UNE GUERRE QUI RÉSONNE AU MANITOBA
UNE GUERRE À VISAGE HUMAIN
Je me sens mentalement fatigué, frustré et déprimé. Je n’ai pas assez de mots pour expliquer ce que je ressens. - Andrii Matveiev
Lorsqu’une guerre est déclarée, les premières victimes sont les civils du pays dont le quotidien se voit bouleversé du jour au lendemain. Andrii Matveiev, originaire de Kharkiv est au Canada depuis 2012, il témoigne de son ressenti face à l’invasion de son pays et aux dangers auxquels sa famille est exposée.
Kharkiv se situe dans l’est de l’ukraine proche de la frontière russe. Cette ville, la deuxième plus grande d’ukraine, est survolée nuit et jour par des avions russes comme le témoigne Andrii Matveiev dont le père, les frères, la tante et d’autres membres de sa famille se trouvent encore là-bas. « Kharkiv a été attaquée dès le premier jour de l’invasion russe, le 24 février. C’était insoutenable et très peu sûr pour ma famille de rester à Kharkiv. « Lorsque je téléphonais à ma tante, j’entendais les explosions et elle me disait qu’elle entendait les avions voler juste au-dessus de sa tête.
« Ma mère était venue me visiter lorsque l’invasion a commencé. Il y a une part de moi qui était soulagée qu’elle soit là pour lui éviter d’être sur place pendant les attaques. Depuis, toute ma famille, exceptée mon plus grand frère, a quitté Kharkiv.
« Mon père, sa femme, et mon petit frère sont en train de venir au Canada. En date du 10 mars, ils étaient toujours en Ukraine, j’espère qu’ils pourront me rejoindre bientôt. »
Le gouvernement fédéral a d’ailleurs fait savoir par voie de communiqué en date du 3 mars 2022 qu’il accueillerait un nombre illimité d’ukrainiens et qu’ils seront priorisés dans les volets d’immigration en plus d’ouvrir une nouvelle voie pour eux. Les visas auront une durée de deux ans.
Andrii Matveiev exprime d’ailleurs sa reconnaissance envers le Canada. « J’ai été très touché et ému par la réaction et le soutien apportés par les Manitobains, les Canadiens et même par plusieurs pays dans le monde.
« Cependant, j’aimerais voir plus d’appui dans la protection du ciel ukrainien car c’est quelque chose que l’ukraine a demandé à plusieurs reprises. Je me sentirais plus rassuré si le gouvernement canadien pouvait apporter son aide sur cette question. »
Début mars, les Alliés de L’OTAN avaient rejeté la demande de Kyiv de créer une zone d’exclusion aérienne en Ukraine. Une zone d’exclusion aérienne est une mesure visant à empêcher tout survol aérien et par conséquent à empêcher les bombardements sur la population civile dans une zone définie.
D’ailleurs la population civile a été prise à partie dans cette guerre puisque plusieurs ont dû prendre les armes pour défendre leur pays dont les hommes de 18 à 60 ans. Une pensée qui hante l’esprit d’andrii Matveiev. « J’ai fortement pensé à aller en Ukraine pour me battre, j’y pense encore tous les jours. Je pense que tout le monde voudrait prendre part à la défense de son pays en cas d’attaque.
« Il faut être réaliste. Pour défendre son pays, il faut être un professionnel. Il y a déjà beaucoup d’hommes mobilisés sur les combats dont mon grand frère. Donc je pense que chacun doit aider comme il peut de là où il se trouve. Les gens peuvent envoyer de l’aide alimentaire, de l’argent, peu importe à quel point cela paraît minime, chaque geste compte. »
Bien qu’il essaye d’apporter de l’aide à son échelle, Andrii Matveiev reste émotionnellement impacté par cette guerre. « C’est incomparable avec tous les sentiments que j’ai pu connaître jusque-là. Savoir que mon pays est attaqué et envahi, car il faut le dire ce n’est pas un conflit, mais bel et bien une invasion. Je me sens mentalement fatigué, frustré et déprimé. Je n’ai pas assez de mots pour expliquer ce que je ressens. »
Si Andrii Matveiev tient à être aussi clair sur les termes, c’est qu’il côtoie de près la propagande russe. « J’ai essayé de joindre de la famille éloignée en Russie pour leur montrer les dégâts que subissait mon pays. Mais ils étaient trop atteints par la propagande russe. J’ai donc décidé de couper les liens avec eux.
« J’ose croire que tous les Russes ne sont pas atteints par cette forte propagande. »
Depuis le 4 mars 2022, le Parlement russe a adopté une loi visant à sanctionner jusqu’à 15 ans de prison toute personne, média, russe ou étranger qui propagerait des « informations mensongères sur l’armée ». À la suite de cette annonce, des dizaines de journalistes étrangers basés en Russie ont quitté le pays.