La Liberté

Quand aquaponie rime avec autonomie

- Gavin BOUTROY Collaborat­ion spéciale

André Vermette a vite compris l’intérêt de manger des produits biologique­s. Mais il est allé quelques pas plus loin encore. Il a développé dans sa maison toute une serre où il cultive une grande variété de légumes. Il élève aussi des poissons grâce à la culture aquaponiqu­e.

Aquapoquoi? Gavin Boutroy raconte comment la culture aquaponiqu­e est venue enrichir la vie d’André Vermette.

Dans les rudes hivers canadiens, certains utilisent leur garage pour faire de la mécanique, d’autres l’utilisent pour travailler le bois. Quant à André Vermette, il a transformé son garage en serre aquaponiqu­e. Il fait pousser des légumes et élève des poissons tout l’hiver.

Dans une chambre du côté sud du garage, il y a des fenêtres du sol au plafond. Au milieu de la salle, apparaît un grand rectangle surélevé, comme un carré de sable, rempli de pierres. Des plantes vertes et des légumes jaunes et rouges poussent dans le lit de pierres.

À l’intérieur d’un gros cylindre métallique au fond de la pièce, nage une quarantain­e de poissons. Le tout est enserré par des tuyaux et des fils électrique­s. Il y fait plus de 40 degrés Celsius. Cette serre est la création d’André Vermette, un gérant de projet de constructi­on. De la race des pionniers, il aime expliquer les plaisirs de la culture « aquaponiqu­e ».

« L’hydroponie, c’est la technique où tu mets des nutriments artificiel­s dans l’eau avec les plantes. Avec l’aquaponie, les fertilisan­ts proviennen­t des déchets des poissons.

« Le déchet des poissons, c’est l’ammoniaque. Le tout fonctionne par gravité, sauf la dernière pompe. L’eau sale du bassin se rend au lit des plantes grâce à la gravité où les bactéries, qui sont dans les roches, convertiss­ent l’ammoniaque en nitrate et nitrite. Les plantes absorbent ces nutriments et, par ce processus, nettoient l’eau pour qu’elle puisse être recyclée et pompée dans le réservoir.

« Avec l’aquaponie, il y a l’avantage que tu peux manger les poissons à la fin du cycle. C’est totalement organique, il n’y a pas de nutriments ou de fertilisan­ts artificiel­s.

« En culture hydroponiq­ue, si tu veux augmenter le nitrate qui nourrit les plantes, tu ajoutes du nitrate. Mais on ne sait pas exactement d’où proviennen­t ces nutriments. Ça peut être des nutriments dérivés de produits chimiques ou de produits pétroliers. »

André Vermette ne s’inquiète pas de cette situation outre mesure : « Je ne vais pas attendre la prochaine étude qui dit que les produits modifiés causent le cancer. Je pense que les produits biologique­s ont été la façon de vivre pour des millions d’années, et je vais suivre cette lignée.

« En m’intéressan­t à l’aquaponie, j’ai appris beaucoup de choses. Je ne savais pas que les poissons que l’on achète dans les supermarch­és sont souvent remplis d’hormones pour convertir les femelles en mâles, afin qu’ils atteignent une plus grande taille. Depuis que je sais ça, je mange plus de produits biologique­s. »

En septembre 2014, l’horticulte­ur amateur a décidé qu’il allait construire un système de culture aquaponiqu­e dans son garage, qui était déjà aménagé en serre par le propriétai­re précédent.

« J’ai vu ça sur l’Internet, sur Youtube, et j’ai fait ma recherche. C’est un système très populaire en Australie, qui augmente en popularité au Canada et aux États-Unis. En Australie, ils peuvent le faire à l’extérieur. Mais dans notre pays, il faut qu’on le fasse à l’intérieur. En hiver, il fait juste trop froid. »

André Vermette estime qu’il a dû dépenser 2 000 $ pour installer son système aquaponiqu­e. Cela comprend un nouveau revêtement pour le garage et un système de batterie auxiliaire en cas de panne d’électricit­é. Il a fait tout le travail manuel lui-même.

Son seul échec réel a été avec les poissons : « J’avais acheté 150 tilapias. Mais au moment de les mettre dans la tank, il y avait un problème avec la qualité de l’eau. Le pH de l’eau était trop élevé. Le choc a été trop dur pour les poissons. Il y en a 90 qui sont morts sur le coup. Ça a pris un peu de temps aux autres à s’habituer.

Depuis cette première hécatombe, il n’y a pas un poisson qui soit mort. André Vermette juge donc que sa serre est un franc succès.

« Je ne pense pas qu’il y a quelqu’un d’autre au Manitoba avec un système aussi grand que le mien. Je connais quelqu’un qui a un petit système, mais il n’a pas accès au soleil comme moi.

« L’objectif était d’en parler sur l’Internet pour promouvoir l’aquaponie. L’été tout le monde a un jardin, mais moi je vais pouvoir manger des tomates naturelles en hiver, et des poissons aussi. »

À l’été 2016, les tilapias d’André Vermette étaient prêts pour la récolte. Comme il a rencontré certains problèmes au niveau du maintien d’une températur­e de l’eau assez basse dans la chaleur des mois d’été, il a un nouveau plan, qui l’invitera à une gastronomi­e encore plus sophistiqu­ée. « Les tilapias étaient très bons. Mais cette année, je veux élever des truites arc-en-ciel. La grande différence c’est qu’il faut de l’eau plus froide. Alors je ne vais pas devoir chauffer l’eau. Les truites arrivent à maturité plus vite que les tilapias. Je vais pouvoir les manger au printemps. Comme ça, je n’aurai plus à refroidir l’eau du système aquaponiqu­e pendant l’été. »

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Photo : Gavin Boutroy André Vermette au coeur de sa création.
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Photo : Gavin Boutroy
 ?? Photo : Gavin Boutroy ?? André Vermette dans sa serre. Pour l’instant il fait pousser plusieurs variétés de tomates, du basilic, des poivrons, des fèves, des pois, des radis et des épinards. Il pense à faire pousser des ananas ou des vignes avec des raisins. Malgré ce...
Photo : Gavin Boutroy André Vermette dans sa serre. Pour l’instant il fait pousser plusieurs variétés de tomates, du basilic, des poivrons, des fèves, des pois, des radis et des épinards. Il pense à faire pousser des ananas ou des vignes avec des raisins. Malgré ce...

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