Le savant mélange des langues chantées au Festival
Pour cette 50e édition, le Festival du Voyageur fait le pari d’essayer de réunir anciennes et nouvelles générations par le biais d’une programmation diversifiée. Avec toujours en point de mire les artistes francophones.
Souvenez-vous, l’année passée, plusieurs francophones s’étaient émus, sur Facebook, du manque de groupes francophones présents dans la programmation du Festival. 118 spectacles avaient eu lieu en anglais, 104 en français et 57 étaient bilingues.
Julien Desaulniers, le directeur artistique du Festival depuis 2013, explique : « L’année passée, ça a été difficile de communiquer quels étaient les groupes francophones. On a eu, par exemple, Sweet Crude qui vient de la Louisiane, qui chante en cajun. Le nom n’évoque pas un groupe francophone. Mais ils chantent en français. À première vue, les gens ne vont pas penser que c’est un groupe francophone. Même chose pour d’autres groupes qui chantent dans les deux langues ou qui font un effort d’insérer des chansons en français dans leur spectacle. »
Cette année, les organisateurs ont mis davantage l’accent sur les groupes francophones. Toujours d’après les chiffres de Julien Desaulniers, la programmation 2019 consiste en 34 spectacles bilingues, 104 spectacles anglophones, 158 spectacles en français. Il préfère parler du nombre de spectacles en français plutôt que du nombre d’artistes francophones. Explications : « Les artistes francophones, on les fait jouer plusieurs fois. C’est donc plus pertinent de parler du nombre de spectacles. Dire qu’il y a plus d’artistes anglophones que francophones, c’est vrai mais ce n’est pas vraiment un bon portrait de ce qu’on fait. Ce qui est important, c’est le nombre de spectacles. Ce sont les opportunités que les gens auront pour voir ces artistes. Entre autres, Nicolas Pellerin, pendant la programmation régulière, joue cinq à six fois sans compter le programme scolaire. »
Sur le site web du Festival du Voyageur (1), la mission de l’organisme à but non lucratif est détaillée : « Faire rayonner la joie de vivre et la francophonie à longueur d’année en créant des expériences artistiques, éducatives, historiques et culturelles inspirées de l’époque des voyageurs. » Large définition. Concrètement, ni quota de groupes francophones, ni un nombre minimum de chansons en français ne lient les organisateurs. Rien non plus dans les contrats avec les artistes.
Cependant, les collaborations entre artistes francophones et anglophones sont vivement encouragées. « C’est la beauté de la musique. Les gens sont là pour la musique en fin de compte. Si ça les rejoint, c’est un succès. Parfois, ces collaborations sont spontanées, parfois elles sont planifiées. Ça fait chaud au coeur quand on voit des collaborations pareilles. »
Julien Desaulniers consulte le 100 NONS ainsi que Manitoba Music pour arrêter ses choix musicaux. « Notre but, c’est de mettre en avant des artistes francophones qui sont prêts à jouer sur une scène professionnelle (2). Parfois j’entends dire qu’il y a des centaines de groupes francophones au Manitoba. Ce n’est pas vrai. La réalité, c’est que dans un milieu minoritaire, il y a un nombre limité d’artistes francophones qui sont prêts pour notre scène festivalière. Un artiste prêt, c’est un artiste qui a sorti un disque, qui a fait des vidéos, qui essaye de faire une carrière. Il y en a un bon nombre au Manitoba, on est fiers d’eux, mais il pourrait y en avoir plus. »
Une autre manière d’encourager ces collaborations entre francophones et anglophones est de les faire se succéder sur scène. Ainsi, par exemple, Alaclair Ensemble, groupe de rap québécois très populaire au Québec, précède The Lytics, groupe de rap originaire de Winnipeg. « Non seulement Alaclair Ensemble va rejoindre un nouveau public anglophone, mais surtout une tente qui peut contenir 700 personnes. Quand j’embauche un groupe et que je vois une tente pleine avec des anglophones et des francophones je sais que j’ai bien fait mon travail. Et quand je vois des anglophones qui apprécient de la musique francophone, je me dis encore plus que le pari est réussi. »
(1) www.heho.ca/fr/a-propos/ (2) Julien Desaulniers précise qu’il y a de la place pour les artistes émergents au CCFM pendant la soirée La Presque Pleine Lune, qui est une collaboration avec le CJP, sans oublier la Soirée Petit Canada le jeudi 21 février 2019, à partir de 17 h, dans le Parc du Voyageur.