L’humanité était prête pour son premier trou noir
Pour le profane, impossible de mesurer à sa juste valeur l’accomplissement des 200 et quelques scientifiques de haut vol qui ont eu la joie de présenter le 10 avril à l’humanité entière la première image d’un trou noir dans une galaxie loin, très loin de notre petite boule bleue. Pour savourer adéquatement, il faut disposer d’un bagage astronomique.
Par contre, il est possible aux moins branchés de saisir d’emblée que l’exploit exigeait une solide équipe formée de gens ultra compétents venant d’un peu partout et bien décidés à travailler sans faille ensemble. Ces scientifiques avaient pleinement conscience que la réussite de leur projet nécessitait d’évacuer toute considération nationaliste. La photo du noyau de la galaxie Messier-87, qui confirme encore une fois la loi de la relativité générale du grand Albert Einstein, représente tellement plus que - mettons le coup d’orgueil des Américains alunissant voilà 50 ans pour laver l’affront soviétique d’un Youri Gagarine faisant en 1961 une petite virée en Spoutnik. Cette fois, aucun président de ci ou empereur de ça a pu se gargariser de patriotiques paroles sur le génie de son bon peuple.
Cette victoire de l’esprit planétaire a été scellée dans la foulée par le nom donné au premier trou noir supermassif jamais observé. Il s’appellera Powehi, un mot hawaïen tiré d’une histoire qui raconte la création du monde et qui signifie source sombre embellie de création sans fin.
Entre la bonté sublime et le mal radical, entre l’alpha et l’omega, entre l’infiniment petit et l’infiniment grand, entre chien et loup, entre un trou noir à 55 millions d’annéeslumières qui gobe tout et nous, voici la perle pour tous : un ancien mot de poète terrestre attendait le dévoilement du phénomène astronomique.