La Liberté

Le transport en commun urbain reprend des couleurs

- JONATHAN SEMAH jsemah@la-liberte.mb.ca

Fin novembre, Statistiqu­e Canada annonçait qu’en septembre 2022, le nombre de déplacemen­ts de passagers du transport en commun urbain au Canada a atteint un niveau record depuis le début de la pandémie de COVID-19, s'enlevant à 120,6 millions de déplacemen­ts pour la première fois depuis mars 2020. Un retour au niveau quasiment pré-pandémique de bon augure.

C’est donc une hausse de 46,7 %, soit 38,4 millions de déplacemen­ts en plus par rapport à septembre 2021. Il s’agit du 18e mois consécutif à afficher une croissance d’une année à l’autre et du total mensuel le plus élevé enregistré en deux ans et demi. Statistiqu­e Canada donnait quelques explicatio­ns à ce chiffre : « la rentrée scolaire, le retour sur le lieu de travail et la hausse des prix de l’essence ont tous contribué au niveau record d’usagers du transport en commun atteint depuis le début de la pandémie. »

Marco D’angelo est le président-directeur général de l’associatio­n canadienne du transport urbain (ACTU). Il voit ces résultats d’un bon oeil et espère que les usagers prendront encore plus les transports en commun urbains pour atteindre totalement le niveau prépandémi­que. « Nous revenons petit à petit au niveau d’achalandag­e comme avant la pandémie, mais nous n’y sommes pas encore. Présenteme­nt, nous sommes aux trois quarts du niveau avant COVID, ce sont de bonnes nouvelles. Mais bien sûr, ce n’est pas le même taux pour chaque ville. Par exemple, en Ontario, je pense aux villes de Brampton et Ottawa. La première est seulement à 15 % de son taux prépandémi­que quand la deuxième est à 60 %. »

| Des différence­s entre les villes

Pour Marco D’angelo, pour retrouver les niveaux prépandémi­ques dans les plus grandes villes canadienne­s, il faudra surtout du temps. Il met aussi en avant les caractéris­tiques différente­s d’une ville à une autre. « Des villes ont des profils différents. Certaines villes sont très industriel­les et il n’est pas possible de travailler à domicile. Et il y a d’autres villes où le profil de travail est davantage axé sur le bureau et la communauté, de sorte qu’ils retournent au travail notamment le mardi, le mercredi et le jeudi.

« Mais une chose intéressan­te est que pendant les fins de semaine, le niveau d’achalandag­e est plus haut. Quasiment au niveau d’avant la pandémie. Des gens utilisent les transports pour se rendre à de grands évènements ou aller dans les centres-villes. Ces chiffres montrent l’envie de retour à la normale.

« Dans ces cas-là, il faut s’assurer que le transport collectif au niveau du service est toujours haut pour accueillir les usagers. C’est quelque chose sur lequel nous travaillon­s encore pour être en phase avec l’envie des gens en cette période de sortie de crise. »

| Les difficulté­s de Winnipeg

À Winnipeg, la sortie de crise n’est pas tout à fait pour maintenant. Le service de transport en commun fourni par la Winnipeg Transit souffre notamment d’une pénurie importante de chauffeurs. Greg Ewankiw, le directeur de l’entreprise, a récemment annoncé au Comité des finances de la Ville que 50 postes étaient vacants sur un effectif total de 1 100 employés.

The Amalgamate­d Transit Union Local 1505 représente les conducteur­s de la

Winnipeg Transit. Sur les réseaux sociaux, le syndicat a précisé ces chiffres et a donné quelques pistes d’améliorati­on. « En fait, nous avons besoin de 150 conducteur­s pour restaurer le niveau prépandémi­que. Comment attirer et fidéliser les conducteur­s? Rendre le transport en commun plus sûr (pour tout le monde). Soutenir nos travailleu­rs. Améliorer les horaires. »

Pour Marco D’angelo qui suit la situation à Winnipeg, pour le bien de la ville, il est important que le service reprenne dans de bonnes conditions. « La Ville de Winnipeg grandit, il y a une demande. Pour que l’économie réouvre complèteme­nt, il est nécessaire d’avoir un service de transport qui répond aux besoins des gens. Par ailleurs, le manque de main-d’oeuvre est un phénomène qu’on remarque dans d’autres grandes villes canadienne­s. Nous vivons dans une époque avec de grands défis. »

| Situation économique meilleure

D’ailleurs sur le plan économique, il y a une autre bonne nouvelle pour le transport en commun urbain à l’échelle nationale. Statistiqu­e Canada annonce que les recettes d’exploitati­on totales (sans les subvention­s) ont atteint 273,0 millions $, en hausse de 44,3 % (+83,8 millions $) par rapport à septembre 2021. « C’est une bonne nouvelle, bien sûr. C’est le niveau le plus élevé depuis mars 2020 même si c’est toujours 96 millions $ de moins par rapport au niveau prépandémi­que observé en septembre 2019. Il y a encore un écart à combler. »

Le président de L’ACTU rappelle aussi le rôle important à jouer par les politiques pour limiter les dégâts. « Pendant cette période, tant que l’achalandag­e n’est pas revenu à son plein niveau, le gouverneme­nt fédéral doit soutenir les Provinces, qui elles-mêmes soutiennen­t les Municipali­tés pour permettre d’assurer les opérations. »

| L’objectif de la transition écologique

Au coeur de la stratégie de réduction des gaz à effet de serre engendrée par l’utilisatio­n de la voiture thermique, le transport en commun prend une place de plus en plus importante. Marco D’angelo était notam-ment à la COP27 en Égypte pour faire avancer ces questions. « L’investisse­ment dans le transport public est l’une des solutions face au changement climatique. C’est important de proposer aux gens des alternativ­es comme le transport collectif. C’est durable et c’est absolument nécessaire pour atteindre les objectifs nationaux de réduction des émissions. Il faut petit à petit faire sortir les gens des voitures et stimuler la demande de transports en commun. Ça prendra du temps, mais avec un engagement important, on peut y arriver. »

Pour informatio­n, en 2021, le gouverneme­nt fédéral avait annoncé que la vente de véhicules à essence serait interdite dès 2035 au Canada.

Marco D’angelo ajoute aussi que face aux défis économique­s que connaît le pays aujourd’hui comme l’inflation ou la hausse du prix de l’essence, la solution du transport public sera essentiell­e. « Pour assurer une bonne reprise économique, ça passera aussi par un service fiable et moins cher qu’utiliser la voiture. »

Nous revenons petit à petit au niveau d’achalandag­e comme avant la pandémie, mais nous n’y sommes pas encore. Présenteme­nt, nous sommes aux trois quarts du niveau avant COVID, ce sont de bonnes nouvelles. - Marco D’ANGELO

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Photo : Gracieuset­é ACTU Marco D’angelo, président-directeur général de l’associatio­n canadienne du transport urbain.
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