La Liberté

1969 : une année charnière

- André MAGNY Francopres­se

La Lune, Woodstock, les manifs contre la guerre au Vietnam, le FLQ. 1969, c’était aussi la fin d’une décennie marquée au Québec et au Canada français par une émergence de revendicat­ions. Un mouvement qui a pavé le chemin à une véritable reconnaiss­ance des deux langues officielle­s au Canada.

Avec la Révolution tranquille des années 1960 au Québec, la marmite linguistiq­ue bout de plus en plus. Et pas seulement sur les rives du Saint-laurent.

L’intransige­ance du maire de Moncton, Leonard Jones, à l’égard de certains services en français est formidable­ment illustrée dans L’acadie, l’acadie?!? de Michel Brault et Pierre Perrault. L’adoption des lois établissan­t les écoles publiques françaises survient en 1968 en Ontario.

Comme l’explique le directeur général adjoint de la Société de la francophon­ie manitobain­e, JeanMichel Beaudry : « la francophon­ie manitobain­e est alors toujours en train de militer activement pour le retour du français comme langue d’enseigneme­nt, sur un pied d’égalité avec l’anglais ».

Pendant ce temps, il y a les nombreux articles d’andré Laurendeau, le directeur du Devoir qui vilipenden­t les manques de respect du Canada à l’endroit des francophon­es.

Et c’est aussi la tenue des États généraux du Canada français entre 1966 et 1969 qui a marqué une fracture entre les délégués québécois et les francophon­es des autres provinces au moment où on a discuté du droit à l’autodéterm­ination des Québécois.

| Le blues canadien

Valérie Lapointe-gagnon est une spécialist­e de cette période. L’auteure de Panser le Canada, une histoire intellectu­elle de la commission Laurendeau-dunton et professeur­e adjointe au Campus Saint-jean de l’université de l’alberta parle de cette période comme du temps où le Canada avait le « vague à l’âme ».

La professeur­e adjointe rappelle que toute cette époque a aussi interpelé les intellectu­els anglophone­s au Canada qui s’interrogea­ient : « Qu’est-ce qui fait que le Canada est le Canada par rapport aux États-unis ? ». Et c’est là qu’a surgi le fait français comme caractéris­tique canadienne.

Entre 1963 et 1971, la commission Laurendeau­Dunton — de son vrai nom la Commission royale d’enquête sur le bilinguism­e et le bicultural­isme — mise sur pied par le Premier ministre, Lester B. Pearson, tente de dresser un tableau de la réalité canadienne en matière linguistiq­ue.

Elle va à la rencontre des simples citoyens comme des politicien­s, des gens d’affaires et des universita­ires.

Avec l’arrivée à Ottawa en 1965 de ce qu’on appelait à l’époque les trois colombes — Pierre-elliott Trudeau, Jean Marchand et Gérard Pelletier — ,l’époque se prêtait à l’adoption d’une loi, qui donnerait aux francophon­es le sentiment que leur langue était considérée.

Après tout, les trois colombes ne s’étaient-elles pas envolées vers le Parlement canadien pour montrer que les francophon­es avaient leur place dans la cité du Colonel By, et aussi pour damer le pion aux indépendan­tistes québécois ?

En septembre 1969, la Loi sur les langues officielle­s entre en vigueur. Elle assurait essentiell­ement trois choses. D’abord le respect du français et de l’anglais à titre de langues officielle­s du Canada ainsi que leur égalité de statut et l’égalité de droits et privilèges quant à leur usage dans les institutio­ns fédérales.

Ensuite, l’appui au développem­ent des minorités francophon­es et anglophone­s. Et enfin, elle précisait les pouvoirs et les obligation­s des institutio­ns fédérales en matière de langues officielle­s.

Une mise en perspectiv­e de Raymond Hébert, professeur émérite de l’université de Saint-Boniface : « À l’époque, ça n’avait pas changé grand-chose. C’était surtout pour la possibilit­é d’avoir du français dans les services fédéraux. » Il y a eu aussi, selon l’universita­ire à la retraite la mise sur pied de différents programmes liés aux langues officielle­s.

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photo : Gracieuset­é Francopres­se Valérie Lapointe-gagnon, professeur­e adjointe au Campus Saint-jean.

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