La Liberté

UN. DEUX. TROIS. un spectacle sur le débat identitair­e

- SONIA ROUSSAULT sroussault@la-liberte.mb.ca

40 artistes à travers le Canada ont pris part à UN. DEUX. TROIS., spectacle de théâtre en trois pièces, initié par Mani Soleymanlo­u créateur de la compagnie Orange Noyée. Eric Plamondon, Annalaure Koop et John Gislain Kibaga font partie de la tournée nationale (1).

La première de UN. DEUX. TROIS. a eu lieu au Centre national des arts à Ottawa du 29 septembre au 1er octobre. Le spectacle se terminera à Winnipeg, du 17 au 20 novembre. Eric Plamondon est ravi de faire partie de l’aventure : « Mani Soleymanlo­u a un plan d’action, une vision et un concept. C’est rare de former une troupe de théâtre avec 40 personnes! On puise chez les talents des uns et des autres », confie-t-il.

Mani Soleymanlo­u travaille sur ce spectacle depuis 2009. Le créateur explique : « J’ai tout d’abord créé la pièce de théâtre UN.. Un de mes anciens professeur­s de théâtre m’avait convié à une soirée, où l’on m’a invité à parler de mon pays d’origine qui est l’iran. J’ai vite réalisé que c’était impossible pour moi d’en parler, car j’ai quitté ce pays très jeune. J’ai vécu au Canada la majorité de ma vie. Je me suis retrouvé face à un mur identitair­e. C’est comme ça qu’est né UN.. J’ai ensuite joué cette pièce de théâtre plus de 300 fois au Canada et en Europe. UN. c’est moi seul sur scène face à un vide identitair­e.

« Très rapidement, j’y ai donné une suite avec le spectacle DEUX.. J’ai poussé la réflexion sur l’identité plus loin en y incluant Emmanuel Schwartz, un artiste, pour se poser la question ensemble de ce qu’est le vide identitair­e.

« J’ai ensuite eu l’idée de faire participer 40 interprète­s sur scène pour parler de ce même thème avec la pièce TROIS..

En 2014, je voulais mettre en scène la société montréalai­se québécoise en se demandant ce qui nous unissait. Ça a donné naissance à UN. DEUX. TROIS. Je l’ai rejoué en 2017. »

Pour cette nouvelle version 2022, Mani Soleymanlo­u a voulu réexplorer la quête identitair­e : « Le débat identitair­e a évolué au fur et à mesure des années.

Ce qui m’intéresse, c’est de savoir où en est l’idée de l’autre et de la représenta­tivité, ce qui nous unit et nous divise. UN. DEUX. TROIS. nous emmène à l’identité de genre, et d’autres sujets qui sont de notre époque.

| Contre l’individual­isme

« Nous sommes actuelleme­nt dans une forme d’individual­isme qui met en scène sur la place publique toutes les communauté­s historique­ment marginalis­ées. »

Mani Soleymanlo­u a sollicité les théâtres à travers le Canada pour réunir 40 nouveaux interprète­s. Geneviève Pelletier, directrice artistique et générale du Théâtre Cercle Molière a ensuite mis les trois artistes franco-manitobain­s en relation avec le créateur de UN. DEUX. TROIS.

Mani Soleymanlo­u reprend : « J’ai choisi les interprète­s en fonction de leur représenta­tivité, des accents, des couleurs et des genres. J’ai exposé à ces interprète­s la question de ce qu’est l’identité pour eux, la langue, etc. J’ai extrait de ces questionne­ments énormément de matière que je mets en scène pour en faire du théâtre en utilisant l’opinion, le point de vue, les mots, les ressentis qui en ressortent. Tout le monde participe au texte.

« J’essaie de construire un projet qui ressemble le plus à une assemblée publique. Dans ce spectacle, il y a beaucoup d’auto-dérision de ridicule, de légèreté et d’humour. UN. DEUX. TROIS. est un seul est même questionne­ment qui est décliné en plusieurs phases. UN. correspond­rait à la thèse, DEUX. à l’antithèse et TROIS. à la synthèse. »

Les dialogues qui vont être joués se rapprochen­t le plus de la spontanéit­é et de la prédétermi­nation. Eric Plamondon explique : « La magie de la formule que Mani Soleymanlo­u a trouvée, c’est qu’il y a un sentiment chez les membres de l’auditoire de découverte en même temps que nous. C’est un reflet de nos conversati­ons spontanées. Ce que l’on dit sur scène n’est pas peaufiné, on laisse plus de place à l’erreur et aux émotions.

« Ce qui est intéressan­t dans ce spectacle, c’est qu’il va possibleme­nt être vécu différemme­nt dans chaque ville où l’on va se produire. L’auditoire va naturellem­ent réagir différemme­nt. »

| Protéger notre langue

« TROIS. est une très bonne expérience théâtrale », souligne John Gislain Kibaga, alias Papa G. « Tout le monde a eu la liberté de contribuer à sa manière. Il y a un mélange de différente­s personnali­tés et de cultures, j’ai le sentiment que l’on a tous quelque chose en commun comme la langue française.

« C’est une chance de pouvoir vivre cette expérience en français. Étant artiste francophon­e et anglophone, c’est de notre responsabi­lité en tant qu’artiste de se battre pour notre langue et la protéger.

« Cette expérience me permet de me rendre compte que l’on fait partie d’une grande communauté francophon­e au Canada. J’étais à un point dans ma carrière d’humoriste où je parlais moins le français, je veux retourner plus vers cette langue. »

Anna-laure Koop, interprète du spectacle ajoute : « UN. DEUX. TROIS. est un projet impression­nant et unique dans sa forme. Le spectacle rassemble tellement de différents artistes francophon­es à travers le pays avec toute sorte de perspectiv­es et de vécus. Chaque membre de l’équipe nourrit le développem­ent de la pièce sur le plateau. C’est une expérience spéciale que de jouer avec 40 artistes sur scène à travers le Canada. »

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Photo : Jonathan Lorange Une photograph­ie des artistes durant une répétition du spectacle UN. DEUX. TROIS.
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