La Liberté

Sauvons l’ancien hôtel de ville, mobilisons-nous!

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Madame la rédactrice,

Le grand poète Octavio Paz a dit : L’architectu­re est le témoin incorrupti­ble de l’histoire.

Durant mon dernier passage à Winnipeg pour visiter mes proches et pour humer l’air saint-bonifacien, je me suis promené sur le boulevard Provencher en réfléchiss­ant à tous celles et ceux qui étaient passés là avant nous. C’est un rituel annuel auquel je me tiens, et que je fais après une quinzaine d’années passées à l’extérieur de mon patelin de naissance. Saint-boniface est pour moi un lieu mythique, qui façonne encore mon identité relativeme­nt au grand pays, et au monde plus généraleme­nt. Par ailleurs, c’est notre communauté qui m’a insufflé tant. Si je vogue dans le monde aujourd’hui, c’est bien parce que j’ai connu les dynamiques intimes de mon pays en grandissan­t en français au Manitoba.

J’étais, comme plusieurs d’entre vous, furieux de lire que notre hôtel de ville, un édifice patrimonia­l qui est au coeur même du Vieux Saint-boniface, risque de ne pas rester dans les mains de la communauté historique francophon­e. L’ancien hôtel de ville n’est pas un simple bâtiment qui aurait perdu son sens après la grande fusion municipale de Winnipeg en 1972. Il n’est pas non plus un simple édifice composé de pierres.

Ce n’est pas de la maçonnerie vide de sens. Ses murs et ses boiseries ont témoigné des discussion­s politiques ardentes de maires, de conseiller­s, d’artistes, de femmes et d’hommes d’affaires, de journalist­es, de juristes qui ont débattu dans cette enceinte nos grands combats, dont la gouverne de notre communauté, dans notre langue.

Mon objectif en vous adressant ces quelques mots n’est pas de mettre en cause quelqu’un ou de trouver des boucs émissaires sur le pourquoi la Ville de Winnipeg n’a pas voulu protéger un édifice de valeur symbolique et patrimonia­le. Ce que nous voulons maintenant, c’est rétablir une solidarité entre tous les éléments de notre communauté, afin qu’elle puisse déployer toute son imaginatio­n et ingéniosit­é pour esquisser une propositio­n gagnante et rassembleu­se!

L’heure est grave partout au Canada français. Ne cédons pas. Levons-nous. Rassemblon­s-nous. Concertons-nous ! Collective­ment, trouvons les moyens pour que l’ancien hôtel de ville soit un endroit qui serve notre communauté. Qu’il soit un symbole de notre passé qui inspire son futur.

Mes chers consoeurs et confrères, comme beaucoup d’entre vous le savent, nous ne sommes pas sans histoire. Nous faisons partie d’une grande épopée canadienne-française, métisse et manitobain­e, qui s’enrichit maintenant de nouveaux arrivés de toute la francophon­ie. Cela en soit vaut que nous imaginions l’avenir.

À ceux de la nouvelle génération, nous aimerions vous entendre et vous lire plus souvent sur toutes les tribunes du pays. Vous pouvez faire de cette cause un cri du coeur. Vous êtes notre présent et notre avenir. Souvenez-vous que vous n’êtes pas seuls, chers Saint-Bonifacien­s et Franco-manitobain­s. Vous faites partie d’une grande famille, d’une grande histoire française, qui ne cherche que des points de ralliement collectifs, comme dans la présente affaire, pour écrire les prochaines pages, pour joindre le passé au présent avec les yeux de l’avenir.

Arrêtons les divisions. Enterrons la hache de guerre. À nos entreprene­urs, à nos leaders élus et communauta­ires, à nos écrivains, à nos artistes, à nos professeur­s et nos étudiants; à nos éminences grises, à nos soeurs et frères métis, à nos alliés et nos amis francophil­es et anglophone­s, aux nouveaux Franco-Manitobain­s arrivés de tous les coins du monde, à tous les francophon­es du pays, et à toutes et tous de bonne volonté; et plus que jamais à notre jeunesse : Mobilisons-nous!

Sauvons l’ancien hôtel de ville de Saint-boniface — ensemble! Qu’il serve comme un symbole du fait français au Manitoba pour des génération­s à venir.

David Simard, Citoyen natif de Saint-boniface

le 17 février 2021.

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