Une occasion d'afficher une presence moderne
Pour Nathalie Kleinschmit, gérante et coach d'artistes, les débats nés autour du manque de français au Festival du Voyageur doivent pousser à la réflexion sur les choix à faire pour rester en résonance avec le monde actuel.
«Moi, j’ai adoré le Festival du Voyageur cette année. Je trouve vraiment louable que le Festival ait trouvé une façon de nous réunir si rapidement. Est-ce que c’était parfait? Non. Il faut savoir qu’on est vraiment en train d’apprendre sur le tas quant à savoir comment rejoindre le public sur le plan virtuel.
« Hors pandémie, il y avait plusieurs programmations en même temps et on pouvait choisir. J’ai passé des journées au Festival où je suis restée dans une tente à écouter des musiques surtout anglophones, parce que c’est ce que je voulais entendre à ce moment-là.
« Puis d’autres où j’ai choisi de rester dans une tente à écouter des musiques francophones.
« En virtuel, on avait un seul choix par soir. Quand on regardait sur l’ensemble du Festival, il y avait des offres pour tout le monde. Mais si on ne voyait pas tout, on pouvait se sentir exclu. Le mieux aurait été d’avoir le budget pour faire deux shows en même temps. Un francophone d’un côté, et un avec des musiques du monde de l’autre, par exemple.
« Maintenant, si la critique est que la programmation du Festival du Voyageur était trop anglophone, je dis que croire que le Festival du Voyageur n’appartient qu’aux francophones est une erreur.
« De plus, on oublie qu’avec le format virtuel, on peut rejoindre l’extérieur.
« Par exemple, je suis la gérante de l’artiste Kelly Bado qui a ouvert le Festival du Voyageur le premier soir. Son concert a été vu partout! Il va falloir du temps pour s’adapter au paradoxe du virtuel.
« Et pour ma part, je trouve qu’en tant que francophone, on s’y retrouvait. J’ai eu plusieurs moments où je me suis dit : Ah là, je suis au Festival du Voyageur! Par exemple pendant la soirée du Petit Canada, où on pouvait voir ces jeunes familles toutes fières avec leur ceinture fléchée. Ou pendant la soirée Bingo avec Johanne, présentée par Benoit Morier.
Pour ce qui est de la famille officielle du Festival du Voyageur, Nathalie Kleinschmit trouve qu’elle devrait évoluer.
« Pour le futur peut-être, on pourrait laisser la famille officielle parler en français avec des sous-titres en anglais. Mais surtout, ce que je voudrais vraiment, c’est voir évoluer la représentation de cette famille, tout en gardant les valeurs de persévérance et de joie de vivre.
« Ce pourrait être une famille de couleur ou un couple gay. Et il faudrait arrêter de présenter la famille nucléaire traditionnelle avec le papa, la maman et les enfants.
« On pourrait avoir des enfants adoptés ou des familles recomposées. Pour qu’à la fois on célèbre le passé, tout en regardant vers le futur. Parce que là, ça ne me parle plus. »
Nathalie Kleinschmit estime que beaucoup d’inquiétudes sur la place des francophones dans la société remontent à cause de la pandémie.
« On ne peut pas exclure ce contexte, qui fait ressortir les démons. Et la peur de perdre notre langue en est un. Mais personnellement, je vois que notre francophonie est forte.
« Les débats actuels doivent nous pousser à la réflexion pour faire le point sur ce qui est important pour la communauté, et ce qu’on doit faire pour avancer.
« Parce qu’il ne faut pas que la francophonie soit une manière d’exclure non plus. Certains sont trop extrêmes aussi.
« Notre communauté est menacée par le fait qu’on l’oublie. Je pense notamment au carré civique de SaintBoniface. Le vrai débat est là. Il faut que nous continuions cette conversation et que nous soyions dans l’écoute et l’envie de grandir ensemble pour exister aux yeux des autres. »
Les débats actuels doivent pour faire le point sur ce qui est important pour la communauté, et ce qu’on doit faire pour avancer. - Nathalie KLEINSCHMIT