LES CANDIDATS À LA REFONTE DE LA SFM S’EXPRIMENT
Six des huits candidats déclarés en date du 11 octobre ont accepté de répondre aux questions de La Liberté sur leurs motivations et ont proposé leur analyse des enjeux qui entourent la refonte de la Société francomanitobaine. Pourquoi se sontils portés candidats, comment voientils la francophonie actuelle et la place de la SFM?
Réponses de Mona Audet, Peter Dorrington, Raymond Hébert, Raymond Lafond, Baptiste Marcère et René Piché dans notre dossier spécial.
À l’heure d’aller sous presse, huit personnes avaient indiqué leur intérêt à siéger au comité de refonte de la Société franco-manitobaine (SFM). Comité de cinq membres qui sera élu si la proposition de refonte est adoptée le 13 octobre lors de l’AGA de la SFM.
Les candidats, en date du 11 octobre, étaient : Mona Audet, Peter Dorrington, Raymond Hébert, Raymond Lafond, Diane Leclercq, Baptiste Marcère, Ben Maréga et René Piché.
Six de ces huit candidats ont accepté de répondre aux questions de La Liberté pour partager leurs motivations et leurs perspectives. Diane Leclercq s’est désistée, préférant attendre l’AGA pour se présenter au public. La rédaction n’a pas réussi à contacter Ben Maréga. La Liberté a posé les mêmes questions à tous les candidats qui ont accepté de se livrer à l’exercice.
Leurs réponses apparaissent sous leur nom et par ordre alphabétique.
Qu’est-ce qui vous a motivé à soumettre votre candidature au comité de refonte? MONA AUDET :
L’organisme porte-parole est très important, c’est notre levier pour la francophonie manitobaine et canadienne. L’organisation veille à notre épanouissement en tant que citoyens et citoyennes et revendique pour nous tous. J’aime participer au développement de nos communautés et en étant élue à ce comité, je pourrai participer entièrement avec mon expérience personnelle et professionnelle afin de respecter toutes les parties prenantes de cette belle communauté.
PETER DORRINGTON :
En tant que Fransaskois qui découvre le Manitoba, et comme francophone de langue maternelle anglaise ayant déjà participé au développement de communautés inclusives en milieu minoritaire, je me sens interpellé par cette possibilité de penser la gouvernance communautaire, avec d’autres citoyens francophones engagés, pour qu’elle favorise au maximum la mobilisation communautaire, ainsi que la création d’une francophonie manitobaine qui soit à la fois audacieuse, inclusive et cohérente.
RAYMOND HÉBERT :
Ayant participé activement aux deux autres grandes transformations de la communauté francophone manitobaine en 1968 et en 1988, je crois que mon expérience personnelle dans la francophonie au cours des décennies peut servir à façonner ce nouveau virage dans l’histoire de notre communauté.
RAYMOND LAFOND :
J’ai toujours été très engagé dans ma communauté francophone du Manitoba que j’aime beaucoup et grâce à mon expérience professionnelle, je crois pouvoir faire une contribution à ce comité de refonte.
BAPTISTE MARCÈRE :
Mon expérience dans le milieu associatif, mon amour de la communauté francophone et mon envie de faire avancer les choses et d’avoir des résultats m’ont poussé à déposer ma candidature. Ma motivation au sujet de l’avenir de la francophonie manitobaine a toujours été la suivante depuis 1945 : le sentiment d’injustice d’avoir été obligé de cacher mes livres de français à l’école lors de la venue des inspecteurs.
J’ai contribué 32 ans de ma vie comme bénévole au service de la francophonie du Manitoba surtout avec l’objectif d’en maintenir la vitalité et d’exiger des instances gouvernementales des réparations d’ordre politique et constitutionnel.
Est-ce que votre candidature est votre initiative, ou avezvous été sollicité(e)? MONA AUDET :
Le Conseil d’administration de Pluri-elles a participé et suivi de très près toutes les étapes des États généraux.
Lors de l’annonce du comité de refonte, le Conseil a étudié les avantages d’y participer. Une discussion a eu lieu pour savoir qui serait la personne idéale, soit un membre de notre Conseil, ou un membre du personnel) Le CA a pris une décision : étant donnée toute mon implication au niveau national et provincial, et mes études pour gérer une organisation à but non lucratif, on m’a demandée si j’aimerais participer à ce comité. J’ai répondu, « Oui, absolument ». Et il a proposé ma candidature.
PETER DORRINGTON :
Ma candidature est ma propre initiative.
RAYMOND HÉBERT :
Plusieurs personnes m’ont approché et en fin de compte Roger Léveillé a proposé ma candidature aux termes de l’article 8.11 du Règlement de la SFM, appuyé de Paulette Desaulniers. Onze autres personnes ont signé cette proposition, et toutes ces personnes sont des leaders dans leurs domaines respectifs. Depuis, bien d’autres ont signifié leur appui à ma candidature. J’ai soumis mon nom en nomination de ma propre initiative. Je dois toutefois aussi admettre que quelques personnes m’ont approché pour me suggérer d’en faire autant.
BAPTISTE MARCÈRE :
Après avoir bien étudié les objectifs du comité de refonte de la SFM, j’ai l’intime conviction de pouvoir apporter mon expérience associative et communautaire à ce comité. Après avoir posé ma candidature j’en ai parlé au sein du conseil de la Maison Gabrielle-Roy, dont je suis le directeur général. J’y ai reçu un accueil très enthousiaste, ce qui me pousse encore plus à faire partie du comité.
RENÉ PICHÉ :
Après la parution du Rapport des États généraux, j’ai de ma propre initiative lu et relu ce rapport à la lumière de ma participation lors d’un café citoyen (anciens présidents et administrateurs) et à l’occasion de la rencontre à l’école LéoRémillard.
Je me suis souvenu qu’un membre du café rencontre avait dit qu’il faudrait produire et rédiger une “déclaration de la francophonie”, ce à quoi j’avais pensé moi aussi.
Piqué par ce défi, je me suis mis à la tâche. J’ai fait parvenir un texte de deux pages à Jacqueline Blay, présidente de la SFM qui m’a conseillé de l’envoyer au Comité directeur des États généraux.
Ce n’est qu’après cette action qu’on m’a demandé si j’accepterais de poster ma candidature. J’y ai réfléchi et j’ai répondu à l’appel.
Le CA de la SFM demande aux candidats d’avoir « des notions de gouvernance d’organismes à but non lucratif ». Quelle est votre expérience dans le domaine des OSBL et/ou des organismes de charité comme la SFM? MONA AUDET :
J’ai fait énormément de bénévolat dans la communauté en tant que membre de comité, membre d’un CA et autres. Je gère une organisation à but non lucratif depuis de nombreuses années.
Je crois que le plus important est mon diplôme avec la Société des directeurs d’associations du Canada, titre CAÉ (cadre d’association émérite) qui me donne le droit de pratiquer partout au Canada comme directrice générale (travailler avec des Conseils d’administration, les ressources humaines, les finances, le marketing, etc.).
PETER DORRINGTON :
Comme la gouvernance est un moyen de développement communautaire et non pas une fin en soi, il est plus important, à mon avis, de faire preuve d’une vision rassembleuse et d’idées nouvelles que d’un savoir technique.
Cela étant, j’ai une certaine expérience avec la gouvernance d’organismes à but non lucratif : j’ai travaillé de près avec l’Assemblée communautaire fransaskoise pendant une bonne dizaine d’années et j’ai un réseau pan-canadien de connaissances communautaires et universitaires ayant une expérience et une expertise en matière de gouvernance.
RAYMOND HÉBERT :
J’ai présidé plusieurs organismes à but non lucratif dans divers domaines.
J’ai été président de l’Association d’études canadiennes (19982000), président de l’Association des professeurs du Collège universitaire de Saint-Boniface (1984-1985), 1e vice-président du Festival du Voyageur (19901991) et vice-président de l’Association des traducteurs et interprètes du Manitoba (19911995). De plus, j’ai siégé aux conseils de l’Orchestre symphonique de Winnipeg et de la Manitoba Chamber Orchestra.
RAYMOND LAFOND :
Depuis 1993, je travaille avec des OSBL.
J’ai entre autres été directeur général des Soeurs Grises du Manitoba et de la Corporation catholique de la santé du Manitoba. À présent, je suis directeur général de la Fondation des Congrégations Catholiques Canadiennes et du Presentation Manor for Seniors, à Toronto.
BAPTISTE MARCÈRE :
Je suis arrivé au Canada en 2009. L’année suivante, je suis devenu président du Club Connection Française de Peterborough, en Ontario. Mon objectif était de redresser la situation financière du club.
J’ai par ailleurs une expérience de plus de dix ans à travailler dans le domaine associatif et plus précisément dans les associations de type communautaire.
RENÉ PICHÉ :
Mon expérience au coeur d’organismes à but non lucratif franco-manitobains est vaste : vice-président de Presse-Ouest (2 ans); membre et président élu de la Commission du Musée de Saint-Boniface (5 ans); fondateur et président de la Société des communications du Manitoba (8 ans); membre fondateur de Cinémental (9 ans); président du comité des communications franco-manitobaines et membre du comité des communications de la FFHQ (1 an); à l’époque du référendum québécois et de la gouvernance de Sterling Lyon je fus secrétaire-trésorier, viceprésident et président de la SFM (5 ans) et plus tard directeur général de la SFM (1 an approx.). J’ai contribué activement à la conception et à la rédaction de visions, de mandats, de responsabilités pour organismes à but non lucratif, de même qu’à la rédaction de descriptions de tâches pour délimiter les limites de responsabilités entre membres d’un conseil d’administration et la direction d’un organisme.
Pourquoi pensez-vous que vous devriez-être élu au comité de refonte? Qu’estce qui fait de vous un bon candidat/une bonne candidate? MONA AUDET :
Mon expertise, ma volonté de bien faire les choses, mon désir de participer à l’avancement de notre communauté. Le fait de vouloir respecter tous nos citoyens et toutes nos citoyennes, ainsi que nos organismes. Bien qu’étant encore relativement nouveau au Manitoba, je pense, en toute modestie, que ma candidature pourrait être intéressante pour les raisons suivantes : 1) je participe au développement communautaire depuis bientôt une quinzaine d’années; 2) je suis un visionnaire
expérimenté en ce qui concerne la création de communautés inclusives et cohérentes en milieu minoritaire (l’inclusion et la cohésion devant être les principaux objectifs de toute gouvernance bien pensée, à mon avis); 3) comme je suis encore assez nouveau au Manitoba, j’apporterais en toute probabilité des idées nouvelles et un regard neuf en matière de gouvernance; 4) je suis connu pour mon écoute ainsi que pour mes capacités de rassembleur.
RAYMOND HÉBERT :
Je crois que mes connaissances approfondies de la communauté francophone manitobaine (deux livres sur le sujet publiés en 2004 et 2012), mes expériences vécues dans cette communauté (notamment durant la grande transformation des années 1960 et durant la crise linguistique de 1983-1984) ainsi que mon esprit critique par rapport à notre communauté et ses institutions font que je pourrai apporter une contribution solide et informée au comité de refonte.
RAYMOND LAFOND :
Mon travail à titre de contrôleur financier de la commission scolaire de Saint-Boniface et de directeur général de la Caisse populaire de Saint Boniface, de la Corporation des soeurs grises du Manitoba et de la Corporation Catholique de la santé du Manitoba m’ont permis de mieux connaître ma communauté.
De plus, j’ai eu le privilège de jouer un rôle de premier plan à rédiger les règlements administratifs de la Corporation Catholique de la santé du Manitoba et à la rédaction ou révision de ceux de ses filiales. J’ai aussi rédigé les règlements administratifs de l’Agence nationale et internationale du Manitoba, le World Trade Centre Winnipeg et, à la demande de son président, les règlements de l’AMBM. De plus, j’ai récemment rédigé les règlements administratifs de Soutien aux religieuses du Canada, la Fondation des congrégations catholiques canadiennes et Presentation Manor for Seniors.
J’ose espérer que cette expérience me permettra de faire une contribution au comité de refonte de la SFM.
BAPTISTE MARCÈRE :
Le challenge de discuter des objectifs et des missions d’organisation est extrêmement important dans la communauté francophone.
J’ai déjà participé à la refonte du Club Connexion française et à celle de la Winnipeg FoodShare Coop, dont j’étais président. Je dois avouer que ces moments de concertation et de décision sur le futur m’attirent énormément.
RENÉ PICHÉ :
J’ai non seulement la capacité intellectuelle, une expérience vécue très diverse mais aussi une juste appréciation des enjeux de l’avenir qui attendent la collectivité francophone du Manitoba.
Ces atouts me permettront de remplir un tel mandat. Mais je suis très conscient de la réalité démographique, linguistique, culturelle et sociopolitique de notre francophonie.
Quelle est votre analyse de la francophonie manitobaine en 2016? Comment la concevez-vous? MONA AUDET :
Notre francophonie a mille accents, milles couleurs et n’a pas d’âge. Un Franco-Manitobain ou une Franco-Manitobaine n’est pas uniquement une personne de langue maternelle française.
Notre francophonie manitobaine se veut ouverte et inclusive. Nous retrouvons des personnes venant de différents horizons, pays et c’est une valeur ajoutée pour nous tous de travailler ensemble vers un but commun.
PETER DORRINGTON :
La francophonie manitobaine est en train de se repenser et de se remobiliser de façon audacieuse dans la foulée des États généraux. Comme francophone, je trouve ça à la fois très motivant et très encourageant.
RAYMOND HÉBERT :
La francophonie manitobaine est en pleine évolution. Un nombre grandissant d’anglophones manitobains bilingues veulent s’y joindre et y jouer un rôle actif; le fait que la moitié des membres du conseil du CJP soit maintenant issus de programmes d’immersion en est un exemple frappant. Les nouveaux arrivants aussi, en nombres grandissants, sont en voie de transformer nos organismes et nos institutions.
RAYMOND LAFOND :
La francophonie manitobaine a un potentiel énorme si elle peut rallier les forces de ses membres avec les forces de ses institutions et organismes.
BAPTISTE MARCÈRE :
J’ai combien de pages? La francophonie manitobaine est extrêmement riche et diversifiée à tel point que je me demande si on peut toujours parler de francophonie manitobaine, ou de francophonie tout simplement. Cette richesse à aussi son mauvais côté, la dispersion. Je pense qu’il serait essentiel de regrouper tout le monde autour d’une seule structure. Il est quelquefois rageant de voir autant de bonne volonté et de bonnes idées mis à mal par un manque de partenariats et de conseils
RENÉ PICHÉ :
La Déclaration que j’ai rédigée établit la réalité de la collectivité de la francophonie manitobaine, à savoir son passé, le contexte mondial de la globalisation et des nouvelles technologies et de l’intelligence artificielle dans lequel elle baigne comme toutes les autres sociétés du monde et de son présent face à la tâche d’un rassemblement de ses diverses composantes (ethnoculturelles, associations, organismes, institutions, etc.) qui devront s’engager sur la voie du devenir d’une nouvelle communauté de langue française, dont le succès sera attribuable en grande partie à la qualité de l’éducation en français, aux services de soutien auprès de la petite enfance, à l’appui à apporter aux familles endogames et exogames dans un contexte de développement de l’identitaire bilingue de notre jeunesse.
Où se situe la SFM dans votre perspective? MONA AUDET :
C’est notre leader, le défenseur de nos droits. Il est très important que notre organisme porte-parole soit bien informé et qu’il parle au nom de nous tous. Il sert à créer des liens constants envers le public, les organismes et les institutions. Il émet des opinions, des recommandations, des suggestions auprès des gouvernements pour permettre à nos communautés de s’épanouir. Il augmente notre visibilité au niveau provincial, national et international.
C’est un travail énorme qui se fait souvent confidentiellement à cause des dossiers qu’il traite. Sans la SFM, nous ne serions pas rendus où nous en sommes et nous ne serions pas une communauté aussi forte.
PETER DORRINGTON :
Je préfère laisser cette question au Comité de refonte. C’est au coeur de son mandat.
RAYMOND HÉBERT :
La SFM doit être au coeur de la francophonie manitobaine. Non seulement doit-elle refléter les éléments démographiques changeants de la communauté, mais elle doit s’outiller pour attaquer de front les défis à multiples facettes qui la confrontent.
On peut penser notamment à l’accueil profond des nouveaux arrivants, à l’assimilation qui continue à faire ses ravages, à la qualité du français chez les jeunes dont plusieurs déplorent la détérioration. Ces problèmes exigent des actions concertées par plusieurs institutions et organismes travaillant ensemble. Sur le plan de la représentation, la nouvelle Loi 5, dans sa reconnaissance officielle de la SFM, exige que la SFM représente tous les secteurs de notre société.
RAYMOND LAFOND :
La SFM ne joue plus un rôle de premier plan au sein de la francophonie manitobaine. Je crois fermement que cet exercice de refonte a le potentiel de lui donner les ailes voulues pour représenter avec force les aspirations de la francophonie manitobaine auprès des instances gouvernementales et autres.
BAPTISTE MARCÈRE :
Je vois en la refonte de la SFM une opportunité majeure d’en faire un organisme fondateur dans la communauté.
Pour moi la seule façon pour se faire est de créer une superstructure qui aurait pour mission de lier, conseiller, aider les organismes francophones à se développer. Pour moi, la Société franco-manitobaine doit être cette superstructure.
RENÉ PICHÉ :
Il faut se poser un certain nombre de questions à la lumière de la lecture du Rapport des États généraux et du travail qui devra être accompli en fonction de besoins prioritaires sur une base annuelle ou ponctuelle au moyen d’actions et de projets à entreprendre pour répondre aux exigences du plan stratégique des ÉG selon un processus sur lequel il y aura consensus entre toutes les composantes de la collectivité. Quel rôle un tel organisme pourrait-il et devrait-il y jouer et à quel titre? La discussion est ouverte!