L'Argenteuil

UNE POURSUITE DISPROPORT­IONNÉE, SELON UN PROFESSEUR DE DROIT

Canada Carbon a officielle­ment déposé une demande de révision judiciaire et de jugement déclaratoi­re devant la Cour supérieure contre Grenville-sur-la-Rouge.

- MICHEL LAMY michel.lamy@eap.on.ca

Le vendredi 2 mars 2018, Grenville-sur-laRouge et l’ensemble de ses conseiller­s ont été avisés qu’une action en dommagesin­térêts de 96 M$ sera signifiée et déposée devant la Cour supérieure. « Notre devoir et nos obligation­s légales, de déclarer le maire Tom Arnold dans un communiqué, sont de protéger les intérêts et droits de nos citoyens. Nous comptons utiliser tous les leviers à notre dispositio­n pour assumer nos responsabi­lités. Des démarches auprès de différents paliers gouverneme­ntaux sont déjà en marche. » Le parti politique Alliance GSLR, avec Tom Arnold comme chef de file, avait comme plateforme le rejet du Projet Miller. Lors des élections municipale­s en novembre dernier, tous les candidats de l’équipe ont été élus à grande majorité, dont M. Arnold en tant que maire. Le 12 décembre 2017, le nouveau conseil a passé une résolution pour un avis de non-conformité au règlement de zonage de la municipali­té.

POURSUITE DISPROPORT­IONNÉE

« La poursuite de 96 M$ me semble, à priori, punitive et disproport­ionnée par rapport aux enjeux précis de cette affaire », a déclaré David Robitaille, professeur titulaire à la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa, lors d’un entretien avec notre journal. « Canada Carbon aurait normalemen­t dû demander à la Cour de déclarer la résolution illégale et faire valoir ses droits acquis. C’est là le coeur du litige et une telle poursuite n’aurait pris que quelques jours à débattre. La compagnie minière aurait alors tenté de prouver que son projet respectait l’ancienne réglementa­tion et qu’elle avait reçu toutes les approbatio­ns requises. » « Le fardeau de la preuve est très élevé en droit municipal : l’entreprise doit prouver la mauvaise foi grave des élus ou leur exercice fondamenta­lement déréglé du pouvoir. Cela ne semble pas le cas pour Grenville-sur-la-Rouge. » Me Robitaille déduit aussi que la poursuite démontre une attaque à la démocratie locale. Il précise que les tribunaux ont clairement reconnu que les conseils municipaux peuvent changer d’avis par rapport à des projets, en particulie­r lorsque la compositio­n des conseils change à la suite d’élections. « Les tribunaux ont aussi souligné le rôle important des autorités locales pour protéger l’environnem­ent et l’intérêt collectif. Dans cette affaire, les citoyens se sont exprimés lors d’une élection en portant au conseil des conseiller­s qui s’opposaient au projet. C’est ce qu’attaque la compagnie. Avec les changement­s climatique­s, la prise de conscience collective du besoin de protéger l’environnem­ent et la baisse d’acceptabil­ité sociale pour des projets de ce genre, cette tendance aux poursuites pour des sommes astronomiq­ues contre municipali­tés et élus pourrait s’accentuer. Cela a pour résultat de créer un climat de peur chez les élus municipaux qui doivent gérer les taxes des citoyens. Qui donc va vouloir se présenter comme conseiller si, une fois élu, il est passible d’être poursuivi ? », a conclu Me Robitaille.

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