours, l’équipe de Radio-Fusion (CJLA 104,9 et 102,1) prenait les ondes pour informer la population d’Argenteuil et de l’Est ontarien. Tous les jours, les journalistes de L’Argenteuil et La Tribune-Express parcourait le territoire et amassait de l’information pertinente à transmettre.
Privée d’électricité dans les premiers jours de la crise, la station de radio était alimen- La Une de la Tribune-Express du 10 janvier 1998.
tée par une génératrice prêtée par la Ville de Lachute, tandis qu’une génératrice de l’entreprise permettait de faire fonctionner l’antenne émettrice. Chaque jour, divers intervenants, dont le maire de Lachute et un représentant d’Hydro-Québec, venaient rendre compte de l’état de la situation en
direct.
Martin Lamoureux, qui était alors journaliste animateur, se souvient très bien de ces journées tout aussi intenses que gratifiantes. La radio ne pouvait pas mieux se définir comme médias de proximité en cette période de crise, a-t-il évoqué en entrevue téléphonique.
Oui, la radio permettait de transmettre de l’information sur l’avancement des travaux, communiquer des règles de sécurité et partager des conseils. Mais en ces moments où on en revient aux besoins de base, des renseignements de toutes sortes étaient partagés. « À un moment donné, c’était rendu qu’on donnait le décompte des piles et des chandelles disponibles dans les commerces du coin. On ne pouvait pas être plus dans le service de proximité », a-t-il lancé.
Cette proximité se trouvait également dans les témoignages des citoyens sur les ondes. « On a commencé à faire des lignes ouvertes et c’est de là que viennent mes plus beaux souvenirs, a-t-il exprimé. On a entendu toutes sortes de belles histoires. »
Parmi celles-ci, il raconte qu’une mère s’inquiétait pour sa fille qui devait recevoir des traitements d’hémodialyse à la maison, mais sans électricité, la machine ne pouvait pas fonctionner. Un homme de L’Orignal, qui avait entendu l’histoire à la radio, s’est alors empressé d’appeler pour offrir une génératrice à cette famille dans le besoin.
Sur le plan professionnel, Martin Lamoureux estime que ses collègues et lui ont été chanceux de vivre un évènement comme celui-là. En parallèle, il juge que la région était chanceuse de pouvoir compter sur « un média local fort et présent sur le terrain ».
Du côté des hebdomadaires locaux, le travail était différent. Avec une publication par semaine pour chacun des deux journaux, la nouvelle n’était pas instantanée. Les journalistes pouvaient parcourir la région, recueillir les informations, les analyser pour ensuite les transmettre. Richard Leduc était journaliste à l’époque pour L’Argenteuil et La Tribune-Express. Comme tout le monde, il a vécu son premier choc à son réveil le mardi matin, a-t-il raconté lui aussi en entrevue téléphonique. Comme il n’y avait pas d’électricité au bureau du journal, il s’est promené sur le territoire.
Comme anecdote, il rapporte qu’il n’y avait, à ce moment-là, qu’une seule stationservice ouverte grâce à une génératrice, mais que seuls les véhicules d’urgence pouvaient s’y ravitailler. Sinon, tout était fermé dans le centre-ville de Lachute.
« En une dizaine d’années comme journaliste, c’est sans doute le plus gros événement que j’ai eu à couvrir », a-t-il reconnu. Il a eu à rapporter des drames, comme des incendies jetant des familles à la rue. Mais il a surtout été témoin de gestes d’entraide. « J’ai aperçu Daniel Mayer (le maire de Lachute à l’époque), sur le terrain en train de couper et de ramasser des branches », a-t-il relaté à titre d’exemple.
En tout temps, les médias locaux jouent un rôle important dans une communauté, mais c’est souvent dans des moments de crise, comme celle du verglas de janvier 1998, qu’ils deviennent indispensables.
« À un moment donné, c’était rendu qu’on donnait le décompte des piles et des chandelles disponibles dans les commerces du coin. »