Le Magazine de l'Auto Ancienne
FORD FAIRLANE SKYLINER RÉTRACTABLE 1957
Fair Lane : c’était une belle propriété sur un immense terrain le long de la Rouge River, à Dearborn, dans le Michigan, où habitaient Henry et Clara Ford. Son nom provient d’un lieu en Irlande, dans le comté de Cork, où était né un grand-parent adoptif de Ford. Ce nom allait aussi figurer sur des millions de véhicules de la marque, de 1955 à 1970 : les Ford Fairlane transporteront des millions de passagers, qui ne savaient probablement même pas où habitait M. Ford.
Fair Lane était une magnifique propriété. Le terrain mesurait plus de 5 kilomètres carrés. Construite en 1909 par les architectes Joseph N. French et William H. Van Tine, elle dispose même d’une centrale électrique. Classée aux monuments historiques américains depuis 1966, elle est aujourd’hui un musée (bâtiment principal, garage, centrale électrique). Le nom de cette somptueuse propriété allait être repris pour désigner certains modèles de la marque Ford, de 1955 à 1970; au début ce furent les modèles les plus luxueux de la marque en lien avec le standing de la propriété, puis le nom allait descendre en gamme, pour finir comme sous-série d’un autre modèle...
Les débuts en 1954, la gamme Ford est présentée en plusieurs modèles : le modèle d’appel Mainline (que l’on peut traduire par « ligne principale »), la Customline et, perchée au sommet de la gamme, la Crestline (traduisez par la « ligne de crête »). En cette décennie où le style allait grandement évoluer vers la déraison (pour notre plus grand bonheur aujourd’hui), les gammes étaient revues sur un rythme soutenu, environ tous les 2 ou 3 ans, avec des variations annuelles sur l’habillement extérieur et intérieur. « Chers consommateurs, votre auto d’un an est déjà vieille, merci de racheter la nouvelle qui vient de sortir et qui est évidemment bien meilleure! ». La Crestline, qui avait été lancée en 1952 pour compléter la gamme, est mise au rebus fin 1954 et est remplacée par la toute nouvelle Fairlane. La marque en profite pour changer de génération, et les Ford arborent pour le nouveau millésime de belles carrosseries bien dans l’air du temps, avec chromes, couleurs deux tons, V8 et kit Continental pour qui en voudrait. Les nouvelles Ford suivent la tendance et adoptent un pare-brise panoramique, proposent la climatisation « Select Aire », les ceintures de sécurité, et diverses carrosseries : berlines, coupés sans montant, cabriolets... La Fairlane propose aussi une carrosserie spéciale dénommée Crown Victoria : il s’agit d’un coupé avec une arche chromée qui ceinture le toit, la partie avant du toit en tôle pouvant être remplacée par un bloc en Plexiglass (toit « Skyliner »). Sous le capot, on retrouve des
V8, mais aussi un 6-cylindres, car — ne l’oublions pas — , Ford est une marque populaire. D’ailleurs, bon nombre d’autos furent équipées de ce moteur économique, de la boîte manuelle et de flanc noir, loin du style « Fifties » tel qu’on le perçoit aujourd’hui, 60 ans après. Cette année-là, le consommateur américain a un choix considérable, plein de nouveautés et une quantité impressionnante de modèles. Il faut en effet se rappeler que 1955 voit la quasi-totalité des constructeurs renouveler leurs modèles, introduire de nouvelles motorisations. Tous les acteurs (les 3 grands et les indépendants) sont encore présents, et se livrent une lutte sans merci. Le modèle de 1956 marquera ensuite une « pause » dans ce cycle, et les Ford sont pratiquement inchangées. La Fairlane reçoit, comme chez d’autres concurrents d’ailleurs, une carrosserie berline sans montant à 4 portes, qui sera introduite en milieu d’année modèle, afin de donner le change à la Chevrolet Bel Air. Pour Ford, la vraie grande nouveauté cette année-là sera l’adoption du système 12 volts. La plus chère de toutes... Ford, avec son chef styliste George W. Walker, a créé et appliqué une série de principes de conception innovants aux Ford de cette époque, ce qui a renforcé la réputation de l'entreprise en tant que leader dans son domaine.
L'année 1957 arrive, et les constructeurs, dans leur concurrence exacerbée, renouvellent toutes leurs gammes. Les Ford reçoivent de nouvelles robes toutes neuves, et la Fairlane reste le modèle le plus luxueux de la marque, déclinée en deux séries : Fairlane, et Fairlane 500. La gamme est légèrement remaniée, donc, et la Fairlane Crown Victoria disparaît. On voit néanmoins arriver une toute nouvelle Fairlane 500 Skyliner, un coupé cabriolet au toit rigide, qui vient compléter la gamme des cabriolets Fairlane 500 Sunliner. Ford conserve par ailleurs la dénomination Victoria pour les modèles sans montant. Sous le capot, toutes sauf la nouvelle Skyliner reçoivent le 6-cylindres en série. En option, comme depuis 1956, le client Ford avait le choix entre trois motorisations V8 : 272 pc, 292 pc et 312 pc (ces deux dernières étant disponibles aussi sur la Thunderbird).
Cette Fairlane était un véhicule remarquable avec ses modèles à 2 et 4 portes à « pilier mince », tandis que la Sunliner décapotable et le toit rétractable Skyliner étaient considérés comme le summum de la série. Il y avait 37 combinaisons de couleurs et de rembourrages.
Ford a poussé les limites de l'ingénierie et du style encore plus loin avec le premier toit rigide rétractable produit en série, le Fairlane 500 Skyliner. Après avoir appuyé sur un bouton, le toit rigide Skyliner se déverrouillait du cadre du pare-brise, puis se repliait proprement
et se glissait sous un long couvercle de coffre plat se soulevant tout seul pour faire place au toit. En 25 secondes environ, le conducteur du Skyliner pouvait littéralement transformer son coupé en un véritable cabriolet! Affichée au prix de 2 942 $ en 1957, la Skyliner « rétractable » est la plus chère des Ford de tous les temps, et restera le modèle le plus cher de la gamme jusqu’en 1959, sa dernière année.
Construit pendant seulement trois ans, de 1957 à 1959, ce véhicule décapotable à ouverture de toit électrique a été construit à moins de 50 000 unités. Pas besoin de vous dire que cela en fait un modèle prisé par les collectionneurs Les deux séries de Fairlane se vendent très bien, et représentent la majorité des Ford vendues cette année-là. Fort de ce succès, la gamme reste inchangée l’année suivante, les prix montent un peu, et la production plonge, récession oblige. Le style 1958 se base sur le modèle 1957, avec les habituels artifices d’habillage pour annoncer le nouveau modèle comme nouveau, alors qu’il s’agit foncièrement de la même voiture. La recette sera reconduite pour 1959, avec un lifting toutefois plus profond. Ce sera aussi l’année où la Fairlane ne sera plus le haut de gamme Ford.