Le temps des Grecs, la forêt et le carré civique de Saint-boniface
Les anciens Grecs vivaient avec trois sortes de temps, trois temporalités qui se mélangeaient et cohabitaient dans un même monde.
Le temps s’appelait d’abord chronos, en référence lointaine à ce Titan qui dévorait ses enfants. Ce nom met en avant le caractère destructeur du temps : le tempschronos emporte tout, rien ne lui résiste.
Le temps était aussi nommé aiôn, pour l’épaisseur l’emporte sur le passé et le futur et les remplit de son contenu.
Avec le kairos, le temps devenait celui de l’opportunité, le temps de l’évènement qui marque une rupture avec le passé et qui instaure un nouveau futur. Le temps- kairos est ce moment propice qu’il faut savoir discerner grâce à la prudence. et à l’occasion duquel il faut poser un geste fondateur. Cette triplicité du temps offre une grille l’ancienne caserne de pompiers ainsi que l’ancien hôtel de ville de Saint-boniface. Depuis longtemps déjà, ces deux édifices oscillent entre deux temporalités.
Pour plusieurs, ils font partie du tempsaiôn : ils appartiennent au patrimoine éternel de cette francophonie qui a su établir ses droits et sa sécurité. Mais pour la Ville de Winnipeg, et pour bien d’autres encore, ces structures font très clairement chronos : celui qui les érode toujours un peu plus d’année en année et dont l’usure doit être contrée par des coûts Leur vente, qui n’est d’ailleurs pas encore assurée, à l’organisme Manitoba Possible, s’avère une formidable provocation. Car au-delà d’une provocation envers une communauté, c’est le temps lui-même qui est convoqué. Les choses bougent : il y aura un avant et un après. Le temps est mûr pour le kairos. Ce kairos qui n’arrive pas toujours de la manière dont on l’aurait souhaitée. Mais il arrive, peu importe.
Le carré civique de Saint-boniface a été élevé marquants. Mais comme le temps- chronos tout à fait bénéfique que son éternité soit refaçonnée par ce nouveau kairos il ne faudrait surtout pas céder à la nostalgie d’un moment idéalisé.
La culture francophone de Winnipeg a changé. Si bien que pour plusieurs francophones arrivés plus récemment à Winnipeg, le carré civique, au-delà de son précise.
L’actuelle provocation a au moins l’avantage de sensibiliser plusieurs citoyens et citoyennes quant à la valeur symbolique de l’ancienne caserne et de l’ancien hôtel de ville. Et, surtout, de nous rappeler l’importance de ne pas les livrer complètement au temps- chronos, c’est-à
Que commande la prudence lorsque se présente le kairos? Elle commande de retourner le kairos à notre avantage, à le dompter pour qu’il nous serve. Au stade où les choses en sont, des pourparlers avec Manitoba Possible ne peuvent pas être exclus. Ces gens représentent aussi des intérêts importants, ceux d’un autre groupe vulnérable, encore plus vulnérable que la francophonie au Manitoba sous bien des aspects. Il est certain que plusieurs francophones en situation de handicap
Le carré civique de Saint-boniface ne doit pas devenir l’arbre qui cache la forêt. La forêt, c’est bien la culture francophone de Winnipeg et c’est elle qui doit primer et se perpétuer au travers des gens qui la font futures.
La bureaucratie municipale aura bien plus de mal à couper un arbre si elle sait qu’il diversifiée. Être une forêt, penser comme une forêt, trouver la façon de participer à sa biodiversité et savoir aussi inclure ce qui vient de l’extérieur et qui pourra y contribuer, voilà ce qu’exige le kairos.