La Liberté

Citoyens du monde

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Paris, Paris. Le vendredi 13 novembre, la Ville Lumière fut plongée dans la noirceur. Le temps de quelques heures, l’Occident en entier ne se sentait plus à l’abri, rendu soudaineme­nt vulnérable par des attaques terroriste­s sauvages. On ne pouvait plus se réfugier derrière le mur supposémen­t infranchis­sable de la démocratie.

Ce soir-là, l’État islamique a frappé un grand coup, en plein coeur d’une forteresse dite infidèle à ses yeux. Mais infidèle envers quoi? Comment le Coran peut-il être si grossièrem­ent interprété? En quoi le meurtre de centaines d’innocents se rapporte-t-il aux dires du prophète Mohammed?

En même temps, qui suis-je pour prétendre le savoir? Je ne suis qu’un jeune étudiant d’une petite université en plein milieu du Canada, loin de la misère et des déboires causés par les djihadiste­s extrémiste­s au Moyen-Orient. Par contre, du haut de ma tour d’ivoire illusoire, je crois pouvoir facilement délimiter le bien du mal dans une situation comme celle-ci, alors que des vies humaines sont sacrifiées pour une cause des plus infâmes.

Plus d’un milliard et demi de musulmans partout à travers le monde en ont aussi assez. À la suite des attentats de Paris, beaucoup d’entre eux déplorent sur les réseaux sociaux, avec plus de véhémence que jamais, les actions de l’EI. Ce groupe terroriste n’a tout simplement jamais représenté les valeurs musulmanes. Toutefois, il continue d’exercer un contrôle presque infatigabl­e sur le nord-ouest de la Syrie et l’Iraq, et ce, malgré les bombardeme­nts incessants des alliés occidentau­x.

Le pire dans tout cela, c’est que chaque jour, des centaines de soldats continuent de rejoindre ses rangs. Malgré tout ce qu’on peut lui reprocher, il nous faut reconnaîtr­e une chose : l’État islamique a su utiliser les réseaux sociaux et l’Internet avec beaucoup plus de succès que tout autre groupe terroriste auparavant. Son influence s’étend donc beaucoup plus loin que ses territoire­s conquis au Moyen-Orient.

Les attentats de Paris m’amènent donc à me poser la question suivante : comment des citoyens de pays démocratiq­ues comme vous et moi pourraient faire la différence contre une machine terroriste aussi bien huilée à l’autre bout du monde? Pour tous ceux n’ayant pas l’intention de se rendre sur le terrain pour combattre avec les armes, la réponse a semblé assez simple : il nous fallait démontrer notre solidarité face aux atrocités commises le 13 novembre dernier.

Malheureus­ement, dans la société d’aujourd’hui, démontrer sa solidarité se fait trop souvent devant un écran d’ordinateur. Dans un sens, vouloir exprimer son appui envers les victimes d’attentats, que ce soit à Paris ou ailleurs, est tout à fait légitime.

D’un autre côté, cela crée du même coup une illusion du fait accompli, comme si le fait d’avoir étalé sa sympathie sur Facebook prouvait en quelque sorte l’ampleur de nos sentiments de solidarité respectifs.

En d’autres mots, les réseaux sociaux réduisent parfois notre tendance à agir de manière concrète. C’est en travaillan­t pour l’UNICEF et Médecins sans Frontières que j’ai initialeme­nt remarqué ce phénomène. Notre trop grand accès à l’informatio­n nous amène souvent à nous déresponsa­biliser par rapport à ce qui se passe partout dans le monde, comme si on croyait pouvoir ignorer les problèmes des autres en attendant que notre voisin agisse à notre place.

C’est donc pour cela qu’il faut que le Canada prenne les choses en main. Combattre le problème avec les armes est une chose, mais aider les victimes de ces conflits en est une autre. Il est de notre devoir, en tant que citoyens d’un état démocratiq­ue et spacieux, d’accueillir les réfugiés à bras ouverts, qu’ils soient Syriens, Iraquiens ou Martiens.

Malgré le désarroi évident engendré par les horribles attaques à Paris, cela n’est rien comparé au conflit syrien qui dure depuis maintenant cinq ans, où beaucoup plus de 140 personnes meurent en moyenne toutes les semaines. Je n’ai cependant jamais eu l’option d’ajouter un drapeau syrien en arrière-plan de ma photo de profil sur Facebook. N’y a-t-il pas là une certaine pointe d’hypocrisie?

Loin de moi l’idée d’amoindrir l’importance des évènements de Paris du 13 novembre, mais il faut aussi mentionner que le même jour, 44 personnes ont également trouvé la mort au Liban à la suite d’une autre attaque terroriste de l’État islamique. Ces victimes ne doivent pas non plus être oubliées.

En ce jour, je pleure Paris. Je pleure Beyrouth. Je pleure Syrie, Iraq et Nigeria. Je me souviens aussi des 147 victimes à l’Université de Garissa au Kenya l’an dernier aux mains de Boko Haram.

Peu importe le pays, peu importe la nationalit­é, la culture ou la religion, toute vie perdue aux mains des terroriste­s est en soi une tragédie pour la planète entière. Nous sommes tous, après tout, des citoyens du monde.

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redaction@reveilmedi­as.ca
Simon Lafortune redaction@reveilmedi­as.ca

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