Les liens de la terre
Andrew Carrier, de son vrai nom André Carrière, ils de Paul et Evelyn Carrier de Saint‐Boniface, est ier d’être métis et, à ce titre, représentant et porte‐parole francophone de la MMF. C’est en cette qualité qu’il a appris, le 8 mars 2013 à Ottawa, la décision historique de la Cour suprême de reconnaître aux Métis du Manitoba le droit aux 1,4 million d’acres promis aux 7 000 enfants des Métis de la Rivière‐Rouge lors de l’adoption de la Loi sur le Manitoba. Une décision qui trouve un écho tout particulier chez Andrew Carrier : « Ma famille, les Carrière, est présente au Canada depuis 13 générations, et au Manitoba depuis sept générations. À la demande de Louis Riel, plusieurs membres de ma famille ont rejoint un groupe de 78 personnes à la ferme Goulet à Saint‐François‐ Xavier pour participer à la bataille de Batoche. Mon arrière‐grand‐oncle Damase Carrière y a été sauvagement assassiné pour l’exemple par les soldats anglais de l’Est. Le lien avec le Manitoba est donc dans notre sang. Mais pas dans la terre… » Ces terres, promises par la Confédération en 1870, destinées aux descendants des Métis de la Colonie de la Rivière‐Rouge, mais dont ils n’ont jamais béné icié. « Moins de 5 % des Métis ont effectivement eu accès à ces 200 acres par descendant promis dans la
Loi sur le Manitoba. Pourtant, le gouvernement n’a cessé de dire qu’elles avaient été remises. Mais lorsqu’on regarde, on s’aperçoit qu’elles ont été distribuées à tous ceux qui n’étaient pas Métis. Je trouve très intéressant de voir que l’Église catholique de Saint‐Boniface et l’Église protestante de Winnipeg ont particulièrement béné icié de ces terrains, de même que les nouveaux arrivants d’Europe qui ont reçu du gouvernement 260 acres comme aide à l’installation, selon le Homestead Act.
Mais les Métis, eux, étaient condamnés à vivre sur les bords des routes, victimes de racisme, oubliés. » C’est ce qui explique l’émotion ressentie par Andrew Carrier au moment de la décision de la Cour suprême en 2013. « En tant que porte‐parole of iciel des Métis francophones, j’étais à Ottawa pour ce moment. J’ai ressenti une telle ierté! Je me suis en in senti en paix. 32 ans de lutte pour démontrer les manquements du gouvernement fédéral, 32 ans de travail pour nous, bénévoles, qui avions en face de nous la Ville de Winnipeg, la Province et le gouvernement fédéral. Et en in, on reconnaissait le tort qui avait été fait, et surtout, on reconnaissait qu’on était ici chez nous… Après les générations d’abus et de négligence de la société envers les Métis. » Évidemment, Andrew Carrier sait que cette victoire ne signi ie pas la in du combat. « Dès que la Cour suprême a rendu sa décision, les aides fédérales ont commencé à baisser. Le précédent gouvernement s’en ichait. Avec le nouveau gouvernement, la porte est ouverte pour les négociations, pour savoir comment transformer ces terres en aides inancières pour nos enfants, pour leur scolarité, pour leur donner un bon départ. Pour la MMF, en tant que gouvernement des Métis, c’est l’occasion d’offrir toutes les chances d’une vie meilleure à nos citoyens Métis. En in, après 143 ans, on est reconnu comme faisant partie de ce pays. »