Il faut bien connaître l’autre venu d’ailleurs
Il devient plus important que jamais de pouvoir comprendre la culture des uns et des autres. Pour faciliter l’intégration des nouveaux arrivants dans la société canadienne, des experts du domaine de la diversité culturelle proposent des formations interculturelles.
Parmi les personnes en mesure de donner des formations interculturelles figure Mamadou Ka, professeur associé à l’Université de Saint Boniface. « Il s’agit d’aider l’intégration socio-économique des nouveaux arrivants, tout en permettant à la communauté de les comprendre. Le but est de créer un environnement de travail harmonieux et sans discrimination. C’est important, parce qu’on vit avec l’internationalisation et la diversité. » Pour beaucoup d’entreprises, la gestion de la diversité répond à des préoccupations juridiques, économiques et sociales. « Au Canada, les droits des personnes sont protégés par des lois fédérales. De la Charte canadienne des droits et libertés à la Loi sur l’équité en matière d’emploi, c’est autant de cadres juridiques qui permettent de combattre la discrimination. D’ailleurs, à partir du moment où les gens travaillent bien et en harmonie, la productivité augmente, et l’entreprise en tire les bénéfices. » Se soucier de la diversité culturelle dans le monde du travail commence dès la publication de l’offre d’emploi. « Quand les immigrants viennent d’arriver, ils n’ont pas forcément Internet. Il est donc préférable de poster l’offre dans les journaux communautaires, afin de toucher le plus de monde possible. » L’épreuve suivante est celle de la soumission du CV. « Au Canada, on recherche des compétences, ce que le demandeur d’emploi sait faire. Dans d’autres pays, on regarde les diplômes. C’est important que les communautés d’accueil aident les nouveaux arrivants à retravailler leur CV, pour qu’ils trouvent des compétences transférables au métier pour lequel ils postulent. » Lorsqu’ils obtiennent un entretien, avant même qu’il ne débute formellement les immigrants peuvent encore devoir surmonter des défis. « Le moment des petits bavardages fait partie de l’entrevue. Le demandeur est jugé à ce moment-là, et le directeur des ressources humaines se fait déjà une impression. Or, la majeure partie des immigrants viennent de cultures où la distance hiérarchique est forte. Ils peuvent par exemple baisser les yeux en signe de respect. Mais ici, c’est interprété comme un signe de manque de confiance ou de malhonnêteté. » Ces différences culturelles peuvent bien sûr influencer le déroulement de l’entretien. « Quand l’employeur dit : Parlezmoi de vous, les immigrants vendent un CV avec des diplômes. Ils ne se vendent pas eux-mêmes. Or, au final, le candidat retenu sera celui qui aura su mettre en avant ses compétences et ses expériences passées, même s’il a moins de diplômes. » Dans l’entreprise elle-même, former les employés s’avère essentiel. « Les entreprises au Canada deviennent des mosaïques culturelles. Les employés arrivent avec une absence de compréhension culturelle du contexte dans lequel le nouvel arrivant a grandi. C’est vrai, le problème se pose des deux côtés. Mais il faut garder à l’esprit que la compétence culturelle, c’est aussi la compassion. À partir du moment où on comprend la personne, sa culture, d’où elle vient, on commence à être plus ouvert et à admettre des comportements qui seraient considérés ici comme des faux pas culturels. » À travers la formation, Mamadou Ka aborde la culture en général, la compétence culturelle ou encore la communication interculturelle. «Nous donnons des outils pour communiquer, comprendre les comportements et la culture. En éducation par exemple, on constate que les écoles sont de plus en plus diversifiées. Il faut donc former les jeunes pour qu’ils s’intègrent dans les établissements, et les enseignants pour qu’ils comprennent les élèves. » Beaucoup d’ateliers sont donnés dans la communauté pour faire de la sensibilisation. Les entreprises n’ont plus le choix. Le Canada est multiculturel, et elles ont besoin de spécialistes pour faire des affaires à l’international. Former les employés fait partie des exigences, alors autant le faire jusqu’au bout. »