La Liberté

Pour être enfin moi-même

Jay Campagne organise le 23 septembre, au TCM, un prélèvemen­t de fonds sous forme de social, pour financer sa chirurgie d’affirmatio­n de genre. Une étape transforma­tive et essentiell­e de sa vie, que iel (1) a accepté de partger avec La Liberté.

- Ophélie DOIREAU odoireau@la-liberte.mb.ca Initiative de journalism­e local Réseau.presse-la Liberté

Chaque personne transgenre a sa propre histoire. Jay Campagne a fait le choix de poursuivre sa transition avec une torsoplast­ie, une opération chirurgica­le qui lui permettrai­t, enfin, de se sentir véritablem­ent libre.

Jay Campagne souhaite sensibilis­er sur l’importance des chirurgies d’affirmatio­n de genre, quand on est personne transgenre. « Je ne me sens pas bien dans ma peau. Cette chirurgie va me permettre de vivre pleinement qui je suis et être confortabl­e dans ma peau.

« Aujourd’hui, la dysphorie de genre est assez prédominan­te dans ma vie, ce qui n’est vraiment pas facile à gérer. »

Il faut savoir que d’une province à l’autre, les opérations et les médicament­s ne sont pas pris en charge de la même manière. Le Manitoba exige un diagnostic médical de dysphorie de genre pour les procédures d’affirmatio­n du genre, y compris l’hormonothé­rapie. Les opérations couvertes au Manitoba sont : la masculinis­ation de la poitrine, l’hystérecto­mie et l’ovariectom­ie, la métoïdiopl­astie, l’orchidecto­mie, la pénectomie, la vaginoplas­tie (2), la thérapie vocale féminisant­e et l’épilation au laser.

Cependant, Jay Campagne a fait le choix d’avoir sa torsoplast­ie en Ontario.

« Les chirurgien­s manitobain­s ne sont pas spécialisé­s dans ce type de chirurgies, c’est-à-dire qu’il y a des chirurgien­s et Santé Manitoba leur demande de faire des chirurgies d’affirmatio­n du genre. Mais ils n’ont pas forcément d’expérience avec les personnes transgenre­s.

« Ce manque de compétence­s fait qu’on se retrouve avec des chirurgien­s qui n’utilisent pas les bons pronoms, le bon prénom. On ne se sent pas en sécurité alors que c’est très important d’avoir confiance en son médecin.

« De plus, avec l’arriéré de chirurgies causé par la pandémie, la liste d’attente pour une chirurgie d’affirmatio­n du genre est longue, presque six ans d’attente, parce que c’est considéré comme une chirurgie élective. »

| Des médecins ouverts aux personnes LGBTQ2S+

Le système médical manitobain semble donc en retard sur ce qu’il considère comme non urgent. Pourtant, la santé mentale des personnes transgenre­s est bel et bien en jeu. « Je ne peux pas imaginer attendre six ans dans ce corps. Je ne sais même pas si je serais encore là. C’est pourquoi cette opération est vitale pour moi. »

Des mots forts qui semblent nécessaire­s pour éveiller les conscience­s des profession­nels de la santé, Jay Campagne le souligne. « Les médecins manquent tellement de formation sur la santé des personnes LGBTQ2S+. Pas seulement sur la chirurgie. Mais tout simplement sur les hormones, sur la santé sexuelle. Trouver un médecin de famille ouvert aux LGBTQ2S+, c’est difficile. Je suis sur liste d’attente depuis dix mois. Sans médecin de famille, je vais à la Trans Health Klinic. »

À cette dimension s’ajoute la question de la langue française. « On dirait qu’un médecin francophon­e spécialisé dans le domaine LGBTQ2S+ n’existe pas. »

| Collecte de fonds

Après avoir exposé la situation actuelle au Manitoba, Jay Campagne explique la nécessité d’une collecte de fonds. « Mon évènement porte le nom de Boob Voyage, c’est un prélèvemen­t de fonds qui ressemble à un social. Il va donc y avoir une représenta­tion drag avec Miss Assuma Gender et Dirt, un encan silencieux, de la musique assurée par Stéphane Oystryk, un 50/50 et toutes sortes de choses!

« Grâce à la générosité du Théâtre Cercle Molière (TCM), l’évènement aura lieu dans tout le théâtre, c’est-àdire autant dans le foyer que dans le grand théâtre. Pour toute la logistique, l’équipe a généreusem­ent accepté de me donner gratuiteme­nt le théâtre pour toute une soirée. Je me sens chanceux·se, ça me touche le coeur. Le bâtiment peut accueillir près de 500 personnes et j’espère qu’on sera 500 (rires). »

Si Jay Campagne espère qu’il y aura autant de personnes que possible c’est parce qu’iel doit amasser au minimum la moitié de la somme nécessaire pour son opération.

« Au total, la chirurgie va coûter 15 000 $. J’ai besoin de récolter au minimum 7 500 $ pour payer les premiers frais. L’opération aura lieu au mois de décembre. Les 15 000 $ vont servir à couvrir les frais post opératoire­s, les médicament­s pour la douleur, mais aussi l’avion pour me rendre en Ontario, l’hôtel, la nourriture. Après l’opération, je ne vais pas pouvoir travailler pendant huit à 12 semaines. Mais il faut continuer de payer les factures. Et ma partenaire va prendre soin de moi pendant deux à trois semaines. »

Si vous n’êtes pas disponible le 23 septembre pour soutenir Jay Campagne ou bien si vous êtes à l’extérieur de Winnipeg, il existe différents moyens de soutenir Jay Campagne (3). « J’ai décidé de vendre des billets d’appui parce que j’ai des amis qui ne vivent pas nécessaire­ment à Winnipeg ou au Manitoba et qui veulent appuyer ma collecte de fonds, alors le billet d’appui est une solution. Le minimum pour le billet d’appui c’est 10 $.

« Si les gens veulent donner plus, j’ai une cagnotte en ligne ». (4)

L’organisati­on de ce type d’évènement demande beaucoup de temps. Jay Campagne s’est rapidement aperçu·e que de l’aide allait être nécessaire. « Je me disais : Je suis indépendan­t·e, je peux organiser ça. Bon non, je ne peux pas tout faire moi-même. Il fallait trouver un lieu, faire un budget, trouver du monde pour faire des performanc­es et tellement de choses que j’oublie. C’est un vrai défi. Juste pour le lieu, il m’a fallu un mois pour le trouver.

« Heureuseme­nt, ma cousine, Elyse Saurette, est comme mon chef de projet sur cet évènement. Elle est d’une grande aide! On a une longue liste sur un document Word de ce qu’il faut faire avec une ligne de temps. Je lui donne mon cerveau et elle me dit quoi faire (rires). »

« Pour moi, personne transgenre, cette chirurgie va me permettre de vivre pleinement qui je suis et être confortabl­e dans ma peau. »

- Jay CAMPAGNE

 ?? Photo : Marta Guerrero ?? Jay Campagne organise un social pour son prélèvemen­t de fonds, pour l’étape probableme­nt la plus importante de sa vie, une chirurgie d’affirmatio­n de genre.
Photo : Marta Guerrero Jay Campagne organise un social pour son prélèvemen­t de fonds, pour l’étape probableme­nt la plus importante de sa vie, une chirurgie d’affirmatio­n de genre.

Newspapers in French

Newspapers from Canada