Émotions et logique : l’alliance indispensable
Sir Wilfrid Laurier, le deuxième Premier ministre d’importance de la Confédération canadienne, avait coutume de reprocher à ses compatriotes canadiens-français leur propension à vivre dans l’émotion. Les Canadiens français à l’extérieur du Québec, réduits à une mentalité de provincialisés depuis la deuxième moitié du 20e siècle, ont si peu laissé exploser leurs frustrations qu’un Doug Ford pouvait les croire disparus. Avec l’omniprésence des réseaux sociaux du 21e siècle, les cris de justice à l’endroit les Franco-Ontariens ont été même jusqu’à ébranler les convictions de certains Québécois persuadés que la langue française ne peut respirer que dans leur pré carré. Tant mieux. Car la faiblesse de la position du repli est justement qu’elle se fonde d’abord sur des émotions. Un minimum de raisonnement a toujours suffi pour comprendre qu’il est dans l’intérêt vital de tout francophone que sa langue de prédilection puisse se passer d’un respirateur artificiel partout au Canada. Exemple historique à l’appui : Le 4 mai 1944, les députés de l’assemblée législative du Québec (pas encore assemblée nationale) avaient en conscience appuyé à l’unanimité le projet de postes de radio de leurs compatriotes dans l’Ouest. Un exceptionnel geste de solidarité qui avait poussé les Doug Ford du temps à accorder un impensable permis pour permettre un quasi-miracle nommé CKSB, intégré en 1973 dans le réseau de Radio-Canada. Le vieux Laurier n’avait pas tort : les émotions peuvent servir, mais en toute logique elles ne suffisent pas à consolider un avenir.