IMMIGRATION AU MANITOBA
La Province a décidé de demander une somme supplémentaire de 500 $ aux candidats à l’immigration. Préoccupations et répercussions d’une telle décision.
La Province imposera, dès le 1er avril, une contribution supplémentaire de 500 $ aux nouveaux arrivants acceptés pour obtenir une résidence permanente au Manitoba. Une mesure qu’une coalition de citoyens qualifie de « raciste ». Et qu’elle entendait dénoncer publiquement le 1er mars au Palais législatif.
La Save the Manitoba Provincial Nominee Program est une coalition formée en décembre dernier pour lutter contre la décision de la Province. Henry Heller, professeur d’histoire à l’Université du Manitoba et membre de la coalition, exprime les préoccupations du groupe :
« L’avenir de l’économie manitobaine dépend des immigrants. Le Programme des candidats du Manitoba a connu un grand succès au cours des dix dernières années. En janvier, le Conference Board du Canada a noté que l’économie manitobaine a connu une croissance considérable, grâce en grande partie aux nouveaux arrivants.
« Alors pourquoi chercher à imposer une somme supplémentaire de 500 $ aux immigrants qualifiés? À notre avis, c’est une taxe d’entrée qui punit les nouveaux arrivants. C’est quasiment raciste de le faire. Ça rappelle les taxes imposées aux Chinois au 19e siècle.
« On déplore aussi que le Programme des candidats du Manitoba ne cherche plus à encourager activement la venue des familles des immigrants qualifiés. Pour nous, c’est un nonsens. À l’heure actuelle, 86 % des immigrants qui s’installent au Manitoba choisissent d’y demeurer, en grande partie parce qu’ils peuvent faire venir leurs familles. Or quand un gouvernement se met juste à encourager la seule venue d’individus, plutôt que de leurs familles, il y a là quelque chose de déstabilisant. Une famille sera plus portée de s’installer de manière permanente, et à contribuer à l’économie manitobaine. Pourquoi mettre ce succès à risque? »
Le Manitoba accueille plus de 400 immigrants francophones par année depuis le début des années 2010. Le Programme des candidats du Manitoba représente la part suivante : 280 (2010), 270 (2011), 319 (2012), 225 (2013), 260 (2014) et 217 (2015).
Salwa Meddri, la coordonnatrice du Réseau en immigration francophone du Manitoba, déplore l’imposition d’un coût supplémentaire de 500 $. Mais elle souligne que la Province continuera d’appuyer les familles des immigrants.
« On n’est pas enchanté par la décision. On aurait souhaité que la Province fasse autrement, parce que 500 $, c’est une somme importante. Par contre, l’objectif du programme demeure le même. Le programme veut assurer un meilleur jumelage entre les employeurs et l’immigrant, ce qui augmente ses chances d’intégrer le marché du travail. Et on est réconforté de savoir que les 500 $ seront payés par l’immigrant seulement s’il a été accepté par la Province. Et seulement quand il aura accepté, à son tour, de venir au Manitoba dans le cadre du Programme des candidats du Manitoba.
« On est également encouragé du fait que l’argent recueilli par l’imposition des 500 $ sera utilisé pour assurer un meilleur accompagnement des conjoints et des familles. Le volet familial du programme se poursuivra donc. »
Daniel Boucher, le PDG de la Société franco-manitobaine, souligne que la SFM a exprimé « son inquiétude » par rapport aux changements au Programme des candidats du Manitoba. « On a rencontré, début décembre 2016, le sous-ministre adjoint à l’Immigration, Ben Rempel. M. Rempel a été catégorique, en affirmant que les changements au programme allaient de l’avant. Ce qui nous inquiète, c’est le potentiel impact sur l’immigration francophone. À ce point-ci, on ne sait pas si l’imposition d’un coût supplémentaire de 500 $ va décourager les francophones à venir.
« Jusqu’à présent, l’annonce ne semble pas avoir ralenti les demandes. Mais on va demeurer vigilant. On va suivre la situation. Si les changements ont un impact négatif, il faudra passer à l’action, en commençant par faire connaître nos inquiétudes », conclut Daniel Boucher.