LE PROJET DES SERRES TOUNDRA CONTESTÉ
Des citoyens de Saint-Félicien contestent un règlement d’emprunt pour amener les infrastructures d’accueil aux Serres Toundra, qui souhaitent implanter le plus gros complexe de serres au Québec. Pendant ce temps, la ville et les promoteurs tentent de convaincre la population du sérieux et de l’importance du projet.
Insatisfaite des réponses obtenues lors d’un conseil municipal, Janine Lavoie, une Félicinoise de 68 ans, a lancé un appel à la mobilisation, en utilisant les médias sociaux, contre le règlement d’emprunt 14-873, qui stipule que la ville investira 2,3 M$ pour amener l’eau et le gaz naturel aux Serres Toundra. L’implantation des serres générerait 160 000 $ de revenus par an pour la ville après la première phase du projet, et plus de 854 000 $ après les 4 phases.
Après une soirée organisée par les opposants, qui a attiré 200 personnes, les élus ont répondu aux questions concernant le projet lors d’un conseil municipal alors que les promoteurs ont tenu une soirée de présentation pour rassurer la population.
« Nous ne sommes pas contre le projet des Serres Toundra, mais nous remettons en question l’implication financière de la Ville dans ce projet », explique Jonathan Hamel, l’un de ceux qui contestent la viabilité de cette implantation de 100 M$. Malgré les efforts des opposants, il n’y aura pas de référendum sur la question, le registre n’ayant pas été signé par 500 personnes.
Stéphane Roy, propriétaire des Serres Sagami, ne croit simplement pas en la viabilité du projet. « Jamais je n’embarquerais dans un projet aussi gros », lance le serriculteur, qui a 20 ans d’expérience. Selon ce dernier, il est préférable de commencer par un projet plus petit pour connaître exactement les coûts de production et le prix de vente sur le marché. « C’est bien beau d’avoir une entente avec un acheteur, mais à quel prix? Pour ma part, je ne pourrais pas survivre avec le prix du marché. Je dois trouver des clients en mesure de payer une valeur ajoutée », explique le producteur de tomates, qui doute aussi de la capacité de l’entreprise à recruter 400 employés, car la plupart des serres ont des problèmes de main-d’oeuvre.
« Nous avons déjà investi 1,7 M$ pour construire les fondations des serres », soutient Éric Dubé, l’un des principaux promoteurs, qui explique que la taille du projet a été déterminée en fonction de sa rentabilité et du marché à combler. L’entreprise investira 36 M$ pour la première phase de construction de 8,5 hectares de serres. Les premiers concombres devraient pousser dès l’automne 2015 et ils seront distribués par Sobeys.
Les promoteurs de Serres Toundra admettent qu’ils n’ont pas d’expérience dans la culture en serre. C’est pourquoi ils comptent sur l’expertise et la technologie de pointe de la firme-conseil hollandaise DLV Plant. Cette dernière offre des projets clés en main. Elle fournira les experts qui exploiteront l’usine pendant au moins deux ans et qui aideront à la formation des spécialistes. M. Dubé mentionne que des serres utilisant cette technologie en Finlande ont un rendement quatre fois plus élevé que les serres québécoises. Les Serres Toundra ont aussi conclu une entente avec l’Université Laval pour la formation.
Question de financement
Jusqu’à maintenant, les Serres Toundra n’ont pas annoncé leurs partenaires financiers. « Pour un projet d’une telle ampleur, ça prendra deux ou trois banques pour partager le risque, en plus de gros financiers comme le Fonds de solidarité FTQ, Fondaction ou Investissement Québec », analyse un expert en financement de projet agricole. Éric Dubé soutient que le montage financier est presque complété et que les partenaires seront annoncés au moment jugé opportun. Une demande de financement, déposée à Développement économique Canada à l’automne, serait en cours d’évaluation.