Un bijou comique
Le Dîner de cons, la nouvelle pièce du Cercle Molière, cherche à faire réfléchir sur la superficialité et l’arrogance humaine, tout en faisant rire aux éclats.
«Des cons,on en connaît malheureusement tous, lance le directeur artistique du Cercle Molière et metteur en scène de sa plus récente production, Le Dîner de cons, Roland Mahé.(1) Ce sont ces êtres fatigants qui parlent sans cesse et avec ardeur de leur petit hobbyencroyantquetoutlemonde s’y intéressera, mais qui finissent par nous ennuyer à mort.or,au lieu de se laisser atterrer par les cons,francis Veber, l’auteur de notre pièce, a choisi de se marrer.»
Écrite en 1993, Le Dîner de cons, est devenu un classique de la comédie française, ainsi qu’un succès international. La pièce a été adaptée pour le cinéma, d’abord par les Français, et ensuite par les Américains ( Dinner for Schmucks).
Et adaptée par le Cercle Molière, pour un public canadien. « J’ai voulu que les références et le langage très français soient reconnaissables par les Franco-manitobains, indique son adaptateur, Christian Molgat. Dans la version originale, le con, François Pignon, est un gars des provinces qui se rend à Paris, où l’on se moque de lui. Dans cette version, Pignon est un Franco-manitobain en séjour à Montréal. Les Québécois le prennent pour un colon. »
En effet, le hobby « passionnant » de François Pignon est la fabrication de maquettes en allumettes de bois. Lorsqu’il partage sa passion avec le Montréalais Pierre Brochant, ce dernier l’invite à dîner pour rencontrer ses amis. Ce que le pauvre homme ignore, c’est qu’il a été invité pour qu’on se moque de lui.
« François Pignon n’est pas la seule victime, souligne Roland Mahé. Lors de la soirée, la bande a invité un type qui collectionne des fers à repasser. Le groupe en profite pour obtenir un délire malsain. Cette clique est d’un cynisme et d’une arrogance extraordinaires. »
« Le public rira aux éclats, je crois,tout en ayant un peu honte de sa réaction, mentionne à son tour le comédien, Christian Perron, qui campe Pierre Brochant. Certains seront peut-être choqués par la méchanceté et le snobisme du groupe. Un des grands plaisirs de jouer ce rôle est que le personnage est égocentrique et sarcastique. J’ai toujours apprécié l’ironie et la comédie acerbe. C’est un cadeau qu’on m’a offert de camper un personnage si imbu de lui-même.»
Pour le comédien Charles Leblanc, qui assume le rôle de François Pignon, le défi est de faire de Pignon un être exaspérant, mais humain. « C’est un épais sympathique, déclare-til. Il est même exaspérant, tant il est bonasse. Il veut tellement aider les autres qu’il multiplie les problèmes et les gonfle en faisant des gaffes. Ce serait facile d’en faire une caricature. Mais j’ai voulu l’humaniser afin que les gens s’identifient à lui, et viennent à comprendre que les personnes qui l’entourent sont toutes aussi connes que lui. »
Christian Perron abonde dans le même sens. « La pièce est, après tout Le Dîner de cons, au pluriel, fait-il remarquer. Et ce n’est pas pour rien. Francis Veber a créé un vrai bijou qui fait réfléchir sur la façon dont on traite les gens. »
Roland Mahé estime pour sa part que Le Dîner de cons est « un débat entre classes sociales ». « La haute bourgeoisie, dans sa superficialité, s’amuse à se moquer des ouvriers, souligne-til. Comme dans les comédies de Molière,veber cherche à corriger un mauvais comportement. Mais le dramaturge est plus malin, puisque la situation n’est pas aussi claire et nette. La classe ouvrière n’en sort pas indemne. À la toute fin de la pièce, François Pignon arrive à prendre le dessus, mais à peine. »
Avant tout, le public aura droit à des dialogues acérés et croustillants. « Le Dîner de cons est une vraie farce à la française, rappelle Roland Mahé. Tout est dans le texte. Les dialogues sont rapides, tranchants parfois. Et, comme dans un morceau de musique, les scènes ont un rythme, dans les répliques et les gestes des comédiens, qui leur sont propres. Chacune d’elles avance vers son petit crescendo hilarant. »
(1) Ledînerdecons sera présenté du 9 au 31 mars au Théâtre Cercle Molière, 340, boulevard Provencher à Saint-boniface. Renseignements : 2338053 ou à info@cerclemoliere.com.