La Liberté

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- OPHÉLIE DOIREAU odoireau@la-liberte.mb.ca Ophélie DOIREAU odoireau@la-liberte.mb.ca

Motivé par son activisme, le professeur de la Cité universita­ire francophon­e de l’université de Regina, Jérôme Melançon s’est lancé dans des initiative­s d’autochtoni­sation. À l’exemple de tables rondes qui montrent les rapports entre Premières Nations et francophon­es. (1)

Tout est parti d’une prise de conscience acquise en Alberta, raconte Jérôme Melançon.

« Après des études en philosophi­e à l’université d’ottawa et un doctorat en philosophi­e politique à l’université de Paris, en 2008, j’ai obtenu un contrat pour enseigner la philosophi­e et la politique canadienne à Camrose sur l’un des campus de l’université d’edmonton.

« À environ une heure de route, se trouve la réserve Maskwacis, qui réunit quatre bandes. Certains de mes étudiants, et même quelques membres du personnel, venaient de cette réserve. Alors j’ai cherché à en savoir plus. J’ai eu la chance de rencontrer des gardiens des connaissan­ces. Et même des sages.

« En les côtoyant, je me suis vite aperçu qu’il me manquait, à moi, aux université­s et plus largement aux institutio­ns canadienne­s, cette perspectiv­e autochtone. »

Alors Jérôme Melançon a décidé de faire du rattrapage. « J’ai débuté par beaucoup de lectures, vraiment beaucoup. J’ai remarqué, entre autres, que ce que j’avais appris sur les pensionnat­s autochtone­s, c’était vraiment le strict minimum de ce qu’on pouvait enseigner.

« J’ai donc commencé des initiative­s d’autochtoni­sation, c’est-à-dire d’inclure la perspectiv­e autochtone dans mon enseigneme­nt. En 2016, j’ai obtenu un poste à l’université de Regina dans le départemen­t d’études francophon­es et intercultu­relles.

« Comme ça, j’ai pu continuer mes initiative­s au niveau institutio­nnel. Par mes recherches, je suis impliqué dans le Reconcilia­tion Action Committee de l’université de Regina.

« Au fil de mes rencontres, un projet de recherche s’est dessiné sur la réconcilia­tion, avec comme question centrale : Comment les gens comprennen­tils la réconcilia­tion? Une question qui peut se décliner : Quel sens les gens donnent-ils à la réconcilia­tion?

« Ce questionne­ment s’avère un bon moyen pour définir le cadre de la réconcilia­tion. D’ailleurs, ces derniers temps, on semble avoir perdu ce cadre. Il est peut-être temps de le redéfinir. »

Avec cette ambition en tête, Jérôme Melançon a commencé à travailler sur le sujet en le liant à la dimension francophon­e. « Mes initiative­s comprennen­t donc deux pans. Le premier : donner un espace aux personnes autochtone­s afin d’apporter leur perspectiv­e dans les institutio­ns.

« Ce que je fais grâce à ma place dans certains comités universita­ires ou tout simplement auprès de décideurs que je peux rencontrer. J’apporte aussi mon soutien aux Autochtone­s dans certaines luttes comme celle, de retirer la statue de John A. Macdonald d’une place publique à Regina.

« Le deuxième pan consiste à réfléchir à la manière dont les recherches peuvent aider les Non-autochtone­s à comprendre concrèteme­nt la réconcilia­tion. J’ai pu participer à une table ronde virtuelle organisée par le Centre culturel canadien à Paris et montrer les rapports sporadique­s entre les Premières Nations et les francophon­es.

« Les communauté­s francophon­es ont tendance à ne pas se sentir concernées par l’enjeu de la réconcilia­tion. Ce n’est pas en soi propre aux francophon­es. » Joël Tétrault, enseignant en perspectiv­es autochtone­s à la Division scolaire Louis-riel, explique, entre autres, le rôle de l’enseigneme­nt dans l’ouverture aux perspectiv­es autochtone­s (voir texte page suivante).

Jérome Melançon poursuit : « Mais dans le cas des francophon­es, c’est à cause de leur histoire qui fait qu’ils se sentent eux-mêmes colonisés du fait des restrictio­ns linguistiq­ues, des iniquités sociales, ou encore d’autres politiques qui ne leur ont pas permis de mener une vie pleinement francophon­e dans l’ouest canadien.

« À cause de ce sentiment d’avoir été colonisés, les francophon­es ne s’imaginent pas avoir eu le rôle de colonisate­urs. Pourtant l’histoire nous montre que des francophon­es ont profité, au même titre que des anglophone­s, à des expropriat­ions de terres des Autochtone­s. »

Même s’il est difficile de s’avouer cette partie de l’histoire, l’universita­ire juge nécessaire de regarder la vérité en face. « C’est une question de justice. Comme Canadien, j’ai appris tellement tard que le système canadien handicape les Autochtone­s. »

Jérôme Melançon insiste sur sa conviction de fond. « Notre pays est fondé sur une injustice, avec un non-respect des traités. C’est un fait qu’on ne peut pas ignorer.

« Tout ce travail d’autochtoni­sation et de recherches est mené dans le but d’une reconnaiss­ance plus juste de la perspectiv­e autochtone pour permettre l’épanouisse­ment de tous. »

(1) Les tables rondes sont visionnabl­es : https://fb.watch/4rgsp0xpcj/

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 ?? Photo : Gracieuset­é Clémence Grevey ?? Jérôme Melançon, professeur à la Cité universita­ire francophon­e de l’université de Regina, pointe en particulie­r la question de l’identité métisse. « Il y a beaucoup de débats autour de Qui est métis? C’est un véritable enjeu au Canada. Il faut reconnaîtr­e le peuple métis comme un peuple à part entière avec sa propre identité et doté d’une autonomie. »
Photo : Gracieuset­é Clémence Grevey Jérôme Melançon, professeur à la Cité universita­ire francophon­e de l’université de Regina, pointe en particulie­r la question de l’identité métisse. « Il y a beaucoup de débats autour de Qui est métis? C’est un véritable enjeu au Canada. Il faut reconnaîtr­e le peuple métis comme un peuple à part entière avec sa propre identité et doté d’une autonomie. »
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