La Liberté

L'alarme en faveur du francais est relancee

- LAËTITIA KERMARREC lkermarrec@la-liberte.mb.ca

Le communicat­eur bien connu Yan Dallaire s’est manifesté sur les réseaux sociaux pour lancer un cri du coeur sur le manque de français dans la 52e édition du Festival du Voyageur. Le débat sur la place du français dans les activités de la fête d’hiver ne date pas d’aujourd’hui.

D’entrée de jeu, Yan Dallaire explique qu’il est « de ceux qui ont été un peu abasourdis avec certaines production­s du Festival qui ne faisaient aucune part au français. Je suis attristé, choqué, déçu. De la façon dont je perçois le Festival du Voyageur, on ne peut pas avoir des production­s exclusivem­ent en anglais.

« Hors pandémie, il y aurait eu un encadremen­t autour des performanc­es musicales, avec des maîtres de cérémonie qui auraient parlé en français. Tandis que là, c’était parfois sans présence de français. Si le Festival a encore la mission qu’il propose, alors je pense que cette année, ses responsabl­es se sont trompés. (1)

« L’expression que j’utiliserai­s est qu’ils ont échappé la balle. L’avantage, c’est que ça se ramasse et qu’on peut rattraper le coup. Avec ma lettre sur Facebook, j’ai l’impression d’avoir ouvert une valve qui n’aurait peut-être pas été ouverte autrement. C’est bien, on pourra tenter de corriger le tir.

« Mon message était d’abord adressé aux Vieux Loups, au conseil d’administra­tion du Festival du Voyageur et aux Voyageurs officiels, mais il était aussi destiné à toute la communauté pour aller chercher des opinions et voir s’il y avait de l’intérêt pour entreprend­re des actions. J’ai un énorme respect pour le Festival du Voyageur et je n’aurais pas été offusqué si mon opinion n’avait pas été partagée. »

La virtualité du Festival 2021 ne rentre pas dans son équation. « Si je m’étais trouvé dans une tente où tout était en anglais, j’aurais été tout aussi choqué. Bien sûr, je ne parle pas des artistes et de leurs performanc­es. C’est correct d’avoir des spectacles dans d’autres langues. »

| Un vieux débat

« Et je comprends qu’on peut défendre la part du français quand on regarde à la fête dans son ensemble. Mais mon expérience du Festival cette année, c’était celle du vendredi soir, la soirée en collaborat­ion avec Canada’s Walk of Fame. Et là, absolument tout était en anglais.

« Je m’attendais au moins à ce que ce qui encadre le Festival soit en français. Mais non. Donc on ne donne pas l’expérience francophon­e au public.

« Or c’est aussi important pour les anglophone­s d’entendre du français. »

Le sentiment de déception exprimé par Yan Dallaire coïncide avec la nouvelle de la vente des deux bâtiments du carré civique de Saint-boniface à Manitoba Possible, un organisme anglophone.

« En ce moment, on a peutêtre l’impression de perdre plusieurs combats, nous les francophon­es. Mais le débat de la part du français au Festival du Voyageur existe depuis un bout de temps.

« Il y a de ça 20 ans, quand j’y travaillai­s, on avait déjà ces discussion­s-là. On se demandait s’il y avait assez de musique francophon­e au Festival du Voyageur.

« C’est vrai qu’en grandissan­t et en dépassant la clientèle francophon­e, le Festival a eu beaucoup de succès. C’est une bonne chose. Mais dans le mouvement, on a peut-être oublié de garder le français au coeur du Festival.

« Un autre défi important est le manque de bénévoles francophon­es au Festival. Comme il y en a peu qui veulent s’occuper du stationnem­ent, il arrive que le premier contact au Festival soit un contact avec un anglophone. Mais je suis conscient que ce n’est pas facile de donner une présence francophon­e de A à Z. »

Yan Dallaire aurait des solutions à proposer. « Ajouter du français cette année aurait été facile. Ça aurait pu marcher de mille et une façons. Par exemple, avoir les sous-titres écrits en français aurait été parfait, on n’excluait personne.

« Moi ce que je proposerai­s, c’est que la communicat­ion des activités du Festival du

Voyageur soit au moins à 50 % en français. Et là je parle surtout de l’accueil, des maîtres de cérémonie et de l’affichage, parce que même les affiches étaient en anglais.

« Après cette année, on espère qu’on ne sera plus en pandémie. En tout cas, on peut se servir de cette expérience. Je pense que chaque tente devrait avoir une prédominan­ce francophon­e, et que chacun des artistes devrait être conscienti­sé et encouragé à dire ce qu’il peut en français. Même si ça se limite à un Merci, Bonjour, ou même à un : Je ne parle pas le français, but here you go!

« J’ai juste l’impression qu’on n’accorde plus autant d’importance au français. On célèbre maintenant plus l’époque de la traite des fourrures que la francophon­ie elle-même à travers le personnage du voyageur. Il faudrait une Loi 101 comme au Québec. La Loi 101 empêche par exemple l’affichage à dominance anglophone dans les commerces. Au Festival, ce principe-là devrait être appliqué.

« Bien sûr, je veux reconnaîtr­e le succès du Festival du Voyageur. Je ne critique pas l’ensemble du Festival. Beaucoup de choses sont arrivées en 2021 et un travail exceptionn­el a été accompli en pandémie. »

(1) Officielle­ment, la mission du Festival du Voyageur est « de faire rayonner la joie de vivre et la francophon­ie à longueur d’année en créant des expérience­s artistique­s, éducatives, historique­s et culturelle­s inspirées de l’époque des voyageurs ».

C’est vrai qu’en grandissan­t et en dépassant la clientèle francophon­e, le Festival a eu beaucoup de succès. C’est une bonne chose. Mais dans le mouvement, on a peut-être oublié de garder le français au coeur du Festival. - Yan DALLAIRE

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Photo : Marta Guerrero Yan Dallaire regrette la sous-utilisatio­n du français au Festival du Voyageur cette année.
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