Une vie de mineur lazarois
Jean-Paul Chartier est bien placé pour parler de la vie à Saint-Lazare. Il est le conseiller municipal du village, un père, et un grand-père. Il a aussi passé 42 ans sous la terre, dans la mine de potasse de Rocanville, qui emploie un huitième des habitants de Saint-Lazare.
Les mineurs : plus forts que Lazare de Béthanie. Si le premier ressuscité du Nouveau Testament s’est une fois miraculeusement extrait des entrailles de la terre, les mineurs du village qui porte son nom le font tous les jours.
Saint-Lazare est un village d’environ 450 habitants, à 330 km à l’Ouest de Winnipeg. Jean-Paul Chartier, conseiller du village à la municipalité de Ellice-Archie, estime que 70 % des résidents sont francophones. La mine de potasse de Rocanville de la compagnie PotashCorp se situe à 20 kilomètres du village, en Saskatchewan. Elle produit, à elle seule, un cinquième de la production mondiale annuelle de potasse, soit 5,5 millions de tonnes de ce minerai destiné à produire de l’engrais.
Lorsque la question sur le nombre de Lazarois dans la mine lui est posée, Jean-Paul Chartier s’exclame avec un rire : « La moitié du village! ». Il précise qu’environ 60 Lazarois sont employés dans la mine, dont lui même, mécanicien spécialisé.
« Si je suis avec les gars de Lazare, on parle français. S’il y a des anglophones qui sont là, on parle anglais, parce qu’on les respecte. »
Pour lui, la mine a été un atout pour la survie du village. « C’est important pour garder du monde au village, mais c’est une lame à double tranchant. Les enfants ne cherchent pas à suivre des études postsecondaires parce qu’ils peuvent gagner 50 $ par heure dans la mine. »
Le père de famille croit en effet que c’est important que les jeunes découvrent le monde à l’extérieur du village. Il donne l’exemple de ses trois enfants.
« Christian, l’un de mes fils, a joué au hockey tout partout. Il a joué dans une équipe professionnelle en Allemagne. Mon autre gars a été partout pour le hockey lui-aussi. Ma fille a aussi passé du temps en Europe. J’ai pu aller leur rendre visite. »
Dorénavant, les trois enfants de Jean-Paul Chartier sont de retour à Saint-Lazare. Ses deux fils travaillent avec lui dans la mine. « Ils ont été partout au monde, mais il me disent : Il y a rien comme chez nous.
« Le dimanche quand on ne travaille pas, on prend le déjeuner après la messe, et on parle de notre semaine. »
« Ça fait 42 ans que je suis dans la mine, mais à chaque fois que je descends, je m’inquiète un peu, je me demande si je vais remonter. Et il n’y a pas un jour où je ne m’inquiète pas pour mes fils. »