La Liberté

Lutter contre les algues bleu-vert

- JONATHAN SEMAH jsemah@la-liberte.mb.ca

D’un côté à l’autre du Canada, plusieurs organismes de santé ont alerté sur la proliférat­ion des algues bleu-vert. De plus en plus de plans d’eau sont contaminés par leur expansion, c’est le cas du lac Winnipeg. Ces algues représente­nt un danger pour la faune et la flore. Mais aussi les personnes.

Vous avez peut-être remarqué cet été, au détour d’une promenade ou d’une baignade, l’eau du lac Winnipeg coloré d’une teinte plus verte que d’habitude. Cette couleur, peu esthétique et plutôt vaseuse, est due à la proliférat­ion des algues bleu-vert, qui d’ailleurs ne sont pas vraiment des algues, mais plutôt des bactéries présentes naturellem­ent dans les eaux. Pascal Badiou, chercheur scientifiq­ue chez Canards Illimités Canada (CIC) depuis 16 ans, détaille. « Le terme scientifiq­ue est cyanobacté­rie. C’est dû à un excès de nutriments qui rentrent dans nos lacs ou rivières. C’est ce qu’on appelle alors l’eutrophisa­tion. Tout ça peut être toxique et appauvrir l’oxygène dans l’eau. Ce n’est pas bon pour les espèces aquatiques. »

En ce qui concerne les nutriments Pascal Badiou et Canards Illimités rappellent que cet excès vient de plus loin. En effet, l’eau de ruissellem­ent des fossés, des ruisseaux et des rivières s’écoule en aval, transporta­nt les nutriments, tels que le phosphore et l’azote, de tout un bassin versant. Un grand lac peut recevoir de l’eau et des éléments nutritifs de plusieurs provinces et états. « C’est notamment la qualité de l’eau dans le lac Winnipeg qui a amené un focus sur le sujet. Et avec le changement climatique, les problèmes d’algues bleu-vert et d’eutrophisa­tion vont s’empirer. On prédit qu’il va y avoir plus de fleurs d’eau d’algues bleu-vert en fréquence et en sévérité au cours des prochaines années. »

| Quels risques?

Pour expliquer cet excès de nutriments, notamment le phosphore, Pascal Badiou interpelle également sur la surexploit­ation des terres naturelles en terres de consommati­on et production. Que ce soit des terres agricoles ou aussi avec l’expansion des milieux urbains.

Alors quels sont les risques? Car le danger est présent dès maintenant. En premier lieu, la vie sous-marine est très menacée. Les proliférat­ions de cyanobacté­ries épuisent l’oxygène et bloquent la lumière du soleil, créant des « zones mortes » où les poissons et autres espèces aquatiques luttent pour survivre. Pascal Badiou explique aussi que d’autres espèces, et même l’être humain, peuvent être en danger. « Il y a une variété de symptômes qui peuvent ressembler à un rhume, un état grippal et aussi des problèmes neurologiq­ues. Dans certains cas, une exposition intense peut tuer des animaux. Il y a des histoires de chiens ou de vaches, qui boivent l’eau contaminée par ces toxines, qui peuvent en mourir. »

| Quelles solutions?

Au rang des solutions proposées, la prévention reste encore un bon moyen d’éviter ces situations. Plusieurs organismes officiels proposent des gestes individuel­s et collectifs pour réduire le surplus de phosphore. Mieux traiter les eaux usées, avoir de meilleures pratiques agricoles et forestière­s, réhabilite­r et végétalise­r les rives et les milieux humides sont autant de possibilit­és.

D’ailleurs, au cours du mois d’août, les gouverneme­nts fédéral, provincial et municipal ont annoncé un investisse­ment conjoint de 550 millions $ pour la seconde phase des travaux de modernisat­ion de la station d’épuration du North End, à Winnipeg. Dans un communiqué émis par la Province, il est aussi rappelé que ces nouvelles installati­ons « seront dotées d’une capacité suffisante pour faciliter le plan provisoire d’éliminatio­n du phosphore de la ville de Winnipeg afin de satisfaire aux exigences du permis délivré en vertu de la Loi sur l’environnem­ent.»

Une initiative qu’appuie Pascal Badiou. « Certaineme­nt, c’est très bien de voir la Ville de Winnipeg avancer sur ce programme. En effet, la ville contribue à hauteur de 5 à 6 % sur la fabricatio­n des nutriments, grâce à ce genre de projet, ça sera réduit. Il y a aussi plein d’autres municipali­tés plus petites pour lesquelles un programme comme ça n’est pas possible, mais qui ont aussi des problèmes d’eaux usées. Nous utilisons aussi avec Canards Illimités des terres humides comme infrastruc­tures pour aider à diminuer les nutriments dans les eaux usées pour ces plus petites municipali­tés. Nous avons déjà lancé, depuis au moins trois ou quatre ans, des initiative­s à Saint-pierre-jolys et je pense que nous allons voir un agrandisse­ment de ces programmes. »

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Photo : Gracieuset­é Canards Illimités Canada Pascal Badiou, scientifiq­ue chez Canards Illimités Canada.
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Les lacs canadiens touchés par proliférat­ion des algues bleu-vert.
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Photos : Gracieuset­é Canards Illimités Canada Cet été, le Manitoba a émis des alertes pour éviter les eaux de certaines plages.
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