LE MESSAGE D’UNE MILITANTE AGUERRIE
L’affaire de la relocalisation du centre de services bilingues de Service Canada à Saint- Vital a ramené chez l’ancienne sénatrice Maria Chaput une conviction forgée au fil de ses décennies de lutte : pour assurer leurs services, les francophones doivent toujours rester sur la brèche.
Depuis une trentaine d’années, le nom de Maria Chaput est associé à la défense et au développement des services en français. Pour la militante, la décision de Service Canada de relocaliser ses locaux de Saint-vital à River Heights est incompatible avec l’esprit et la lettre de La Loi sur les langues officielles.
Comme francophone engagée, l’ancienne sénatrice Maria Chaput regrette d’avoir dû apprendre la fermeture du centre de SaintVital par les médias.
« Dès que la Société de la francophonie manitobaine a été informée par le Fédéral, j’aurais aimé qu’ils en parlent tout de suite par voie de communiqué.
« On aurait dû le savoir dès ce moment-là. Je comprends que c’est épuisant de toujours revendiquer.
« Mais on ne peut pas se permettre de se laisser aller lorsqu’on est une personne de langue officielle qui vit en contexte minoritaire.
« Partir s’installer dans un quartier qui n’est pas désigné bilingue, et qui compte peu de francophones, ça ne fait pas de sens. Si on n’utilise pas les services en français, les services ont vocation à mourir.
« Ces services bilingues viennent logiquement s’ajouter aux écoles françaises, aux activités en français. Ils sont là pour permettre une pleine vie en français dans un certain quartier. »
Maria Chaput parle en connaissance de cause. La native de Sainte-anne est de longue date une militante pour l’épanouissement de la francophonie canadienne.
« Pendant longtemps auparavant, et puis en tant que sénatrice de 2002 jusqu’en 2016, j’ai oeuvré pour que les ministères fédéraux assurent leurs services en français dans la province.
« C’est donc important que ces centres soient situés là où il y a des francophones qui vont pouvoir réclamer les services. Si on les installe dans des quartiers où il y a très peu de francophones, ça les décourage quasiment d’avance à demander le service en français. Déjà rien que par le manque de signalisation de l’offre active.
« Il y avait tellement de réticences de la part des ministères à installer ces centres. Patrimoine canadien a dû travailler fort, parce que trop de gens ne comprenaient pas l’importance d’avoir des services en français.
« Et les francophones, eh bien ils étaient tannés de revendiquer encore et toujours. Parce qu’ils voyaient clairement le manque de volonté politique de la part du gouvernement fédéral.
« Mais il y avait aussi de la résistance du côté des syndicats dans la province. Ils ne comprenaient pas la justification de remplacer une personne anglophone par une francophone.
« Certaines personnes n’ont jamais accepté de transférer d’emploi ou de le partager avec une personne francophone dans ces services, parce qu’elles se disaient : Pourquoi se casser le cou quand le pourcentage de francophones est si faible? »
Or Maria Chaput en a toujours été convaincue : les francophones sont plus nombreux que les chiffres officiels.
« Il était clair que les questions posées par Statistique Canada n’étaient pas adéquates pour identifier correctement les francophones.
« Il fallait aussi revoir la définition de ce qu’était un francophone. Pour y arriver, ça prenait un projet de loi. J’ai eu le meilleur cadeau du ciel pour m’aider dans cette tâche : l’ancien juge de la Cour suprême du Canada, Michel Bastarache. Il m’avait proposé de rédiger le projet de loi.
« En parallèle des discussions que j’avais sur mon projet de loi, la Fédération des communautés francophones et acadienne du canada faisait du lobbying pour changer les règlements sur la Loi sur les langues officielles afin de renforcer son application.
« D’ailleurs, dans le prolongement de mon travail, la sénatrice Raymonde Gagné a participé au comité spécial mis sur pied par le Conseil du Trésor pour voir à la révision des règlements de la Loi sur les langues officielles.
« Parce que mon projet de loi n’a jamais été adopté, certains pensent que je n’ai eu aucune victoire. Mais j’ai semé des graines dans plusieurs esprits. À commencer par Statistique Canada, qui a ajouté de nouvelles questions pour obtenir un meilleur portrait de la francophonie canadienne.
« Et puis aussi, la Province du Manitoba a changé sa définition d’un francophone dans sa Loi sur l’appui à l’épanouissement de la francophonie manitobaine. »