« Diminuer les pesticides, c’est énorme »
Les Producteurs de grains du Québec, qui représentent quelque 11 000 membres, s’inquiètent sérieusement des répercussions de la stratégie que s’apprête à dévoiler le ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. « Changer complètement les pratiques au champ, ce n’est pas quelque chose de facile. Or, demander de diminuer les pesticides, comme semble vouloir le faire le ministère, c’est énorme. Surtout considérant le peu de ressources disponibles pour faire face à un changement de cette taille », analyse le directeur des Producteurs, Benoit Legault, qui cite l’échec de la France dans sa stratégie de réduction des pesticides imposée aux agriculteurs.
Les Producteurs de grains du Québec se disent défavorables à la prescription obligatoire, c’est-à-dire à l’idée que tous les pesticides doivent recevoir l’approbation d’un agronome. « Nous sommes contre cette lourdeur administrative qu’on veut imposer à nos membres. Il y aura aussi des coûts potentiellement liés à ça », souligne M. Legault. Le président Christian Overbeek abonde dans le même sens, s’interrogeant sur l’impact de l’éventuelle stratégie sur la pérennité et la compétitivité des entreprises agricoles. Il ajoute que les producteurs ne sont pas les seuls responsables des problèmes liés à l’utilisation de pesticides, montrant du doigt des lacunes concernant l’information transmise sur les produits. « Ça me choque quand on considère les producteurs comme des “innocents”, comme des gens qui ne se posent pas de questions. Voyons! Personne n’applique des pesticides par plaisir. Il y a des factures rattachées à leur utilisation. Notre volonté de bien faire les choses est là. Mais personne ne peut nous expliquer pourquoi, après avoir respecté les consignes sur les étiquettes des produits, nous en retrouvons dans les cours d’eau. Comme si la toxicité et la mobilité des molécules avaient été mal évaluées par certains services, ce qui dépasse la compétence du producteur », dénonce-t-il, soulignant qu’avant d’imposer des règlements, il aurait fallu que les autorités s’assurent que chaque produit soit doté de la bonne politique d’application.
Les Producteurs de grains assurent qu’ils ne sont pas contre l’idée de diminuer l’impact des pesticides sur l’environnement et qu’ils collaboreront « à toute stratégie réaliste, efficace et faisable en matière de réduction de pesticides ». L’organisation participera d’ailleurs activement à un forum sur le sujet organisé en janvier prochain, mais déplore, en passant, que personne ne mentionne un élément positif, soit que l’indice de risque global lié aux pesticides a diminué depuis 1997.