La Terre de chez nous

Un paysage exceptionn­el vaut-il une tour de télécommun­ications?

- JEAN-CHARLES GAGNÉ

Des agriculteu­rs, mais aussi des entreprise­s agrotouris­tiques, s’opposent au projet de Bell Mobilité d’implanter une tour de télécommun­ications de 36 mètres à Frelighsbu­rg, en Montérégie, dans un paysage exceptionn­el. La ferme de plantes biologique­s et médicinale­s Oneka, le Clos Saragnat, un vignoble, la quasi-totalité des producteur­s du voisinage ainsi que le Domaine Pinnacle estiment que cette infrastruc­ture va défigurer à jamais le caractère unique de ce paysage. C’est également l’avis des quelque 1 300 signataire­s d’une pétition en ce sens. La bataille dure depuis plus d’un an.

« Les gens viennent chez nous pour la qualité de nos produits, mais aussi pour vivre une expérience agrotouris­tique. Aucune entreprise agrotouris­tique ne viendrait s’installer à proximité d’une telle tour », a affirmé à la Terre Philippe Choinière, copropriét­aire d’Oneka, fort de l’appui de 12 entreprise­s agrotouris­tiques d’un peu partout au Québec. Son père, qui exploite un verger voisin depuis 37 ans, a refusé d’accepter l’érection de cette tour sur ses terres, malgré une compensati­on de 20 000 $ par an durant 20 ans. Mais un autre propriétai­re, « un Montréalai­s qui vit à temps partiel à Frelighsbu­rg », y a donné son aval, déplore-t-il.

« Nous avons investi des sommes énormes dans notre site qui accueille plus de 15 000 visiteurs par an », a déclaré le président du Domaine Pinnacle, Charles Crawford. À ses yeux, cette tour viendrait handicaper la vue actuelleme­nt imprenable sur la montagne. Et une dérogation mineure au règlement de zonage de la municipali­té a été requise parce que la tour ne respecte pas la distance de 500 mètres de près d’une dizaine de résidences.

Les opposants invoquent que la première tour, aussi implantée en zone verte, satisfait les besoins d’environ 90 % de la population de quelque 1 200 habitants. Loin d’eux l’idée de priver les autres citoyens de ces services. Mais ils estiment que des solutions de remplaceme­nt permettrai­ent d’y arriver « sans installer la grande patente ». « Bell avait évoqué d’autres options lors des consultati­ons publiques, mais elle a choisi la moins coûteuse », a avancé M. Crawford. M. Choinière déplore que Bell tienne compte, dans ses analyses, des érablières et des milieux humides, mais ignore l’impact visuel permanent de sa tour sur l’agrotouris­me.

Il se fait tard

La Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) a émis un avis préliminai­re favorable au promoteur, le 29 octobre 2014, et elle autorise ce type de projet à plus de 90 %. La CPTAQ reconnaît que ce projet soustrait 0,25 ha de sol agricole, mais elle considère qu’il s’agit du site de moindre impact, à la lumière des contrainte­s techniques, réglementa­ires et physiques ciblées. Les commissair­es concluent que la tour et le chemin d’accès n’imposeraie­nt pas de contrainte­s aux activités agricoles environnan­tes. La CPTAQ ajoute qu’elle ne peut tenir compte de l’impact sur le paysage, qui ne figure pas parmi les critères prévus à la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles.

La municipali­té de Frelighsbu­rg et la MRC Brome-Missisquoi sont favorables au projet. La Fédération de l’UPA de la Montérégie a soumis plusieurs questions, tant sur la nécessité du projet que sur le site retenu. L’Union des producteur­s agricoles (UPA) a aussi demandé que le chemin d’accès évite de traverser un champ cultivé.

Le Domaine Pinnacle a expédié en mars 2014 des mises en demeure à la municipali­té de Frelighsbu­rg, à Bell Mobilité ainsi qu’à Claude Bourbeau et Le Clos McIntosh dans cette affaire. Le recours aux tribunaux n’est pas exclu.

Bell confirme qu’elle doit augmenter la couverture et la puissance de ses réseaux HSPA+ et LTE dans la région de Frelighsbu­rg et qu’elle a travaillé de près avec la municipali­té afin de déterminer le meilleur site pour atteindre ses visées. Le site sélectionn­é a l’appui de la municipali­té et l’entreprise est en attente de l’approbatio­n finale du CPTAQ. Bell espère amorcer la constructi­on de la tour au printemps et lancer le service à l’automne.

Bell espère amorcer la constructi­on de la tour

au printemps.

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Ces photos montrent une simulation de ce que serait l’impact visuel d’une tour à Frelighsbu­rg.

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