« Berlioz, parce que ça me faisait peur »
Comédien et musicien, Simon Miron s’est plongé dans le monde romantique et délirant de la Symphonie fantastique de Berlioz, pour y ajouter des touches ultra-contemporaines, comme des images projetées, de la peinture en direct et un jeu de comédien sur la
Simon Miron met immédiatement les choses au clair. « Aucune note de la Symphonie fantastique d’Hector Berlioz n’a été changée. Alexander Mickelthwate et l’Orchestre symphonique de Winnipeg interpréteront ce chefd’oeuvre avec leur brio habituel. » (1)
Les mélomanes seront soulagés. Ce qui est inhabituel, c’est le jeu qui se produira sur la scène, avant que l’OSW ne se mette à jouer, et entre les mouvements de la symphonie.
« La Fantastique raconte une histoire prenante. Lors de la première, à Paris en 1830, Berlioz a présenté un programme écrit qui précisait ce que le compositeur cherchait à illustrer en musique. Les auditeurs pouvaient, en écoutant, “jouer” les scènes dans leur imagination. Un peu comme un vidéo-clip imaginaire. »
Le premier élan Simon Miron a été d’écrire le scénario. « J’ai l’avantage d’être bilingue. Alors j’ai pu aller à la source me plonger dans le texte de Berlioz même. C’est important, parce qu’il y a des nuances qui sont franchement intraduisibles. Berlioz parle du “vague des passions”. L’image évoque l’aspect mystérieux et flou de nos états d’esprit. Ça, et le flux et le reflux des émotions, qui montent et qui descendent en nous.
« J’ai voulu représenter le vague des passions dans mes gestes et mes paroles. Surtout que l’idée est au coeur de la symphonie. Berlioz est un obsédé. Le programme parle même d’une “idée fixe”. Dans la symphonie, c’est une mélodie qui revient dans tous les mouvements. De plus, la Fantastique raconte des épisodes et expériences d’un jeune artiste éperdument épris d’une femme. C’est son obsession. Et c’est sa fatalité, puisqu’en cherchant sa muse à l’extérieur de luimême, l’artiste va se perdre. »
Le deuxième élan de Simon Miron consistait à concevoir des images. « J’ai voulu mettre à jour le concept. Le programme de la Fantastique a donné naissance à des vidéo-clips. Avec Thor Aitkenhead, un artiste expert en multimédia, je me suis promené un peu partout à Winnipeg pour filmer des épisodes de la symphonie. On est allé à l’encontre du programme berliozien. On a voulu rester dans un monde urbain, contemporain. Alors le mouvement Scène aux champs devient une randonnée au parc Happyland, où il y a de la verdure, mais du béton et des trains, aussi. »
Le troisième élan de Simon Miron a été de faire vivre la peinture en direct. « Nereo Eugenio II se laissera emporter par la musique, pour créer non pas ses propres vidéo-clips imaginaires, mais de vrais tableaux. Je voulais ajouter cette composante pour rappeler qu’on est toujours en relation créative avec un ouvrage musical célèbre. Écouter la Fantastique, ce n’est pas une expérience passive. »
Et l’idée fixe du projet de Simon Miron? « La peur. Ça fait plus de dix ans que je suis comédien. J’ai joué sur les planches du Cercle Molière, de Rainbow Stage, du Manitoba Theatre for Young People. Je n’ai jamais entrepris une présentation de cette envergure. Je voulais me lancer un défi. Et un défi, ça dérange. J’ai voulu jouer Berlioz, parce que ça me faisait peur. »
(1) La Symphonie fantastique sera présentée le 18 octobre à 19 h 30, dans le cadre du Festival de musique impressionniste de l’OSW, à la Salle du Centenaire du Manitoba, située 555, rue Main à Winnipeg.