La Liberté

L’incident Squires : un bon avertissem­ent pour Brian Pallister

- MICHEL LAGACÉ

La façon la plus efficace de porter atteinte à la réputation d’un gouverneme­nt, c’est de s’attaquer à l’intégrité d’un ministre. Malgré la difficulté de réaliser un tel exploit, le chef du Parti libéral a décidé de se prêter à ce jeu du discrédit. Élu dans la circonscri­ption de Saint-Boniface le 17 juillet, Dougald Lamont a voulu faire sa marque en exigeant la démission de Rochelle Squires, la ministre du Développem­ent durable.

La semaine dernière donc, il a accusé la ministre d’avoir différé jusqu’au 17 juillet la publicatio­n d’un rapport confirmant que des sols dans un secteur de SaintBonif­ace étaient contaminés par des matières toxiques, dont le plomb. D’abord la ministre a affirmé que même si un fonctionna­ire avait rédigé ce rapport le 4 juin, elle n’en avait pris connaissan­ce qu’au début de juillet. Dans un deuxième temps, elle a reconnu en avoir été informée le 21 juin au plus tard. Or l’élection partielle dans SaintBonif­ace avait été déclenchée deux jours plus tôt.

La Loi sur le financemen­t des

élections interdit la publicatio­n de renseignem­ents sur les programmes et les activités du gouverneme­nt durant une période électorale. Elle prévoit cependant des exceptions, dont les annonces qui « concernent des questions importante­s de santé ou de sécurité publiques ». Cette exception exige qu’un jugement soit porté sur l’importance et l’urgence de rendre publique une informatio­n concernant la santé ou la sécurité publique. La ministre assure avoir accepté l’opinion de fonctionna­ires qui déconseill­aient toute annonce publique.

La ministre Squires se trouve maintenant dans une situation qui s’explique mal. Mais surtout qui exige de poser au moins trois questions. Pourquoi les fonctionna­ires de son ministère auraient-ils attendu du 4 au 21 juin avant de l’avertir des résultats préoccupan­ts des examens du sol? Pourquoi la ministre n’a-t-elle pas publié ces résultats en s’appuyant sur la clause d’exception de la Loi? Et enfin, comment les ministres de ce gouverneme­nt sont-ils encadrés pour éviter la situation gênante de la ministre, réduite maintenant à se réfugier derrière les conseils de fonctionna­ires anonymes?

La ministre démissionn­era-telle? Dans les années 1980, après avoir accepté la démission de cinq ministres dans ses deux premières années au pouvoir, le Premier ministre du Canada Brian Mulroney s’est rendu compte que chaque démission, loin d’être un signe de sa volonté de maintenir l’intégrité de son gouverneme­nt, devenait une arme dans les mains de l’opposition. Aujourd’hui, un Premier ministre attend que la tempête passe et, si elle risque de ternir le gouverneme­nt à long terme, le ministre en question est muté au moment opportun.

Le Premier ministre du Manitoba voudra sûrement éviter une démission provoquée par un incident qui sera probableme­nt bientôt oublié. L’incident Squires devrait servir d’avertissem­ent à Brian Pallister : s’assurer que tous ses ministres soient bien encadrés pour éviter les bévues comme celle qui a piégé sa ministre du Développem­ent durable.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada