Même quand une soixantaine d’économistes sont unanimes, qui va écouter leurs propositions?
Quand j’étais étudiant en sciences économiques, un professeur aimait rappeler une citation attribuée à l’économiste américain Edgar Fiedler : Demandez à cinq économistes et vous recevrez cinq différentes réponses – six
si l’un d’eux est allé à Harvard! La semaine dernière, 61 économistes ont fait mentir la blague en demandant au ministre des Finances Bill Morneau de modifier la Loi sur la Banque du Canada.
Aucune institution gouvernementale n’exerce plus de pouvoir sur les finances des Canadiens que la Banque centrale. Elle guide le comportement général de l’économie, elle établit les taux d’intérêt. Elle influence ainsi le taux de change du
dollar canadien. Depuis 1991, son objectif principal est de maintenir l’inflation autour d’un taux cible de 2 %.
Les 61 économistes canadiens d’un peu partout au pays demandent en toute logique au ministre d’ajouter au mandat de la Banque centrale l’objectif de plein emploi. Ils proposent aussi que la Banque justifie et explique ses décisions à la fin de chaque période de cinq ans, souhaitant ainsi rendre ses actions plus transparentes et plus compréhensibles pour les Canadiens. Comme c’est au demeurant le cas aux États-Unis.
Les propositions de ces économistes ne constituent pas de changement radical dans la politique monétaire du pays. Car
la Banque tient déjà compte de nombreux indicateurs économiques, tels le niveau d’endettement des Canadiens et le taux de chômage. Malheureusement, ils se sont prononcés le jour où le Canada a acheté un oléoduc et deux jours avant que notre pays ne riposte aux tarifs imposés par les États-Unis. Bien qu’elles soient unanimes, ces propositions pensées pour le long terme pourraient bien être enterrées par les débats houleux entourant des enjeux plus immédiats.