Le casse-tête pour garder les enseignants
Une fois qu’on a embauché un enseignant, comment le retenir? (1) Marco Ratté, le directeur général adjoint de la DSFM et Daniel Couture, le directeur de l’École la Voie du Nord, présentent leur panoplie de solutions.
La rétention des enseignants est plus que jamais à l’ordre du jour à la Division scolaire francomanitobaine. En 2017-2018, le taux de rétention à la DSFM a été de 92 %. Marco Ratté, qui est en grande partie responsable des efforts de recrutement, dresse un portrait de la situation : « Les écoles françaises et d’immersion ont beaucoup de difficultés à recruter suffisamment d’enseignants. On veut donc les garder. Ce n’est pas toujours évident, surtout quand on recrute des diplômés en éducation, qui sont en début de carrière. »
Une étude du Manitoba Teachers Retirement Allowance Fund chiffre à 30 % la proportion d’enseignants qui quittent la profession dans les cinq premières années. Marco Ratté comprend pourquoi : « Ils ont énormément à apprendre et à maîtriser. La gestion de la classe, avec toutes les dynamiques entourant la discipline. Les corrections et l’évaluation des élèves. Les curriculums. Les relations parents-maîtres. Souvent, ça peut devenir accablant.
« À moins qu’ils n’obtiennent l’appui nécessaire. À la DSFM, il y a trois ans, le service à la
programmation de Louise Legal Perrin et de René Déquier a mis sur pied une équipe de leaders pédagogiques. Ce sont six enseignants qui font le tour des écoles pour visiter les nouveaux enseignants. Ils y restent pour plusieurs jours. Ils répondent aux questions des nouveaux profs, présentent des stratégies, des solutions à leurs problèmes et partagent le fruit de leur expérience en salle de classe. »
À la salle de classe qu’il faut apprivoiser s’ajoute le défi du déracinement des jeunes enseignants venus du Québec, du Nouveau-Brunswick ou encore de l’Ontario.
Daniel Couture est à la direction de l’École communautaire la Voie du Nord depuis 2015. « Ce n’est pas toujours évident de quitter son milieu, sa famille et son réseau d’amis. Il faut conscientiser les enseignants potentiels dès la phase de recrutement. L’an dernier, notre école a perdu cinq de ses dix enseignants. Il y avait une retraite, trois mutations et un congé de maternité. Lorsque Marco Ratté s’est rendu à la foire des carrières de l’Université d’Ottawa pour faire du recrutement, il a mis ses cartes sur la table. Il faut être ouvert à se rendre en région. Et de faire au moins un an. Ce qui en a découragé certains, mais qui a
aussi renforcé la détermination d’autres. »
Une fois les candidats potentiels identifiés, Daniel Couture a rencontré le groupe, accompagné de Luc Brémault (ancien directeur de l’École Saint Joachim à La Broquerie) : « On les a tous interviewés. Non seulement ceux qu’on cherchait pour Thompson, mais pour toutes nos communautés scolaires. Notre but était d’aider chaque recrue à mieux s’intégrer chez nous. À l’école, certainement, mais aussi dans leur nouveau milieu. Dans le cas de nos cinq recrues de La Voie du Nord, on leur a expliqué où et comment ils pourraient trouver un appartement, ou une maison. Et comment obtenir son permis de conduire du Manitoba et faire immatriculer sa voiture. Un de nos profs est venu avec sa famille. On lui a parlé de notre garderie et des établissements récréatifs à Thompson. Ses deux enfants suivent des cours de natation à la piscine locale. « On accompagne nos recrues tout au long de leur transition, et même après. Mon but est de les intégrer dans la famille de La Voie du Nord. On se rencontre souvent hors de l’école. Pour des soirées karaoké, des parties de quilles et des tournées en motoneige. » Marco Ratté se dit « soulagé » par de tels efforts. « Il faut penser stratégiquement à la rétention. Il faut encourager les directions, mais aussi faire embarquer les communautés. L’an dernier, on est allé voir le CDEM pour en discuter. Maintenant, dans les milieux où c’est possible, on implique les corporations de développement communautaires (CDC). Les CDC aident les recrues à trouver des médecins, du logement, etc. Plus les organismes locaux contribuent à nos efforts, mieux ce sera.
« Je connais d’expérience ce que vivent les nouveaux profs. Surtout ceux en région. Je suis québécois. Quand je suis arrivé au Manitoba dans les années 1980, ma blonde était avec moi. Ce qui m’a aidé énormément. « Plus tard, au début des années 2000, lorsque j’étais directeur à l’École communautaire Saint-Georges, j’ai compris que si un prof était seul, il quitterait l’école après sa deuxième année. Et souvent la profession. Par contre s’ils font trois ans, ils restent. » (1) Voir l’article Le casse-tête du recrutement des enseignants, paru dans La Liberté du 14 au 20 novembre.