Dommages au paysage
Appuyés par l’Union des producteurs agricoles (UPA), deux producteurs et transformateurs de plantes médicinales de Frelighsburg demandent à la Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) de réviser la permission accordée à Bell de construire une tour de télécommunications sur le contrefort du mont Pinacle. Philippe Choinière et Stacey Lecuyer, d’Oneka Elements, ignoraient devoir présenter une solution de remplacement au projet de Bell lors de la rencontre publique tenue à Longueuil le 21 janvier 2015. Oneka Elements, Domaine Pinnacle et Clos Saragnat, qui tirent une partie de leurs revenus de l’agrotourisme, considèrent que la tour de 36 mètres défigure le paysage et compromet leurs revenus.
Or, ces entreprises proposent maintenant une solution de rechange plus discrète, dont l’efficience a été confirmée par un spécialiste de Bell. Il s’agit d’ériger trois poteaux de 50 pieds. « Dix de plus qu’un poteau de téléphone, précise Philippe Choinière. Et les propriétaires de terrains où ces poteaux seraient érigés ont accepté. » Le coût de cette option reste à évaluer, mais il serait compa- rable à celui de la tour unique. Un courriel d’un employé de Bell, daté du 2 novembre 2015, confirme qu’il s’agit d’une solution valable, utilisée à Bromont et à Sutton. Le vice-président de Bell aux relations avec l’industrie, Pierre Rodrigue, a dit à la directrice générale de l’Union des producteurs agricoles (UPA), Guylaine Gosselin, que sa compagnie irait néanmoins de l’avant avec sa tour.
« Nous avons considéré et évalué d’autres options proposées et ces options s’avèrent moins optimales et plus coûteuses à long terme, a écrit Caroline Audet, gestionnaire des relations avec les médias chez Bell. En travaillant de pair avec la ville, nous avons opté pour une tour plus basse, moins imposante et sans lumière [...], ce qui permet de réduire l’impact visuel. »
« Nous appuyons la demande de révision des producteurs, affirme le directeur de l’aménagement du territoire et du développement régional à la Fédération de l’UPA de la Montérégie, Pierre Caza. […] Bell se montrerait un bon citoyen entrepreneurial en acceptant de se rasseoir à table avec tout le monde. »
La valeur d’un paysage
Philippe Choinière et Stacey Lecuyer ont consacré temps et argent à documenter la solution de remplacement pour les télécommunications. Ils font la même chose pour tenter de quantifier la perte de revenus pour une entreprise agrotouristique engendrée par une altération du paysage. La chose serait peu documentée.
Lors de la rencontre de la CPTAQ du 20 avril 2015, rappelle Pierre Caza, celle-ci a dit comprendre la position des producteurs, mais que ce n’était qu’une opinion, non une expertise. « On ne leur avait pas dit qu’ils devaient fournir une expertise, souligne M. Caza. Et c’est nouveau, parce que souvent, les gens émettent des opinions. » Pour M. Caza, le paysage est indissociable des activités agricoles, surtout s’il s’agit d’agrotourisme.
« En Europe, souligne Philippe Choinière, dont la démarche est appuyée par une douzaine d’entreprises comme Bleu Lavande et L’Orpailleur, le paysage est protégé par des lois. J’aimerais qu’on se réveille. » M. Choinière avance que son père a refusé 400 000 $ de Bell sur 20 ans pour installer sur sa terre la tour parce qu’il ne voulait pas défigurer la région.