Les perles voyageuses de Marie-Ève Fontaine
Marie-Ève Fontaine cultive son chemin vers le Nord. La jeune artiste polyvalente expose ses oeuvres de perlage inspirées des Territoires du Nord-Ouest à la Maison des artistes francophones dans le cadre de l’exposition Faits Maison.
On dirait presque des attrape-rêves. Les formes abstraites travaillées en perles minuscules sont cousues à des formes circulaires en toile, en cuir et en bois, afin de pendre d’une façon hypnotique devant les yeux du spectateur. Leur créatrice, Marie-Ève Fontaine, explique que les oeuvres sont le fruit d’un rencontre due au hasard, aux abords du Grand lac des Esclaves près de Yellowknife.
L’artiste, qui est aussi comédienne, metteure en scène et organisatrice d’évènements, raconte : « J’étais aux Territoires du Nord-Ouest pour faire un spectacle. Un soir, il y avait un festival au bord du lac. Il y avait deux dames autochtones qui montraient à qui voulait l’apprendre comment faire du perlage. J’ai brodé une ligne de billes et j’ai compris la technique. Ça n’a pas l’air de grand-chose, mais ça prend beaucoup de temps, parce qu’il faut coudre entre chaque perle. Quelque chose qui a le diamètre d’un pouce peut prendre deux heures. Mais pour moi, c’est comme une méditation. »
La Bonifacienne de 24 ans a de bons souvenirs d’un coin de pays où peu de Canadiens « du Sud » mettent les pieds. « J’ai beaucoup aimé les Territoires du Nord-Ouest. Ma mère y habite. Il y a moins de gens qui vivent là, et plus d’espaces. Les gens sont plus libres, et la vie est plus libre. On dit que si tu viens t’installer là-bas, soit tu t’enfuis de quelque chose, soit tu cours vers quelque chose. Donc il y a des gens qui ne veulent rien savoir du reste de l’humanité, mais il y a aussi plein de gens gentils et ouverts. »
« La culture des Autochtones du Nord m’intéresse beaucoup, comme les cérémonies de purification et la valeur qu’ils accordent aux rêves. Je suis en train d’apprendre à tanner mes propres peaux. Je ne suis pas autochtone moi-même. Enfin, je pense que je dois avoir des ancêtres autochtones quelque part, mais pas plus que le Manitobain moyen. En tout cas, les gens du Nord ont toujours été très ouverts à mes questions sur leur art et leurs cultures. »
Après son séjour aux Territoires du Nord-Ouest, Marie-Ève Fontaine est partie en voyage en Nouvelle-Zélande. C’était plus un voyage de découverte qu’un voyage de travail, mais les formes brodées l’ont suivie. « Les pièces que j’expose ont été autour du monde. La toile sur laquelle je les ai montées, je l’ai trouvé chez un antiquaire en Nouvelle-Zélande. J’ai fait une petite exposition dans un café pendant que j’étais là-bas, et ils ont trouvé le perlage du Nord du Canada très exotique. Ils capotaient bien raides! À mon retour, j’ai mis les oeuvres dans un tiroir, jusqu’à ce qu’Éric Plamondon, le directeur de la Maison des artistes, m’invite à les exposer. »
« Traditionnellement, les Autochtones ont créé beaucoup de formes géométriques. Après la colonisation, les missionnaires les ont encouragés à faire des fleurs. Je préfère les formes géométriques. Ça donne aux gens l’occasion de voir ce qu’ils veulent dans les formes, comme on fait avec les nuages. »
« En tant qu’artiste, je suis une autodidacte. J’ai toujours besoin de trouver une nouvelle forme. J’ai fait beaucoup de photographies, de collage, de l’aquarelle. J’ai même créé des jeux de société originaux, mais ça, c’est très long. »
L’artiste multidisciplinaire porte beaucoup de chapeaux. Elle travaille comme chargée de projets au Conseil jeunesse provincial, elle est un pilier de la Ligue d’improvisation du Manitoba et elle assure la mise en scène pour une production des Chiens de soleil à l’Université de Saint-Boniface. Son prochain plan : devenir marionnettiste.
« Actuellement je fais des marionnettes de toutes sortes. Je vais travailler avec ma mère, qui est éducatrice, pour faire un atelier dans des écoles avec des marionnettes basées sur les légendes autochtones du Nord. Il y a tellement d’étapes dans la fabrication d’une marionnette. Il faut sculpter la tête, ajouter les cheveux, choisir les vêtements et bâtir le squelette. Mais c’est tellement l’fun parce que tu as l’espace pour laisser sortir toute ta créativité. »
Marie-Ève Fontaine expose ses oeuvres dans le cadre de Faits Maison, l’exposition annuelle collective de la Maison des artistes francophones (219, boulevard Provencher). L’exposition continue jusqu’au 22 décembre.