La Liberté

La parrêsia, l’antidote dans un monde de fake news

- CANTIN BRAULT ANTOINE

Est-ce que celui ou celle qui veut se soucier de soi-même peut le faire sans avoir de rapport à l’autre? Autrement dit, peut-on s’occuper de soi sans porter attention aux autres? Non, croyaient les Grecs, comme nous rappelle le philosophe français Michel Foucault à plusieurs endroits dans son oeuvre. Les Grecs croyaient que pour arriver à prendre soin de nousmêmes, à nous diriger vers le meilleur de nous-mêmes, nous avions besoin du jugement des autres, d’un jugement franc et vrai. C’est ce qu’ils ont appelé la parrêsia, mot que l’on peut traduire par « tout dire » ou par « franc-parler ». C’est donc à travers la parrêsia d’un autre que l’on arrive à constater notre propre valeur morale. Car, si l’autre utilise plutôt la flatterie, jamais nous ne pourrons avoir une idée réelle de ce que nous sommes. Pour les Grecs toujours, la personne qui a le plus besoin de la parrêsia d’un autre est la personne qui gouverne, puisqu’elle doit non seulement s’occuper d’elle-même, mais du bien commun.Elle doit donc savoir entendre la vérité sur elle-même, sous peine d’inévitable­s dérives.

Il va de soi que toute cette ambiance de fake-news n’a rien pour encourager la parrêsia. Lorsque le dirigeant ne peut plus saisir l’image qu’il projette, lorsque d’avance il condamne en bloc tout commentair­e critique, lorsqu’il n’entend que ceux qui le flattent, ce dirigeant est perdu. En perdant le souci de l uimême, il perdra bientôt la volonté de se soucier des autres.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada