Pour la cause de la littérature franco-manitobaine
Charles Leblanc et Bertrand Nayet cultivent leur complicité de poète et d’écrivain depuis la toute fin du 20e siècle au sein du Collectif post-néo-riéliste. De cette association informelle d’artistes et d’écrivains va émerger le 1er mars une très officielle association d’auteurs.
Charles Leblanc vit des mots en qualité de traducteur. Le poète reconnaît volontiers que les dates ne sont pas sont fort. Bertrand Nayet est enseignant. Lui se délecte à peaufiner des aïkus. Il savoure les mots au point d’aimer rédiger des procès-verbaux. Grâce à son penchant de documentaliste, l’écrivain en résidence de la Maison GabrielleRoy depuis 2012 peut affirmer avec certitude que la première rencontre du Collectif post-néoriéliste s’est tenue le 30 janvier 1999 chez Charles Leblanc.
« Je documente des évènements par amusement, histoire de garder des souvenirs. Comme chacune de nos rencontres amicales exige de la part des participants d’apporter un plat, je peux aussi préciser que le menu de la rencontre de fondation comprenait une soupe gitane, un cari aux pois chiches, du saumon aux câpres, des fromages et divers vins, blancs et rouges. »
Les convives étaient au nombre de quatre. Outre l’hôte et le minutieux secrétaire, les deux autres commensaux étaient les écrivains Roger Léveillé et Lise Gaboury-Diallo. L’atmosphère était au partage joyeux et Charles Leblanc laissa aller son imagination.
« C’est moi qui ai concocté le nom Collectif post-néo-riéliste. Au début, il y avait une mesure d’ironie. Mais en fait, ce nom sous lequel nous nous retrouvons trois ou quatre fois par année correspond à un portrait de la littérature d’ici.
« D’abord, il y a eu Louis Riel et ses écrits. Ensuite sont venus les commentateurs de Louis Riel, de la fin du 19e siècle jusqu’à début du 20e siècle. Après sont arrivés les néorielistes, ceux qui ont redécouvert le chef métis dans les années 1950 et 1960.
« Et puis nous voilà, les écrivains apparus dans les années 1970 et 1980. On a puisé dans la conscience collective, mais notre littérature n’est pas essentiellement identitaire. C’est comme si on n’avait plus besoin de revenir sur la question de Riel, parce que la question a été assimilée. Notre identité, on n’a pas besoin de la questionner. On sait qui on est. »
La part du traducteur soucieux de la précision tient encore à noter : « Dans postnéo-rieliste il y a aussi un jeu de mots sur réalisme. Je pensais en proposant le nom du Collectif au néo-réalisme des cinéastes italiens des années 1950 et 1960. Et il y a aussi la volonté de parler d’autres choses, de s’amuser avec le post-moderne. »
Bertrand Nayet se fait l’écho de son compère en écriture. « C’est vrai, on ne se prend pas trop au sérieux, on partage à la bonne franquette. Il y a le côté jouissif, mais on se lance aussi parfois dans des conversations sérieuses sur l’état de la littérature et sur la vie en général. Si le Collectif se réunit dans l’esprit des salons littéraires, on ne perd pas de vue l’organisation de projets. »
Et c’est bien par besoin d’actions concrètes que Bertrand Nayet et Charles Leblanc ont été sensibles aux arguments avancés par des écrivains francoontariens lors d’un salon du livre à Sudbury en mai 2016. Ils leur ont fait valoir l’intérêt de mettre sur pied une association d’auteurs. Celle de l’Ontario existe depuis 2006, réunit environ 300 membres, possède la crédibilité nécessaire pour obtenir des subventions, dispose d’employés. Elle est donc capable d’organiser, par exemple, des ateliers d’écriture.
À la réflexion, face à tant de perspectives positives, Charles Leblanc et Bertrand Nayet ont décidé de passer à l’action. D’une même voix, ils affirment : « Réunir les auteurs d’une façon plus formelle, jeter les bases d’une association devient quelque chose d’absolument nécessaire pour aider la cause de la littérature franco-manitobaine. »
Parmi les premières occasions de créer en commun sous l’impulsion du Collectif postnéo-rieliste, il y a eu un projet avec La Liberté. Bertrand Nayet plonge dans ses notes. « Entre octobre 2000 et mai 2001, on a été près d’une dizaine à publier chacun un chapitre dans le journal, qui était alors sous la direction de Sylviane Lanthier. La Liberté a publié des contributions de Lise GabouryDiallo, Laurence Véron, LucieMadeleine Delisle, Cécile Guillemot, Roger Léveillé, Simone Chaput, Charles Leblanc, Jean-Pierre Dubé, et moi-même. »
Sans chercher à être exhaustif, outre les personnes mentionnées, ont participé, ou participent encore au Collectif post-néorieliste : Robert Nicolas, Louise Dandeneau, Laurent Poliquin, Bathélémy Bolivar, Marc Prescott, Jean Chicoine, Rosmarin Heidenreich, Sandrine Hallion et Louise Duguay.