Le vin bio ne se vend pas plus cher
Contrairement à ce qu’on voit dans certaines productions végétales et animales, le prix du vin bio n’est pas nécessairement plus élevé que celui du vin conventionnel. « Il y a un prix médian de 15 $ pour le vin au Québec et on ne peut pas trop s’en éloigner sans affecter les ventes, juge Paul Jodoin, du Vignoble Saint-Gabriel. Oui, nous avons certaines bouteilles qui se vendent à plus de 20 $, mais dans un marché saturé comme celui du vin, c’est diffi- cile de vendre vraiment plus cher qu’en conventionnel. »
L’espoir de vendre à un prix plus élevé n’est donc pas la motivation première du vigneron biologique québécois. Ce dernier adopte plutôt cette régie de culture par respect pour ses valeurs morales et par conviction qu’il peut produire du meilleur vin.
« Au début, nous n’inscrivions même pas le mot “biologique” sur nos bouteilles. Nous étions bio pour notre santé, pour celle de nos employés. Car en conventionnel, beaucoup de produits chimiques sont utilisés et nous y serions fréquemment exposés », commente Chantal Ippersiel, du Domaine des Météores, situé à Ripon dans l’Outaouais.
Du travail exigeant
Le travail associé à la viticulture bio est exigeant et coûteux en maind’oeuvre. Faute d’insecticide, le Domaine des Météores doit recourir à des filets pour protéger ses vignes. « Déployer et attacher 12 km de filets, c’est de l’ouvrage. Inspecter les plants l’un après l’autre aussi », cite en exemple Mme Ippersiel.
Les rendements en raisins se révèlent également moindres en bio. En raison des contraintes en matière de fertilisation et du nombre limité de solutions permettant de repousser les ravageurs, les volumes récoltés peuvent parfois être inférieurs de 30 % à ce qu’ils auraient été sous régie conventionnelle, estime Paul Jodoin. Marc Théberge, du Domaine Bergeville, abonde dans le même sens. Ses vignes produisent un rendement moindre qu’en régie conventionnelle, surtout au moment de l’implantation, où l’apport de fertilisant joue pour beaucoup. « À long terme,
je crois néanmoins que les vignes sous régie bio rejoindront les performances de celles en conventionnel. De toute façon, sous régie biologique, on vise la qualité et la production d’arômes, ce qui n’est pas le cas lorsque les vignes sont “poussées” en surproduction », indique M. Théberge, qui produit l’un des rares vins rouges mousseux sur le marché.
En fin de compte, la viticulture biologique est-elle rentable? Les vignerons interrogés répondent tous par l’affirmative. Le bio, avancent-ils, les force à connaître presque « personnellement » chaque plant de vigne, ce qui les aide à produire des vins de qualité qui se vendent bien.