La Liberté

Le profond désir d’appartenir

Comme toutes les personnes qui occupent des hautes fonctions dans une organisati­on, Mona Audet ne saurait pouvoir faire l’unanimité. Au strict plan humain cependant, la native du Saguenay (en 1957) est sûre de faire consensus. Personne en effet ne pourrai

- Bernard BOCQUEL bbocquel@mymts.net

En 2001, cinq années après voir choisi une vie franco-manitobain­e avec son conjoint, Mona Audet avait à son tour été choisie pour prendre la direction générale de Pluri-elles. Nul doute que cette marque de confiance tenait au fait qu’elle avait embrassé la communauté à bras-le-corps dès son arrivée.

« Mon chum est fonctionna­ire fédéral. Il est bilingue, il vient de la région d’Ottawa. Entre notre mariage en 1982 et notre arrivée au Manitoba en 1996, je tenais une garderie familiale. Des fois, j’avais jusqu’à 10, 12 enfants. J’y arrivais, parce que j’étais très organisée. Je préparais les repas le soir d’avant, j’organisais des jeux, j’emmenais les enfants dehors, parce que je ne voulais pas vraiment les mettre devant la télé. Ce que je ne voulais pas non plus, c’est que mes trois filles aient un handicap de langue, qu’elles ne parlent pas couramment l’anglais. L’anglais, ça peut devenir important pour le travail.

« Mon chum est un administra­teur. Quand le centre de virologie a ouvert à Winnipeg, c’était l’occasion de donner l’anglais à nos enfants. On est venu en visite exploratoi­re au printemps 1996. Je pensais inscrire mes filles à l’école anglaise. Mais l’agent d’immeubles franco de Re/Max qui nous a présenté SaintBonif­ace et Saint-Vital nous a expliqué qu’ici, l’anglais s’apprend dans la rue et qu’il fallait absolument que j’envoie mes filles à l’école francophon­e. Moi à ce moment-là, je ne comprenais pas ce que ça voulait dire, être minoritair­e. Pour enlever mes doutes, Henri Fortier nous a fait rencontrer Normand Boisvert, le directeur de l’école Lavallée. Lui nous a convaincus. Je le remercie encore à chaque fois que je le vois. »

À ce stade de son histoire, Mona Audet prévient qu’elle va devenir émotive. « Normand nous avait dit que l’école nous aiderait. Ça voulait dire quoi, ça? Moi je viens du Québec. Je ne pouvais pas imaginer ce que pourrait faire pour nous la direction de l’école. Deux jours avant la rentrée scolaire, une petite fille s’est présentée à notre porte pour nous laisser savoir qu’elle aiderait mes filles à se rendre à l’école. C’était le plus beau cadeau qu’on aurait pu nous faire. »

Pour l’ancienne secrétaire exécutive chez General Motors à Québec (1975 à 1982) vient alors le temps de prolonger son éducation. Dans le cadre du programme d’emploi Ma carrière, mon choix financé par l’assurance chômage, la NéoManitob­aine devient pendant huit mois étudiante à Pluri-elles, où elle fait la connaissan­ce de la directrice générale, Murielle Gagné-Ouellette.

« C’est là que j’ai appris à utiliser les ordinateur­s. C’est là que j’ai eu de la misère avec mes cours d’anglais. Ça rentrait pas! C’est à Pluri-elles aussi que Murielle Gagné-Ouellette m’a donné un conseil très important : Mona, si tu veux être bien au Manitoba, si tu veux t’intégrer, toi et ta famille, tu dois t’impliquer, tu dois participer, tu dois connaître la communauté. J’ai commencé par me joindre au CA de Pluri-elles.

« Ma première chance d’emploi, c’est Julie TurenneMay­nard qui me l’a donnée en 1997 : directrice adjointe et agente de marketing au Club La Vérendrye. Notre travail, c’était de fermer le club. En 2000, j’ai plongé du côté anglais. Je m’occupais de la gestion des évènements au Rossmere Country Club. Là j’ai appris l’anglais. Pas parfaiteme­nt. L’anglais, encore aujourd’hui, je ne dis pas que je le parle, je dis que je le bafouille. »

Le tournant dans la vie profession­nelle de Mona Audet se produit en mars 2001. « Plurielles vivait une période de transition. On est venu me chercher. Il y avait une dizaine d’employés pour s’occuper du counsellin­g pour les femmes, du programme d’alphabétis­ation et du programme d’emploi. J’ai accepté de relever le défi. Comme je sentais un besoin de formation, j’ai pris des cours par Internet. Mes études m’ont permis une refonte de Plurielles. J’ai pu bâtir sur les bonnes bases de l’organisme. En 2004 j’ai obtenu mon diplôme de la Société canadienne des directeurs d’associatio­n. On m’a dit que c’était l’équivalent d’une maîtrise en gestion d’organismes. » (1)

Pendant toutes ces années-là, Mona Audet s’est investie à fond dans son milieu d’adoption. « J’en mangeais de la communauté! Je voulais participer partout. Je me sentais si chanceuse qu’il fallait que je remette. »

Sa conception de la communauté est englobante. « Pour moi, la communauté, c’est du monde, des organismes, des clients, des clientes, des entreprise­s, des services disponible­s, des écoles, des institutio­ns. Et parmi les institutio­ns, je donne une place spéciale aux médias : RadioCanad­a, La Liberté et Envol. Parce que sans les médias, on ne serait pas là. On a une mautadite de belle communauté. Je n’ai aucun doute sur sa vitalité. Quand ça se passe de génération en génération, qu’est-ce qu’on peut demander de plus?

(1) Aujourd’hui, Pluri-elles compte 35 employés, dont 15 à temps plein et 20 à temps partiel puisqu’il existe 10 centres Alpha et 10 centres d’aide aux devoirs.

 ?? Photo : Daniel Bahuaud ?? Mona Audet, la directrice générale de Pluri-elles depuis 2001, dans son bureau. Cela fait maintenait vingt ans que cette Québécoise d’origine s’est installée au Manitoba avec la volonté de s’intégrer. « C’est la force de la communauté francophon­e qui...
Photo : Daniel Bahuaud Mona Audet, la directrice générale de Pluri-elles depuis 2001, dans son bureau. Cela fait maintenait vingt ans que cette Québécoise d’origine s’est installée au Manitoba avec la volonté de s’intégrer. « C’est la force de la communauté francophon­e qui...

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