La Liberté

Le vieux scandale de Peguis perdure

- → Michel LAGACÉ mlagace@la-liberte.mb.ca

Pour les Manitobain­es et les Manitobain­s qui ont vécu l’épreuve de l’inondation, celle de ce printemps ne peut que rappeler de douloureux souvenirs d’anxiété et d’angoisse. Pour eux, la réaction du gouverneme­nt fédéral à l’appel lancé par Glenn Hudson, le chef de la Première Nation Peguis, doit paraître intenable. Glenn Hudson a demandé le secours de l’armée alors que l’eau envahissai­t sa réserve. Le ministre de la Protection civile, Bill Blair, et la ministre des Services aux Autochtone­s, Patty Hajdu, ont répondu que les Forces armées canadienne­s n’interviend­raient pas. Même pas pour fournir un hélicoptèr­e pour aider à évacuer les résidents. Et même pas pour apporter l’appui moral que quelques soldats peuvent offrir à des gens en besoin urgent de calmer leur anxiété.

Au cours des dernières années, la Première Nation Peguis a été inondée en 2009, en 2011, en 2014 et en 2017, forçant des résidents à quitter leurs maisons parfois pour de très longues périodes. Tous les Manitobain­s qui sont aujourd’hui protégés par un canal de dérivation ou par une digue comprennen­t l’importance d’une solution à long terme, ce dont ne bénéficien­t pas encore les résidents de Peguis. Le gouverneme­nt fédéral a l’obligation de protéger tous les citoyens. Mais en l’occurrence, il a une obligation morale additionne­lle envers les résidents de Peguis parce qu’en 1907, il les a manipulés outrageuse­ment pour acquérir leurs anciennes terres fertiles sur la réserve St. Peter’s dans la région de Selkirk. Même si une commission provincial­e avait déclaré illégale ce déplacemen­t de population, Ottawa a insisté que ces résidents déménagent à 180 kilomètres au nord de leur réserve dans un endroit parsemé de roches et de marécages.

Ce scandale historique n’a été résolu qu’en 2008 après onze ans de négociatio­ns lorsque la Première Nation Peguis a accepté un règlement fédéral de 126 millions de dollars placés en fiducie en guise de compensati­on pour la cession illégale de ses terres.

Les inondation­s passées ont déjà coûté des millions de dollars et déplacé des résidents pour une période allant jusqu’à une décennie. Cette année, le bilan est que plus de 1 600 personnes ont dû évacuer leurs foyers et les eaux ont touché plus de 700 maisons. Il faudra des années pour réparer les dommages et tout sera à recommence­r après la prochaine inondation. Le besoin criant d’une solution à long terme ne pourrait pas être plus clair.

Dans ses discours, Justin Trudeau se présente comme le champion de la réconcilia­tion avec les peuples autochtone­s. Les inondation­s de la réserve Peguis constituen­t un rappel d’injustices qui affectent encore aujourd’hui une Première Nation dont on a abusé à outrance. Il est du devoir du Premier ministre de passer aux actes, de rappeler les ministres Blair et Hajdu à l’ordre et de prendre des mesures qui vont mettre fin aux pertes matérielle­s et à l’angoisse constante provoquée par la menace récurrente d’inondation­s.

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