La Liberté

DE LEGS DES SOEURS GRISES AU MANITOBA

L’éducation, première mission des Soeurs Grises

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Si les Soeurs Grises sont plus reconnues pour leurs oeuvres dans les domaines de la santé et des services sociaux, rappelons que c’est pour une mission d’éducation avant tout qu’elles sont arrivées au Manitoba en 1844. Grâce à elles, l’éducation en français au Manitoba a pris une certaine permanence.

Des quatre premières soeurs grises arrivées à Saint‐boniface le 21 juin 1844, deux, Sr Coutlée et Sr Lafrance, étaient éducatrice­s de formation. C’est en effet notamment pour répondre à un besoin d’éducation dans la colonie que Mgr Joseph‐

Norbert Provencher avait fait appel à la congrégati­on des Soeurs Grises.

Jean‐ Marie Taillefer, auteur d’une thèse de doctorat sur l’histoire de l’éducation en français au Manitoba, précise : « Avant que les soeurs n’arrivent en 1844, il y avait parfois des prêtres qui venaient pour enseigner deux ou trois ans, mais ensuite, souvent ils quittaient et personne ne reprenait pour plusieurs années. Les Soeurs Grises ont apporté avec elles la garantie d’une éducation à long terme. »

Dès l’été de leur arrivée, les soeurs grises ont commencé à faire la classe dans la résidence de Mgr Provencher. Normand Boisvert, qui a fait une recherche détaillée sur les écoles à caractère francophon­e au Manitoba depuis 1818, indique : « Sr Lafrance enseignait à la classe de illes et Sr Coutlée à celle des garçons. Il y avait 53 élèves au total, qui venaient de Saint‐ Boniface et des environs, encouragés par l’évêque. L’éducation n’était pas obligatoir­e mais Mgr Provencher était très in luent. »

En 1851, les soeurs grises s’installent dans leur nouveau couvent, aujourd’hui Musée de Saint‐boniface. C’est désormais là qu’elles font la classe à Saint‐boniface. En parallèle, d’autres soeurs grises vont s’installer et enseigner à Saint‐françois‐xavier dès 1850, à la demande du curé de paroisse. À la in de 1853, on compte 13 soeurs grises enseignant­es au Manitoba.

Normand Boisvert précise : « Les soeurs grises ont enseigné aux illes et aux garçons jusqu’à l’arrivée des Frères des écoles chrétienne­s en 1854, qui ont fondé l’académie Provencher et ont pris la responsabi­lité de l’enseigneme­nt des garçons. »

Les soeurs grises ont aussi établi un couvent‐ école à Saint‐ Norbert en 1858, puis à Saint‐vital en 1860.

À Winnipeg, les Soeurs Grises ouvrent en 1869 ce qui est aujourd’hui l’académie Sainte‐marie pour éviter de perdre leurs élèves du côté ouest de la rivière Rouge.

Jean‐ Marie Taillefer explique : « Les Soeurs Grises ont appris qu’une école anglophone protestant­e allait ouvrir de l’autre côté de la rivière, ce qui les a décidées à ouvrir une autre école pour

les francophon­es de Winnipeg. Elles y ont d’ailleurs aussi accueilli des enfants de familles protestant­es, qui préféraien­t la qualité d’éducation des Soeurs Grises. »

La même année, Normand Boisvert raconte qu’elles ont « construit une maison derrière leur couvent de Saint‐boniface pour l’enseigneme­nt des illes car le couvent était trop peuplé. C’est en quelque sorte la première école au Manitoba ».

Très vite, le nombre grandissan­t d’écoles et surtout d’élèves rend la mission d’éducation dif icile pour les Soeurs Grises. En 1874, les Soeurs des Saints‐noms‐de‐jésus‐et‐marie (SNJM) arrivent en renfort, ce qui n’empêche pas les Soeurs Grises de rester impliquées dans l’éducation en français au Manitoba jusqu’en 1970.

« Les soeurs grises étaient présentes dans plusieurs villages au rural, comme La Broquerie, Lorette, Richer ou encore Sainte‐ Anne », précise Jean‐marie Taillefer. Normand Boisvert ajoute : « Elles se sont aussi toujours occupées de l’éducation des orphelines, ainsi que des enfants malades à l’hospice Taché. » En in, les soeurs grises ont assuré la formation des enseignant­s à l’école normale jusqu’en 1899.

L’un des plus grands impacts des religieuse­s dans l’éducation au Manitoba a été pendant le régime de la loi Thornton qui avait aboli le français et la religion avant 15 h 30 dans les écoles. Jean‐marie Taillefer : « Les soeurs ont fait i de la loi. Elles ont continué d’enseigner en français dans leurs écoles. Elles ont pris un risque. C’est grâce à elles si le français a non seulement survécu pendant toutes ces années, mais de plus qu’il a continué de grandir, de même que la religion catholique. »

Par ailleurs, les Soeurs Grises du Manitoba ont enseigné dans des écoles et des paroisses de Saskatchew­an, d’ontario, du Grand Nord et des États‐unis (Minnesota et Dakota du Nord), mais aussi d’amérique latine (Colombie et Brésil).

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Normand Boisvert
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Jean-marie Taillefer
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